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L’Amazonie risque de plus en plus vite de se transformer en savane

S’il est difficile pour les chercheurs de définir la date exacte à laquelle ce point de non-retour serait atteint, ils estiment qu’au cours actuel des choses cela pourrait se produire très rapidement : entre trente et quarante ans.

Depuis quelques années, les scientifiques lancent l’alerte sur le point de non-retour que pourrait atteindre la forêt amazonienne, à force de déforestation, feux de forêt mais aussi des sécheresses qui limitent le phénomène d’évapotranspiration, indispensable à sa survie. Une nouvelle étude le confirme : il est désormais fort probable que le poumon vert de la planète se transforme un jour en savane, et ce bien plus rapidement qu’auparavant.

A l’heure de la crise écologique, de nombreuses études scientifiques s’intéressent désormais au point de non-retour des écosystèmes, cet instant où leur état de dégradation est tel qu’ils ne sont plus capables de se régénérer.

Lundi 7 mars, une nouvelle étude parue dans la revue scientifique Nature est venue confirmer les pires craintes sur la survie de l’Amazonie : en 20 ans, les trois quarts de la forêt amazonienne ont perdu une grande partie de leur capacité de résilience, une menace terrible pour le devenir de cet écosystème crucial dans l’équilibre terrestre.

Pour parvenir à ces résultats, les trois chercheurs de l’université d’Exeter, au Royaume-Uni, de l’Institut de recherche sur les impacts climatiques à Postdam et de l’université technique de Munich, en Allemagne, ont analysé des images satellite de ces vingt dernières années, marquées par des incendies et deux sécheresses majeures en 2005 et en 2010 durant lesquelles l’Amazonie a émis plus de carbone qu’elle n’en a stocké.

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Ces nouveaux travaux viennent s’additionner aux derniers rapports du GIEC, spécifiant que le manque de précipitations va gravement s’accentuer dans les prochaines années, sans une réduction massive des émissions anthropiques de gaz à effet de serre. Or, plus un écosystème est grand, et plus il va changer lentement, mais de façon disproportionnée et irréversible à échelle de vie humaine, ainsi que l’expliquait cette étude de mars 2020.

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Les chercheurs se sont surtout intéressés à la présence en eau, l’évolution de l’état général de la végétation et l’activité photosynthétique des espèces. Si la perte de résilience de l’écosystème est plus prononcée dans les zones les plus sèches, où l’activité humaine est plus intense et notamment au Brésil ; ce phénomène alarmant est également à l’œuvre dans des zones normalement préservées de l’humain, ainsi que le précise un des chercheurs pour le journal LeMonde.

Aereal view of an area deforestated by soybean farmers in Novo Progreso, Para, Brazil, in this September, 2004 – Crédit : AP Photo/Alberto Cesar-GREENPEACE/HO

En effet, les sécheresses répétitives, combinées aux incendies provoqués par l’homme, bloquent le phénomène d’évapotranspiration des plantes, parfois appelé « rivières volantes », grâce auquel la forêt amazonienne est capable de générer une humidité constante et sa propre pluie. Ainsi, l’évapotranspiration des arbres émet quotidiennement jusqu’à 20 milliards de tonnes de vapeur d’eau. En 2019 déjà, le Peterson Institute lançait l’alerte sur la dégradation alarmante de ce phénomène naturel.

Pour cet observatoire indépendant, l’Amazonie se rapprochait trop dangereusement de son seuil de non-retour de 20 % à 25 % de sa superficie totalement détruite. Aujourd’hui, nous en sommes à 15%.

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Toujours selon le Peterson Institute, la destruction effrénée de l’Amazonie peut en faire une véritable bombe climatique à retardement. Il estimait alors qu’elle pourrait relâcher 200 millions de tonnes de carbone dans l’atmosphère et entraîner une montée en puissance de la crise climatique.

Pour cette nouvelle étude parue dans la revue Nature, ce chiffre est loin de la réalité. Les trois chercheurs estiment que la grande forêt tropicale, si elle était totalement détruite, pourrait relâcher 90 milliards de tonnes de dioxyde de carbone, actuellement stocké dans ses arbres et en partie dans son sol. Un chiffre qui donne le vertige sur son impact potentiel.

S’il est difficile pour les chercheurs de définir la date exacte à laquelle ce point de non-retour serait atteint, ils estiment qu’au cours actuel des choses cela pourrait se produire très rapidement : entre trente et quarante ans.

Pour eux, il n’est cependant pas question de s’asseoir et d’attendre le pire, mais bien de profiter de la dernière fenêtre de tir qu’il reste à l’humanité pour arrêter sa folie destructrice avant d’entraîner l’irréparable, à une échelle de vie humaine.

Lire aussi : Un projet de voie ferrée longue de 900 km menace la survie de la forêt amazonienne et celle des peuples autochtones

Car les dirigeants politiques, Bolsonaro en tête, ont bien le pouvoir d’arrêter l’exploitation et la destruction systématique d’un des plus grands organismes vivants de la planète. Dans une étude de 2018, le WWF a révélé que la France a contribué à déforester 5,1 millions d’hectares, soit environ deux fois la superficie de la Bretagne, en cinq ans (2013-2018). Cela est dû à ses importations de 7 ressources : soja, cacao, bœuf & cuir, huile de palme, caoutchouc naturel, bois et pâte à papier.

Au-delà des milliers d’espèces animales et végétales que la forêt abrite, c’est la survie de l’espèce humaine qui est intrinsèquement liée au devenir du poumon vert de la planète. Mettre fin au modèle agroindustriel dévastateur, à l’élevage intensif, et aux accords commerciaux internationaux mortifères tels que le Mercosur ne deviendra bientôt plus une question de choix politique, mais de survie.

Crédit photo couv : La forêt amazonienne – ESA/A.Gerst, CC BY-SA 3.0 IGO

Laurie Debove

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