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Des milliers d’animaux sauvés : martre, renard et corbeau ne sont plus classés « nuisibles »

La France fait aujourd'hui figure d'exception en Europe, non pas par sa volonté de protéger le vivant, mais bien par l'archaïsme de ses politiques de gestion de la faune sauvage.

Le Conseil d’État a invalidé l’arrêté ministériel fixant les listes départementales d’espèces considérées comme “nuisibles”. Une décision saluée par les associations de protection de la biodiversité, qui y voient une victoire juridique décisive mais encore insuffisante.

Une « victoire historique » pour les animaux

Ce mardi 13 mai 2025, le Conseil d’État a rendu un verdict décisif en annulant de nombreux classements d’espèces comme « nuisibles » dans plusieurs départements français. Une décision saluée par les associations de protection de la biodiversité à l’origine des recours juridiques déposés en 2023, à l’instar de l’Association pour la Protection des Animaux Sauvages (ASPAS) qui se réjouit dans un communiqué que cette « victoire historique pour les “nuisibles” redonne espoir pour la protection de tous ces mal-aimés qui font pourtant la richesse de notre biodiversité ».

Parmi les modifications notables :

  • La martre est entièrement retirée de la liste des Espèces Susceptibles d’Occasionner des Dégâts (ESOD) dans les 26 départements où elle était encore classée, ce qui est acclamé comme étant une “victoire totale”.
  • La fouine est déclassée dans l’Aveyron, le Morbihan et le Territoire de Belfort.
  • Le corbeau freux est retiré de la liste dans les départements du Nord et du Pas-de-Calais.
  • La corneille noire est déclassée dans plusieurs départements, dont les Alpes-de-Haute-Provence, les Hautes-Alpes et la Haute-Loire.
  • La pie bavarde, l’étourneau sansonnet et le geai des chênes voient également leur statut révisé dans divers départements.
  • Le renard roux est partiellement déclassé dans certains départements, notamment l’Aveyron, la Haute-Loire et la Lozère, et il “voit son sort amélioré” dans 11 autres départements grâce à l’interdiction du déterrage.

Un verdict salué, mais toutefois incomplet

À l’annonce de ce verdict, la réjouissance est de mise, car ce sont des dizaines de milliers d’animaux qui seront épargnés grâce à cette décision. Mais les acteurs à l’origine des recours soulignent toutefois que cela ne constitue qu’une étape vers une protection complète de la faune sauvage.

« Là où [nous sommes] quand même assez déçus, c’est par rapport au renard », confie l’ASPAS. Et pour cause, le goupil reste injustement considéré comme un “nuisible” dans pas moins de 85 départements et est, de fait, particulièrement exposé à des pratiques sordides.

De plus, comme toutes les espèces “susceptibles d’occasionner des dégâts”il est également “chassable”, et peut faire l’objet de battues administratives exceptionnelles. Un véritable « triple acharnement » que les défenseurs du vivant déplorent tant ce dernier occupe un rôle primordial dans la nature.

Car l’objectif poursuivi est double : mettre un terme définitif à la classification ESOD et réhabiliter ces animaux persécutés en s’intéressant à leur rôle au sein des écosystèmes. Il est nécessaire pour cela de ne plus les considérer à travers le prisme de leurs impacts sur les activités humaines, mais plutôt à travers leur contribution à l’équilibre des milieux qu’ils peuplent.

Un classement contraire à la science

Depuis la fin des années 80, l’État, aujourd’hui via le ministère de la Transition écologique, établit la liste des ESOD, exposant ainsi certains animaux – qualifiés de “nuisibles” – à la “destruction” par arme à feu, piégeage ou déterrage, et ce, tout au long de l’année. Ce classement, reposant principalement sur des déclarations de dégâts « effectuées essentiellement par les chasseurs et les agriculteurs », est loin de faire l’unanimité.

« Toutes les décisions en France concernant la faune sauvage sont malheureusement téléguidées par le monde de la chasse et aussi de l’agriculture », déplore l’ASPAS qui trouve « très regrettable » que l’ « on n’accorde aucune crédibilité aux scientifiques » en ce qui concerne la conservation de la faune sauvage.

Un constat corroboré par une récente étude de la Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité, résumant la situation paradoxale d’un pays qui, tout en se prétendant soucieux de la biodiversité, continue de légiférer contre ses propres écosystèmes. La France fait aujourd’hui figure d’exception en Europe, non pas par sa volonté de protéger le vivant, mais bien par l’archaïsme de ses politiques de gestion de la faune sauvage.

Là où d’autres pays européens expérimentent et financent des solutions alternatives – à l’instar des initiatives de protection des élevages en Allemagne pour faire face aux loups – la France persiste dans une logique de destruction. Une étude comparative réalisée à la demande du ministère de la Transition écologique montre que l’Hexagone est aujourd’hui le seul pays de l’Union à maintenir une telle classification des ESOD.

Le rapport suggère que la France pourrait bénéficier d’une révision de sa politique de gestion de la faune sauvage, en s’inspirant des pratiques de ses voisins européens qui privilégient des approches plus écologiques et participatives.

Les associations appellent donc à une révision complète des politiques en matière d’encadrement des espèces sauvages en France, en s’appuyant sur des données scientifiques et en tenant compte des rôles écologiques essentiels que jouent ces animaux.

Il ne s’agit plus de tuer pour prévenir, mais de comprendre pour coexister.

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Louis Laratte

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