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Dernière Rénovation, XR et ATTAC convoqués à l’Assemblée : la criminalisation s’accentue

Même si les mouvements écologistes peuvent être dissous, on ne s’arrêtera pas. […] C’est le plus grand défi de l’humanité qui nous demande d’être à la hauteur, on n’a pas d’autre choix. »

Les militants de Dernière Rénovation étaient auditionnés ce 26 juin à l’Assemblée Nationale par la commission d’enquête sur les « groupuscules auteurs de violences ». Un énième exemple de stigmatisation des mouvements écologistes.

Face au réchauffement climatique « le déni ou le cynisme ne protègera personne. Et pourtant nous voici là, aujourd’hui, à devoir entendre, malheureusement, des suspicions d’une Commission d’enquête qui se trompe de combat et de coupable » assène Bertrand Caltagirone, un des trois militants de Dernière Rénovation auditionnés.

A l’extérieur de l’Assemblée, quelques militants sont venus soutenir l’organisation. Extinction Rebellion avait aussi été convoquée mais n’a pas souhaité répondre favorablement. Attac France sera entendu par cette même commission le 11 juillet prochain.

L’audition de Dernière Rénovation se tient dans le cadre des « violences urbaines et rurales » lors de manifestations au cours du « printemps dernier » selon les mots du député républicain Patrick Hetzel qui présidait la commission d’enquête. La commission n’a aucun pouvoir d’action mais a pour but de « comprendre les positions de principe » insiste-t-il.

Pourtant, il y a de quoi être « étonné » explique le député Aymeric Caron. « La présence de militants » qui revendiquent la non-violence comme moyen d’action, au sein d’une Commission d’enquête « sur la structuration, le financement, les moyens et les modalités d’action des groupuscules auteurs de violences », amène à « supputer » que Dernière Rénovation « aurait commis des violences ».

« Il y a comme une forme de procès. Je ne comprends pas bien ce que nous sommes en train de faire », assène Aymeric Caron.

Selon la députée du Rassemblement National Edwige Diaz, le positionnement « radical et pour le moins sectaire » de Dernière Rénovation rentrerait dans une « certaine forme de violence ». Avant de poursuivre : « en délégitimant la police, l’État, tout ce qui représente les institutions, est-ce-que vous ne participez pas à l’escalade de la violence ? »

Le droit pénal est pourtant « clair » explique Bertrand Caltagirone. « Sont qualifiées de violences, des violences à l’égard de personnes, pas à l’égard des biens. » 

La totalité de l’audition tourne autour de la définition de la violence et de la frontière entre les mouvements écologistes et les actions dites violentes des derniers mois. 

Des actions « non violentes légitimes »

« Parfois la désobéissance civile, à l’échelle de l’histoire, s’avère nécessaire » explique le député d’Europe Ecologie les Verts Benjamin Lucas.

La méthode « n’est pas nouvelle » développe la militante de Dernière Rénovation, Florence Marchal : le droit de vote des femmes, la reconnaissance des personnes racisées, les droits fondamentaux des personnes atteintes du sida. Toutes ces victoires sont le fruit de « perturbations non violentes ».

Nos actions sont « légitimes » et les choix politiques en matière écologique les ont rendues « nécessaires », « indispensables » selon Bertrand Caltagirone.

L’article 122 alinéa 7 du code pénal le spécifie : « N’est pas pénalement responsable la personne qui, face à un danger actuel ou imminent qui menace elle-même, autrui ou un bien, accomplit un acte nécessaire à la sauvegarde de la personne ou du bien. »

Bertrand Caltagirone insiste, l’enjeu est « si grand » que les militants sont « obligés de transgresser les lois pour y faire face ». L’inaction de l’État contraint les activistes « à bloquer des routes pacifiquement, à mener des actions coup de poing pacifiquement, à s’envoyer en garde à vue pacifiquement, toujours pour vous faire agir » indique le militant Pierre Taied en s’adressant au membre de la commission d’enquête.

La stigmatisation du mouvement est proportionnelle à l’incompréhension et à l’incapacité du gouvernement et du Parlement à agir. La députée Rassemblement national, Edwige Diaz, se demande ce qui peut pousser les militants de Dernière Rénovation « à penser » que leurs revendications « sont plus légitimes que d’autres ? ». Son collègue du RN Michael Taverne parle lui de la France comme un des pays « les plus verts du monde ».

Enfin, tel un pied de nez à ses interlocuteurs, le député Renaissance Mounir Belhamiti, interroge les militants sur d’éventuelles actions « menées ailleurs qu’en France, dans des pays qui sont les principaux émetteurs de gaz à effet de serre ? ».

La réponse des représentants de Dernière Rénovation ne se fait pas attendre. Bertrand Caltagirone rappelle qu’en France les émissions de CO2 atteignent 10 tonnes par habitant. Pour respecter les accords de Paris et « faire notre part pour avoir une chance de rester dans un monde viable », il faudrait réduire nos consommations à 2 tonnes de CO2 émises.

« Vous faites une comparaison par le négatif. Si on se compare au pire, on se sent toujours bien » conclut le militant.

Sans action forte et prise de conscience du gouvernement, le mouvement va « s’amplifier » indique Pierre Taieb. La question du dérèglement climatique est « tellement violente que les intimidations ne peuvent plus attaquer notre détermination » s’émeut le militant. Même si les mouvements écologistes peuvent être dissous, on ne s’arrêtera pas. […] C’est le plus grand défi de l’humanité qui nous demande d’être à la hauteur, on n’a pas d’autre choix. »

Comme un appel au gouvernement qui criminalise les écologistes et aux membres de la commission d’enquête qui s’interrogent sur les violences des organisations pointées du doigt, Pierre Taieb rappelle que si la résistance civile « n’est pas entendue, inévitablement ce sont des générations entières qui seront encore plus acculées, encore plus désespérées, et ça vous le savez mieux que nous, c’est extrêmement dangereux. »

« Le réchauffement climatique ne s’arrêtera pas comme par magie, et par conséquent la lutte ne s’arrêtera pas non plus. La répression n’y changera rien, mais vous êtes les personnes au pouvoir aujourd’hui. Cela veut dire que vous avez le pouvoir de décider quelle forme va prendre cette lutte. Cela veut dire que sur les questions de violence comme sur le reste, la balle est dans votre camp » enfonce Pierre Taieb devant les députés de la commission d’enquête.

Florian Grenon

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