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Violences policières : les défenseurs des droits humains dénoncent un virage autoritaire

« Ce sont des brigades de répression de la violence qui agissent elles-mêmes d'une façon qui est immédiatement ressentie comme violente. Donc, ça provoque forcément une étincelle. »

Le mouvement social contre la réforme des retraites se durcit après le recours au 49.3. Le mercredi 22 mars, Patrick Baudouin, le président de la Ligue des Droits de l’homme, a dénoncé : « On est dans une situation alarmante pour la démocratie. » D’après lui, les violences policières récurrentes ne peuvent que faire dégénérer la situation. Ces violences, ainsi que des centaines d’interpellations, démontrent pour les défenseurs des droits humains des abus de pouvoir auxquels il faut mettre un terme le plus rapidement possible.

Claire Hédon, la défenseure des droits, s’est dit : « préoccupée par les vidéos circulant sur les réseaux sociaux, de nombreux articles de presse, des témoignages et saisines reçus par l’institution sur de possibles manquements déontologiques dans le maintien de l’ordre au cours des évènements des jours derniers ».

Patrick Baudouin explique auprès de France Info ne pas contester la difficulté du métier ni le fait qu’il n’est pas normal que des policiers puissent être blessés, puisque 300 d’entre eux l’ont été depuis le début du mouvement :

« Le problème, c’est la réponse qui est apportée au niveau du pouvoir, dans la technique du maintien de l’ordre. C’est une technique à nouveau de provocation et de violence qui elle-même va générer inévitablement une réaction qui va se reporter sur les policiers eux-mêmes. Donc il faut revenir à une véritable déontologie des forces de l’ordre.

Les policiers ont un numéro d’identification parce qu’il y a des abus, il y a des bavures, c’est incontestable. Le numéro Rio, [ce numéro d’identification individuel] on ne le voit pas pour beaucoup de policiers. Or, c’est élémentaire en termes aussi de déontologie. C’est cela que nous reprochons. »

Pour le président, le recours au matraquage est également assez systématique : « Ce sont des brigades de répression de la violence qui agissent elles-mêmes d’une façon qui est immédiatement ressentie comme violente. Donc, ça provoque forcément une étincelle. »

Selon France Bleu, du jeudi 16 au mercredi 22 mars, 775 interpellations ont eu lieu à Paris, dont 729 qui ont été indiquées par Gérald Darmanin, le ministre de l’intérieur. Claire Hédon alerte également sur les conséquences d’interpellations systématiques par mesure préventive :

« Cette pratique peut induire un risque de recourir à des mesures privatives de liberté de manière disproportionnée et de favoriser les tensions. »

Le mardi 21 mars, Laurent Nuñez, le préfet de police de Paris, a quant à lui estimé pour BFMTV« Il n’y a pas d’interpellations injustifiées. On interpelle des gens pour des infractions qui à nos yeux sont constituées. »

Sur les réseaux sociaux, de nombreuses images montrent l’inverse, et les témoignages se multiplient pour des personnes ayant été emmenées en garde-à-vue sans raison apparente.

Le mercredi 22, l’Association de Défense des Libertés Constitutionnelles a saisi le Tribunal Administratif de Paris, en déposant une requête de référé-liberté à l’encontre des méthodes de maintien de l’ordre du préfet de Paris Laurent Nuñez. L’association dénonce « le recours massif en préventif aux arrestations administratives de manifestantes et de manifestants » et enjoint le juge des référés à y mettre un terme au plus vite.

Dans la seule soirée du 16 mars, à Paris, 282 interpellations sur 292 ont été classées sans suite, la preuve pour l’association du caractère démesuré de ces arrestations.

Elle dénonce : « une atteinte grave aux libertés constitutionnellement garanties d’aller et venir, de réunion, de manifester, ainsi qu’au droit le plus élémentaire à la sûreté garantie par la Déclaration de 1789 ».

Le 20 mars, le Syndicat de la magistrature a publié un communiqué ayant pour titre “L’autorité n’est pas au service de la répression du mouvement social” pour dénoncer ces interpellations préventives, qu’il estime être une « utilisation dévoyée de la garde à vue » et qui démontre « les dérives du maintien de l’ordre, qui détourne l’appareil judiciaire pour le mettre à son service ».

Le Syndicat de la magistrature conclut : « Apprenons de nos expériences passées, l’indignation ne suffit pas : il est aujourd’hui évident que lors du mouvement des gilets jaunes, l’institution judiciaire s’est mise au service d’une répression violente du mouvement social. Le rôle de l’autorité judiciaire est de garantir les droits et libertés des personnes. Nous devons donc les protéger dans l’exercice de droits essentiels à la démocratie : la liberté d’expression et de manifestation. »

Patrick Baudouin considère que le discours d’Emmanuel Macron, qui a estimé devant les députés de la majorité que la foule n’a pas de “légitimité” face au peuple qui s’exprime à travers ses élus, met à nouveau de l’huile sur le feu :

« Il faut distinguer la légalité et la légitimité. Il y a des périodes de notre Histoire où on a eu des lois qui ont été adoptées en pleine conformité avec les dispositions légales et constitutionnelles et pour autant, elles étaient illégitimes. Ce qu’oublie M. Macron, c’est qu’aujourd’hui, il y a une légitimité dans la réaction de la rue car, manifestement, il y a un mouvement populaire de grande ampleur qui est majoritairement et très largement hostile à cette réforme des retraites et à la façon dont ça s’est passé au Parlement.

Venir nous dire aujourd’hui qu’il n’y a pas de légitimité à cette action, c’est extrêmement provocateur et en plus, c’est historiquement erroné. »

Crédit photo couv : Nicolas Liponne / Hans Lucas via AFP

Maïté Debove

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"Le plus souvent, les gens renoncent à leur pouvoir car ils pensent qu'il n'en ont pas"

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