Le « Village de l’Eau » se tient du 16 au 21 juillet autour de la défense du bien commun qu’est l’eau. Au programme : chantiers collectifs, formations, rencontres, conférences et table-rondes. Mais la municipalité de Melle, la commune qui l’accueille, doit faire face à une pression policière et institutionnelle.
Le Village de l’Eau
À Melle, Sylvain Griffault, le maire, est un partisan du dialogue et de l’échange pour échapper à la violence et parvenir à avancer en entendant les contraintes des uns et des autres et les impératifs de la physique, de la chimie et de la nature.
Ce sont les raisons qui l’ont conduit à recevoir le village de l’eau en 2023. Les organisateurs l’ont convaincu du bien-fondé de cette démarche très facilement. La déception face aux violences qui ont émaillé la marche sur Sainte-Soline, la pression policière et institutionnelle d’une rare intensité, la transformation d’un champ en zone de guerre par des forces de l’ordre sur-armées, ont dissimulé le travail réalisé au village de l’eau l’année dernière.
Comme cette année, il s’agissait de rassembler des intervenants et des militants pour des conférences, des formations, des tables-rondes ou des spectacles.
Les organisateurs (Attac france et Solidaires 79) et la mairie se sont entendus sur les modalités de l’événement : une semaine de débats et de formations sur le thème de l’eau, élément fondamental de la vie, lieu d’expression pluraliste et fondée scientifiquement. L’eau, pensée comme un bien commun. Bassines non Merci !, la Confédération paysanne et les Soulèvements de la Terre contribuent aux débats et à l’animation. Le village est configuré pour accueillir 6000 personnes en instantanée et on en attend 15 000 sur les 5 jours.
Et comme l’année dernière, alors même qu’aucune manif’action n’est prévue, la pression policière, 4000 gendarmes sollicités, s’est exercée dès la préparation.
Répression et méga-bassines
« On ne salue pas la manière dont Goliath empêche David de bouger. En revanche, nous saluons la responsabilité des organisateurs. »
Le maire constate la criminalisation dès l’accès. Des matériels, exigés par la préfecture pour sécuriser le site, ont été bloqués pendant plusieurs heures par la gendarmerie comme les extincteurs ou les produits médicaux. D’autres ont été confisqués comme les mégaphones indispensables aux annonces sur le village.
« Nous sommes soumis à des injonctions contradictoires. » déclare Sarah Klingler, 1ère adjointe au maire.
D’un côté, la préfecture pose des exigences qui paraissent légitimes en termes de sécurité. De l’autre côté, la même préfecture donne des ordres aux gendarmes qui empêchent de répondre à ces injonctions. Et c’est d’autant plus déstabilisant que le programme ne présente aucune aspérité particulière.
Qu’est-ce qui justifie en effet qu’on confisque les pochoirs nécessaires à la mise en place de la signalétique ? Qu’est-ce qui justifie qu’on fouille tous les véhicules et tous les sacs des arrivants compliquant ainsi l’accès au site ? Comment expliquer des amendes et la confiscation de tire-bouchons ou de parapluies ?
« J’ai le sentiment qu’à nouveau, la volonté de l’État est de jeter l’anathème sur les participants au village de l’eau alors même que le choix clairement exprimé par les organisateurs que sont ATTAC et Solidaires 79 est non-violent. »
Le ministre de l’intérieur n’a t-il pas annoncé à la veille de l’ouverture qu’’il craignait des “actes d’une très grande violence”. Peut-être a-t-il omis de préciser qu’il ne s’agissait pas de la violence des participants au village de l’eau mais de celle déjà exprimée par la Coordination rurale.
Après avoir apporté leur soutien au Rassemblement National, les dirigeants de la Coordination Rurale (CR) ont appelé leurs adhérents à se mobiliser contre le Village de l’Eau à Melle, le vendredi 19 juillet.
Or, la Confédération Paysanne, Bassines Non Merci ! et les organisateurs proposent encore une fois un dialogue et les élus appellent à la non-violence. Pour créer les conditions de la violence, monter les agriculteurs contre les écologistes est désormais un modèle éventé que le gouvernement et toute la droite pratiquent depuis plusieurs années déjà.
Les maladaptateurs face au front militant
Pourtant, seuls 4% des agriculteurs bénéficient des fameuses bassines qui sont une mauvaise réponse à un vrai problème. Leur prétention : nourrir le monde sans nourrir la population locale, alors qu’il est clair et démontré par les chercheurs comme par la FAO qu’il faut rapprocher la production de la consommation, qu’il faut redonner de la place à la biodiversité et renvoyer la chimie à des utilisations exceptionnelles.
Ce premier jour, au village de l’eau, tout est calme. Les conférences, toutes plus intéressantes les unes que les autres, se déroulent dans le calme et suscitent de nombreuses questions de participants très engagés. Aucune agressivité n’est décelable.
Un faux procès joué par les scientifiques en rébellion en interaction avec la salle aborde les thèmes de l’eau, de l’absurdité des bassines avec beaucoup d’humour, et soulève l’hilarité du public. Là non plus, pas une once d’agressivité. Rien ne permet de penser qu’il y ait là la moindre raison de s’inquiéter de la situation.