Les vagues de chaleur marines ont entraîné un épisode mondial de blanchissement de plus de deux tiers des récifs coralliens. Selon l’agence américaine NOAA, il s’agit du plus important événement de ce type jamais enregistré, et le phénomène continue d’empirer.
Depuis février 2023, ce sont 77 % des récifs coralliens de la planète — de l’océan Atlantique à l’océan Pacifique en passant par l’océan Indien — qui ont été soumis à un stress thermique causant leur blanchissement. En cause : le changement climatique causé par les activités humaines, qui alimente des températures océaniques record et alarmantes dans le monde entier. En 2023, 22 % des océans ont subi une vague de chaleur sévère ou extrême.
« Cet événement continue de s’étendre dans l’espace et nous avons déjà battu le record précédent de plus de 11 % en moitié moins de temps », a déclaré à Reuters Derek Manzello, coordinateur de NOAA Coral Reef Watch. « Cela pourrait avoir de graves conséquences sur la réponse finale de ces récifs à ces épisodes de blanchissement. »
Cet événement de blanchissement mondial est le quatrième du genre depuis 1998. Le record précédent, datant de 2014 à 2017, avait touché un peu moins de 66 % de la superficie des récifs coralliens de la planète.
Déclenché par le stress thermique dans des océans trop chauds, le blanchissement des coraux se produit lorsque les coraux expulsent les algues colorées vivant dans leurs tissus. Sans ces algues essentielles, les coraux pâlissent et deviennent vulnérables à la famine et aux maladies. Un corail blanchi n’est pas forcément mort, mais les températures de l’océan doivent baisser pour qu’il y ait un espoir de guérison.
Bien que ce blanchissement massif soit déjà le plus répandu, affectant les récifs de 74 pays et territoires, la NOAA n’a pas encore qualifié ce phénomène de « pire » jamais enregistré. Dans les mois et les années à venir, les scientifiques procéderont à des évaluations sous-marines des coraux morts pour évaluer la gravité des dégâts.
« Il semble probable que les conséquences de ce phénomène battent des records », a déclaré Manzello. « Nous n’avons jamais connu un épisode de blanchissement des coraux d’une telle ampleur auparavant. »
Une session d’urgence sur les récifs coralliens aura lieu durant le sommet de la Convention des Nations Unies sur la diversité biologique (COP16) en Colombie à la fin du mois. L’objectif : trouver des mesures de protection appropriées à une échelle internationale.
Les scientifiques avaient mesuré que les récifs coralliens franchiraient un point de non-retour à 1,5 degré Celsius de réchauffement climatique, ce qui entraînerait la disparition de 90 % des récifs. Ce nouveau record de blanchissement s’ajoute aux preuves de plus en plus nombreuses selon lesquelles les récifs auraient déjà franchi un point de non-retour à 1,3°C de réchauffement.
Cela aurait des conséquences désastreuses sur la santé des océans, la pêche de subsistance et le tourisme. Chaque année, les récifs coralliens fournissent environ 2,7 milliards de dollars de biens et de services, selon une estimation de 2020 du Global Coral Reef Monitoring Network.
Le blanchissement en cours a été aggravé par El Niño, un phénomène climatique naturel qui peut réchauffer temporairement certains océans, et qui a pris fin en mai. Avec l’arrivée de La Niña dans les mois à venir, les scientifiques espèrent que le refroidissement qu’elle va entraîner donnent l’opportunité aux coraux de se rétablir.
Pourtant, la communauté scientifique redoute que même avec La Niña, cette guérison des coraux ne se produise pas, 2024 étant en passe de devenir l’année la plus chaude jamais enregistrée au monde. Le réchauffement des océans a ainsi presque doublé depuis 2005, selon l’observatoire européen Copernicus.
Si les températures actuelles des océans deviennent la nouvelle norme, le monde pourrait entrer dans une période « où nous sommes plus ou moins dans un état de blanchissement global chronique », a déclaré Manzello.
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