Vous cherchez un média alternatif ? Un média engagé sur l'écologie et l'environnement ? La Relève et la Peste est un média indépendant, sans actionnaire et sans pub.

Historique : BNP Paribas est attaqué en justice pour ses financements aux projets d’énergie fossile

Avec 55 milliards de dollars de financements accordés entre 2016 et 2021 aux pétroliers, écrivent les requérants, le groupe français serait ainsi « le premier financeur européen et le cinquième mondial de développement des énergies fossiles ».

Pour la première fois au monde, une banque commerciale est visée par un contentieux climatique. Trois mois après avoir mis en demeure le groupe BNP Paribas, Les Amis de la Terre France, Notre Affaire à Tous et Oxfam France ont décidé d’assigner la banque en justice pour qu’elle cesse de financer l’industrie des énergies fossiles.

Après l’État français condamné pour « inaction climatique », Casino puis Total Énergies, c’est au tour de BNP Paribas d’entrer dans le viseur des organisations non gouvernementales Notre Affaire à Tous, Oxfam France et les Amis de la Terre, connues pour leurs engagements juridiques en faveur du climat.

Mercredi 26 octobre, le premier groupe bancaire français a été mis formellement en demeure de cesser tout soutien financier à de nouveaux projets pétroliers et gaziers, ont annoncé les ONG.

En trois mois, le groupe a annoncé la réduction de ses encours à l’extraction et à la production de pétrole et de gaz à horizon 2030. Mais ces annonces sans engagements concrets, et la réponse officielle faite aux avocats des trois associations, sont encore largement insuffisantes à leurs yeux et ne répondent en rien aux demandes formulées dans la mise en demeure

Les trois requérantes ont donc saisi le tribunal judiciaire de Paris pour engager « le premier contentieux climatique au monde à mettre une banque commerciale face à ses obligations légales ».

Lire aussi : « Victoire historique : l’État français est condamné pour inaction climatique dans l’Affaire du Siècle »

Les requérants invoquent la « loi sur le devoir de vigilance des sociétés mères ». Adopté en 2017, ce texte unique au monde impose aux plus grandes entreprises françaises d’identifier et de prévenir toutes les atteintes à la sécurité, aux droits de l’homme ou à l’environnement qui pourraient résulter de leurs activités, de celles de leurs filiales ou de leurs financements.

Notre Affaire à Tous, Oxfam et Les Amis de la Terre accusent le groupe BNP Paribas de contrevenir à son devoir de vigilance en finançant des entreprises extractivistes par le biais de participations à leur capital, de prêts, ou d’investissements dans des projets proposés sur les marchés financiers.

Crédit : Laurent Grassin
Lire aussi : « Quatre ans après l’adoption de la loi sur le devoir de vigilance, 27 multinationales françaises ne s’y conforment toujours pas »

Selon le rapport « Banking on Climate Chaos », publié cette année par plusieurs ONG, et qui fait autorité, BNP Paribas figurerait sur tous les podiums des atteintes au climat.

Avec 55 milliards de dollars de financements accordés entre 2016 et 2021 aux pétroliers, le groupe français serait ainsi « le premier financeur européen et le cinquième mondial de développement des énergies fossiles ».

Investissant dans la destruction des écosystèmes sensibles, BNP Paribas se hisserait aussi à la place de « premier financeur du monde de l’exploitation pétro-gazière en Arctique et en mer », ainsi qu’à celle de « premier financeur mondial de huit géants européens et américains du pétrole et du gaz » : Total, Chevron, ExxonMobil, Shell, BP, ENI, Repsol, Equinor.

À eux seuls, ces huit majors seraient responsables de « plus de 200 nouveaux projets d’énergies fossiles » qui pourraient entraîner « l’émission de 8,6 gigatonnes de CO2 supplémentaires » dans les décennies à venir, soit l’équivalent de 77 centrales à charbon sur toute leur durée de vie. En d’autres termes, des bombes climatiques.

Lire aussi : « 425 bombes climatiques » menacent l’espoir de garder un futur vivable pour l’humanité

De tels investissements rendent le bilan carbone de BNP Paribas dramatique : en 2020, l’empreinte de la banque sur le climat était évaluée, par Oxfam, à 749 millions de tonnes équivalent CO2, soit un montant plus important que les émissions territoriales de la France.

Un impact écocidaire qui n’a pas échappé à la vigilance des scientifiques qui étudient les impacts du changement climatique : 600 d’entre eux ont écrit une lettre ouverte au groupe bancaire pour l’exhorter à cesser de financer les projets gaziers et pétroliers.

Les autres banques ne sont pas en reste : la Société générale et le Crédit agricole figurent également parmi les vingt plus gros financeurs des énergies fossiles dans le monde. Mais les ONG requérantes estiment que BNP Paribas, en tant que chef de file, constitue le premier groupe à attaquer pour faire changer les autres.

« Le secteur financier a une responsabilité énorme dans notre capacité collective à respecter ou non l’Accord de Paris. Ce premier contentieux climatique contre une banque commerciale est sans aucun doute le premier d’une longue série – partout dans le monde » précise Justine Ripoll, responsable de campagnes pour Notre Affaire à Tous

Lire aussi : « Le Parlement européen veut forcer les entreprises à respecter les droits de l’homme et l’environnement »

Depuis les accords de Paris, le secteur bancaire mondial a accordé pas de moins de 4 584 milliards de dollars au pétrole, au charbon et au gaz. Ces investissements délétères font de lui un responsable direct de la catastrophe climatique actuelle, mais également un levier crucial dans la lutte contre le réchauffement.

« Chaque nouveau projet fossile financé par BNP Paribas, commente Alexandre Poidatz, chargé de plaidoyer à Oxfam, c’est davantage de sécheresses, d’inondations, de feux de forêt, mais aussi de hausse de prix de l’énergie, y compris pour les citoyens en France. Ce qui s’ouvre c’est le procès d’un monde qui change, afin que la finance d’aujourd’hui façonne le monde durable de demain. »

Les associations appellent à rejoindre les plus de 50 000 personnes qui ont déjà signé la pétition internationale de soutien à l’Affaire BNP pour faire entendre leurs voix dans ce procès inédit et demander la fin des soutiens financiers aux nouveaux projets d’énergies fossiles.

Il incombe désormais au Tribunal Judiciaire de Paris de fixer un calendrier pour les prochaines étapes de la procédure.

Augustin Langlade

Faire un don
"Le plus souvent, les gens renoncent à leur pouvoir car ils pensent qu'il n'en ont pas"

Votre soutien compte plus que tout

Découvrez Océans, un livre puissant qui va vous émerveiller

Plongez en immersion avec les plus grands scientifiques pour tout comprendre sur l’état de nos océans. Des études encore jamais publiées vous feront prendre conscience de l’incroyable beauté de nos océans. Tout cela pour vous émerveiller et vous donner une dose d’inspiration positive.

Après une année de travail, nous avons réalisé l’un des plus beaux ouvrage tant sur le fond que sur la forme. 

Articles sur le même thème

Revenir au thème

Pour vous informer librement, faites partie de nos 80 000 abonnés.
Deux emails par semaine.

Conçu pour vous éveiller et vous donner les clés pour agir au quotidien.

Les informations recueillies sont confidentielles et conservées en toute sécurité. Désabonnez-vous rapidement.

^