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Une proposition de loi veut révolutionner la pêche française

Le député Modem imagine une « nouvelle redistribution, avec peut-être un peu plus de volumes aux caseyeurs, aux ligneurs, aux fileyeurs, un peu moins aux chalutiers. Pour que les choses, avec le temps, évoluent ».

Déposée par le député MoDem du Morbihan Jimmy Pahun, la proposition de loi intitulée « pour une pêche française prospère et durable » promet de mieux représenter les petits bateaux de pêche, d’intégrer les scientifiques au sein des comités pour préserver les écosystèmes et revitaliser les zones de prolifération des poissons.

La pêche française en danger

Le constat est simple, « l’organisation et le fonctionnement de la pêche française ne sont plus adaptés aux défis de notre époque, à savoir le renouvellement des générations de marins et la transition écologique. Deux impératifs pour préserver notre souveraineté alimentaire et favoriser la création de richesses et d’emplois locaux » peut-on lire dans l’exposé des motifs de la proposition de loi.

Le nombre d’emplois liés au secteur a reculé de 15% par rapport à 2011. Seulement 9 292 pêcheurs seraient aujourd’hui en activité en France métropolitaine selon le Ministère de la Transition écologique. Le nombre de navires a diminué de 24% par rapport à 2000.

Des chiffres qui coïncident avec le recul des volumes pêchés, inférieurs de 23% par rapport à ceux des années 90. Selon Philippe Garcia, président de Défense des Milieux Aquatiques « la taille des poissons baisse. On a un effondrement des gros prédateurs. L’âge de maturité diminue ».

Environ 70% des poissons et fruits de mer consommés en France sont issus de l’importation, pour une balance commerciale déficitaire de plus de 5 milliards d’euros.

« Nouvelle forme de gouvernance » 

La préservation des zones sources, secteurs au sein desquels se reproduisent les poissons, est une question primordiale. 

Dans cette logique, la proposition de loi entend expérimenter « une nouvelle forme de gouvernance de la pêche afin d’organiser, à l’échelle d’un territoire, une gestion intégrée et concertée de la pêche », ouverte et transparente « entre les pêcheurs, les associations environnementales et les scientifiques »

Un système qui a déjà porté ses fruits dans le parc marin de la Côte Bleue (Bouches-du-Rhône) pour sauvegarder les 28 kilomètres de côtes entre l’Anse des Larons et Corbières. Deux réserves marines protégées (Carry-le-Rouet et Cap-Couronne) y ont été créées pour favoriser le renouvellement des populations de poissons.

Les pêcheurs relâchent les plus petits individus, ce qui a permis d’augmenter le nombre de poissons sédentaires. Sur la réserve du Cap-Couronne, « les résultats obtenus indiquent que la biomasse (quantité de poissons pêchés) a été multipliée par un facteur 7 entre 1995 et 2019. Le poids moyen des poissons pêchés a été multiplié par 2,9, passant de 111 g en 1995 à 321 g en 2022 et la taille moyenne des poissons a augmenté d’un facteur 1,5 de 17,3 cm à 25,2 cm » selon le rapport d’activité 2022 du parc marin de la Côte Bleue.

Réforme de l’attribution des quotas de pêche

Cette préservation des écosystèmes doit être accompagnée, selon Jimmy Pahun, d’une réforme des critères d’attributions des quotas pour favoriser les« opérateurs qui pêchent de la manière la moins dommageable pour l’environnement et apportent le plus d’avantages à la société ».

Le député Modem imagine une « nouvelle redistribution, avec peut-être un peu plus de volumes aux caseyeurs, aux ligneurs, aux fileyeurs, un peu moins aux chalutiers. Pour que les choses, avec le temps, évoluent ».

D’après l’ONG Bloom, au 5 février 2025, les chaluts ont détruit 7161 km² d’aires marines protégées en France métropolitaine depuis le début de l’année. Selon les données de l’organisation, l’abrasion des fonds marins est responsable à 90% de ces dégâts, principalement causés par les grands chalutiers.

Toujours selon l’ONG, ces navires sont également responsables de 84% des prises provenant de stocks surexploités. L’augmentation des quotas attribués aux petits navires, qui représentent 80 % de la flotte française et le plus gros des emplois liés au secteur, doit permettre le « renouvellement des générations et emplois locaux ». « Plus le bateau est grand, moins il crée d’emploi », explique Harold Levrel, professeur d’économie écologique à AgroParisTech, pour La Relève et La Peste.

Pragmatique, Jimmy Pahun n’entend pas « opposer chalutiers et petits navires », les premiers apportant « les plus gros volumes » à quais. Le député souhaite « expérimenter pour une transition en douceur ». 

Une meilleure représentativité 

Ce sont les Comités de pêche qui attribuent les autorisations et les quotas pour chaque bateau. Pourtant, les élections pour leur présidence ne totalisent, au maximum, que 20% de votants sur l’entièreté des inscrits. En mai 2024, l’ancienne eurodéputée Caroline Roose nous disait que, lors des élections, les « petits navires sont en mer », et ne votent donc pas.

Comme évoqué en amont, les bateaux de moins de 12 mètres représentent 80 % des navires, les bateaux entre 12 et 24 mètres 15%, et ceux de plus de 24 mètres 5%. Selon le député Jimmy Pahun, « il faut que tous les métiers de la pêche puissent être représentés » au sein des comités locaux et nationaux. Une vision plus démocratique qui pourrait attirer les jeunes et « renouveler la filière ». 

L’objectif du député du Morbihan est d’organiser la réforme du secteur avant les prochaines élections inter-professionnelles qui auront lieu dans deux ans. La proposition de loi n’est pas encore à l’ordre du jour. « On a du temps » nous dit-il, « on doit convaincre le gouvernement ». 

L’ancien skipper et journaliste sportif a récemment rencontré le directeur du cabinet d’Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique. La proposition de loi – qui rassemble des députés des groupes Renaissance, Écologistes, Républicains, du Parti socialiste et de la France Insoumise – pourrait se heurter à de nombreuses oppositions mais son aspect transpartisan lui donne un bel espoir d’adoption.

Florian Grenon

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