Capturée à l’âge de 4 ans en 1970 au large de Seattle, Tokitae a vécu sa captivité dans le bassin pour orques le plus petit au monde : 24 mètres de long sur 10 mètres de large, soit seulement quatre fois sa taille. Alors qu’elle devait être réintroduite dans l’Océan, elle est morte ce 19 août à la suite de graves problèmes de santé.
Dans les années 1970, une jeune orque vivant dans les eaux des îles San Juan, dans la région du Nord-Ouest Pacifique, fut chassée puis enlevée aux côtés de 49 autres orques, toutes destinées à être envoyées dans des aquariums aux Etats-Unis. Au moins une autre douzaine d’orques sont décédées pendant la capture.
Rebaptisée Lolita par le Miami Seaquarium, elle fut exploitée toute sa vie comme bête de spectacle. Les conditions sordides dans lesquelles elle a été séquestrée ont eu raison de l’orque, elle a fini par mourir de complications maladies ce 19 août 2023 à l’âge de 57 ans.
Selon la communauté scientifique et spécialiste sur le sujet, les orques femelles peuvent vivre entre 50 et 90 ans à l’état sauvage. La mère de Lolita est d’ailleurs toujours en vie, et en liberté, et âgée d’environ 90 ans.
Seulement quelques mois auparavant, l’ONG Friends of Toki et le peuple amérindien Lummi avaient obtenu la promesse de sa libération face aux maux dont Tokitae souffrait. Si sa relâche posait de nombreux défis, l’expérience n’aura pas pu être tentée avant son trépas.
Pour la nation Lummi, le peuple autochtone de l’État de Washington, Lolita s’appelait Sk’aliCh’elh-tenaut – Sk’ali en abrégé – ou Tokitae et était considérée comme ‘leur parente sous l’eau’. Tokitae, une formule de salutation en langue salish, signifie “belle journée, jolies couleurs”. La nation Lummi lui avait donné le nom de Sk’aliCh’elh-tenaut en reconnaissance de ses liens uniques avec le nord-ouest du Pacifique.
« Aujourd’hui, Lolita n’est plus. C’est malheureusement, comme la plupart des dauphins captifs, dans la mort qu’elle aura trouvé la libération. Afin qu’elle n’ait pas souffert et ne soit pas morte en vain, (…) son histoire doit servir d’exemple et ne jamais être oubliée. Nous avons un devoir de mémoire vis-à-vis d’elle. Et nous avons le devoir de faire mieux pour tous les autres » a réagi la directrice de Sea Shepherd France, Lamya Essemlali, à l’annonce de son décès
Le corps de Tokitae devrait être ramené “chez elle”, dans les eaux au large de l’Etat de Washington. La famille de Lolita est aujourd’hui menacée d’extinction, en raison des captures des années 70 mais surtout de la raréfaction de leur nourriture, à cause de barrages et de la pollution de leur milieu. Il ne reste plus que 73 orques résidentes du Sud à l’état sauvage.
Lolita était devenu un symbole de la lutte contre la captivité des cétacés. Aujourd’hui, plus de 3000 individus sont encore séquestrés dans des delphinariums dans le monde selon l’organisation internationale World Animal Protection (WAP), dont 4 orques et 23 dauphins en France seulement.
Or, la captivité des cétacés nuit à leur espérance de vie. L’association C’est Assez ! rapporte qu’entre janvier 2015 et octobre 2017, une dizaine de cétacés sont morts en France, dont trois bébés. Le 18 novembre 2021, dans une décision historique, le gouvernement français avait décidé d’interdire l’exploitation d’animaux sauvages dans les cirques itinérants et les delphinariums.
Reste maintenant à déterminer où et comment les cétacés vont être relâchés. Plusieurs associations luttent en justice pour empêcher le transfert des orques Inouk, Moana, Wikie et Keijo du Marineland d’Antibes dans un parc aquatique au Japon où elles seront exploitées jusqu’à leur dernier souffle. A la place, les associations exigent que les orques puissent finir leurs jours tranquilles dans un sanctuaire marin.