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« La bouteille d’eau est l’une des sources de contamination les plus importantes aux microplastiques »

Les additifs polluants sont omniprésents dans nos vies : il existe environ 13 000 additifs ajoutés au plastique, dont la moitié sur laquelle nous n’avons pas de données. Sur les additifs connus, 3200 sont considérés comme “substances préoccupantes”. En tout, seuls 130 sont régulés.

Nous sommes tou.te.s contaminé.e.s aux perturbateurs endocriniens, telle est l’alerte de la campagne « Sick Of Plastic » du mouvement On Est Prêt. En cause : l’omniprésence du plastique dans nos vies qui crée une bombe sanitaire encore trop négligée par les pouvoirs publics. Des associations se battent contre les industriels pour faire changer les lois.

La contamination plastique, un enjeu sanitaire

Dans le cadre de sa campagne #SickOfPlastic, le mouvement On Est Prêt a fait un test de contamination à 12 polluants sur 19 personnalités et les résultats sont éloquents. Tous sont contaminés à plusieurs perturbateurs endocriniens que l’on retrouve dans des plastiques. Chaque personne du panel est contaminée par 6 à 10 des perturbateurs endocriniens analysés. 8 d’entre elles sont contaminées à 10 perturbateurs endocriniens sur 12.

3 bisphénols ont été analysés. 14 personnalités sont contaminées au bisphénol S et 9 au bisphénol A, le fameux BPA aujourd’hui interdit dans la plupart des contenants alimentaires. C’est un perturbateur endocrinien susceptible d’affecter notamment la fertilité. Concernant les phtalates, toutes les personnes testées dans le cadre de l’opération #SickOfPlastic sont contaminées par 6, 7 ou 8 phtalates à des niveaux très variables. Certaines personnalités se retrouvent exposées à des phtalates +120 fois plus que d’autres.

« Ces résultats confirment que notre société utilise beaucoup trop de plastique. Les phtalates sont encore plutôt autorisés donc c’est normal de les retrouver dans nos organismes. C’est plus surprenant sur les Bisphénol qui sont interdits dans les contenants alimentaires. Ils ne devraient presque plus se retrouver dans les échantillons humains donc on suppose qu’ils doivent venir des autres BPA contenus dans les plastiques, cela traduit le fait que le plastique est omniprésent dans notre vie quotidienne et qu’il continue à contaminer l’être humain » explique Mathilde Body-Malapel, chercheuse dans une unité INSERM à l’Université de Lille, pour La Relève et La Peste

Les additifs polluants sont omniprésents dans nos vies : il existe environ 13 000 additifs ajoutés au plastique, dont la moitié sur laquelle nous n’avons pas de données. Sur les additifs connus, 3200 sont considérés comme “substances préoccupantes”. En tout, seuls 130 sont régulés.

« On est très à l’aise au niveau scientifique sur la toxicité notamment des bisphénols qui, à des quantités minimes, ont une toxicité reconnue sur trois critères : reprotoxiques car ils diminuent la fertilité, neurotoxiques et toxiques pour le système immunitaire. Pour les phtalates, c’est pareil, on connaît très bien leur toxicité et notamment leur reprotoxicité de façon transgénérationnelle car ils entraînent des dommages sur les capacités reproductives de plusieurs générations. » détaille Mathilde Body-Malapel, chercheuse dans une unité INSERM à l’Université de Lille, pour La Relève et La Peste

Nos cuisines deviennent ainsi de grandes zones de contamination. Si le bois est critiquable en terme de risque bactériologique, les cuisines d’antan en inox et en verre étaient beaucoup plus saines. La chercheuse est catégorique, parmi les objets du quotidien qui nous empoisonnent :

« La bouteille d’eau en plastique est l’une des sources les plus importantes de contamination aux microplastiques »

Toute une société à transformer

Le problème des perturbateurs endocriniens réside dans le fait que la plupart des composants des objets du quotidien ne sont pas dévoilés au public pour des raisons de « secret industriel ». Résultat, quand une molécule toxique est interdite par la législation, elle est aussitôt remplacée par une homologue tout aussi inquiétante. C’est ce qu’il s’est passé lorsque le bisphénol A a été interdit dans la plupart des contenants alimentaires. Depuis, les fabricants le remplacent bien souvent par ses cousins, les bisphénols F ou S, dont les effets sur la santé commencent tout juste à être étudiés et préoccupent tout autant les chercheurs.

« Au moment de la fabrication, tous ces additifs sont ajoutés sans respect du principe de précaution et depuis 1950 on sait qu’il y a 9% seulement du plastique qui a été recyclé, pour 91% brûlé ou rejeté dans la nature. Dans l’environnement, le plastique se fragmente en micro puis nanoparticules et se comporte comme une éponge avec tous les virus alentours, capte toutes les bactéries et devient une bombe sanitaire. C’est pour ça qu’on le retrouve partout dans l’eau, la pluie et l’air. Une étude récente a démontré qu’il pleut 40kgs de plastique tous les jours à Paris, même lorsqu’il fait beau. » explique Magali Payen, fondatrice d’On est prêt et d’Imagine 2050, pour La Relève et La Peste

Le plastique a tellement intégré l’ensemble de notre environnement qu’on le retrouve à présent dans le sang humain et le placenta, contaminant les bébés avant qu’ils naissent.

« Je travaille particulièrement sur le microplastique et les polymères de plastique. Nous sommes en train de révéler la toxicité du microplastique en ce moment au niveau mondial, ce n’est pas encore bien reconnu au niveau règlementaire mais c’est en train d’exploser. A cause du fameux effet cocktail, il y a une forte probabilité que les toxicités entre les plastifiants et les microplastiques s’additionnent. Que va-t-il falloir pour que le monde se rende compte qu’il faut arrêter ce plastique partout qui est en train de nous préparer d’importants problèmes de santé à long terme ? » s’inquiète Mathilde Body-Malapel, chercheuse dans une unité INSERM à l’Université de Lille, pour La Relève et La Peste

Capture d'écran Sick of Plastic

Ce kit pour déplastifier sa vie récapitule les recommandations d’associations différentes

La campagne d’On est prêt a démarré en novembre 2023 à l’occasion du règlement sur l’emballage au parlement européen et du rassemblement de 175 pays à Nairobi, au Kenya ? Ce dernier a échoué à poser des bases ambitieuses d’un premier traité mondial pour lutter contre les plastiques. Les pourparlers continueront en avril 2024 au Canada pour se conclure en Corée du Sud fin 2024.

« Parmi les biologistes avec lesquels on travaille, Marc-André Selosse nous a demandé de rappeler la grande règle du jeu. Une loi de sélection naturelle n’est pas respectée dans le sens où on émet tellement de xénobiotiques dans la nature, à une telle rapidité, par cocktail chimique que le vivant n’est plus en capacité de s’adapter et cela vient saper l’ensemble des mécaniques du vivant. C’est une alerte mondiale dont il s’agit » détaille Magali Payen, fondatrice d’On est prêt et d’Imagine 2050, pour La Relève et La Peste

Une coalition d’organisations demande ainsi à réduire la pollution à la source pour tous les plastiques non-essentiels. Pour les hôpitaux, le but est de réduire les additifs toxiques et mettre en place une économie circulaire avec un recyclage possible (sachant que le recyclage est très compliqué à cause des alliages).

Surfrider, ZeroWasteFrance, BreakFreeFromPlastic, et le Réseau Vrac ont dû faire face au lobbying intensif d’une cohorte de restaurateurs et d’industriels de l’emballage concernant la proposition de règlement relative aux emballages et aux déchets d’emballages de la Commission européenne

Cette proposition, conçue pour faire face aux niveaux alarmants de déchets d’emballages en Europe, a été largement affaiblie sous la pression d’un lobbying intense, aboutissant à la suppression de la plupart des dispositions visant à lutter contre les emballages inutiles et les objectifs de réutilisation pour 2040.

Maigre victoire : les BPA et les PFAS ont enfin été interdits dans le plastique. Pour les ONGs qui veulent en finir avec la contamination du plastique, tout reste à jouer car les trilogues auront lieu courant Janvier.

Sources : « Aujourd’hui, 40 kilos de pluie de plastique sont attendus » : la « météo plastique » arrive à Paris, LeMonde, 25/05/2023 /

Laurie Debove

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