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Les orques du sud au bord de l’extinction à cause d’un barrage

A San Juan, dans l’Etat de Washington, les biologistes assistent depuis trois ans à une accélération sans précédent du taux de mortalité des orques et de leur difficulté à avoir des petits.

De 86 individus à la fin de 2010, il n’en reste plus que 73 aujourd’hui. Les Orques résidentes du Sud risquent de disparaître à tout jamais à cause de la pollution chimique et sonore, mais surtout du manque de saumons, leur alimentation de base. Dans l’Etat de Washington, des biologistes se battent pour les sauver. Une mobilisation internationale soutient maintenant leur combat.

Les orques résidentes du Sud au bord de l’extinction

Tout a commencé il y a 50 ans, quand Seaworld a capturé une centaine d’orques pour les mettre dans des delphinariums. Seulement l’une d’entre elles a réussi à survivre à cette grande rafle effectuée pour amuser les humains. Mais les delphinariums ne sont plus la seule menace qui pèse sur les Orques résidentes du Sud. A San Juan, dans l’Etat de Washington, les biologistes assistent depuis trois ans à une accélération sans précédent du taux de mortalité des orques et de leur difficulté à avoir des petits.

Ce taux de mortalité critique est dû à plusieurs facteurs : la malnutrition causée par la disparition des saumons, la présence de toxines dans les océans qui contaminent toute la chaîne alimentaire et les nuisances sonores causées par les cargos. Les toxines proviennent des déchets déversés dans les océans et des fermes de saumon d’élevage en Colombie Brittanique.

Les poissons y développent des virus qu’ils transmettent aux saumons sauvages que les orques mangent. Les toxines vont alors se loger dans la graisse des orques. 

La combinaison de ces facteurs produit un cercle vicieux. Ne trouvant pas de saumons pour se nourrir, les orques doivent parcourir d’immenses distances. Epuisées, elles puisent des réserves dans leur graisse ce qui transfère les toxines dans leur sang. Puis, quand elles enfantent, le premier lait qu’elles vont donner au bébé déverse toutes les toxines qui se trouvaient dans leur sang, les toxines sont alors transmises au bébé qui meurt empoisonné au bout de quelques heures.

La nuisance sonore, majoritairement causée par les bateaux comme les cargos, est également responsable du décès des orques. Le premier ministre canadien Justin Trudeau veut autoriser la construction du Trans Mountain Pipeline qui impliquerait d’avoir sept fois plus de cargos dans l’eau, soit autant de nuisances sonores supplémentaires pour les orques.

« Pour les orques, c’est horrible car cela revient à les enfermer dans une pièce avec de la musique poussée au volume maximum. De plus, avec un son qui se propage 4 fois plus vite dans l’eau, le bruit des cargos gêne leur système d’écholocation qui leur permet de chasser et donc de se nourrir. Elles doivent alors utiliser encore plus d’énergie pour pouvoir se nourrir. » précise Morgane Trussardi, la vidéaste française à l’origine du projet WeAreTheOrca pour La Relève et La Peste

Morgane a rencontré les biologistes de San Juan lors d’un de ses voyages. Captivée depuis toujours par les orques, elle a été effarée de se rendre compte de l’état critique de la population des orques résidentes du Sud. Elle a alors décidé d’aider les scientifiques à préserver ces animaux majestueux en créant avec CoExtinction, une asso locale, le mouvement « WeAreTheOrca » pour faire connaître leur histoire et les mesures à mettre en œuvre. Durant l’été 2018, un mois avant le lancement de WeAreTheOrca, l’extinction des orques résidentes du Sud s’est répandue dans le monde entier lorsqu’une mère orque a porté son bébé mort-né à la surface de l’eau, en signe de deuil, pendant 17 jours.

« Péter les barrages pour les sauver »

Pour éviter que les orques résidentes du Sud ne disparaissent à tout jamais, il faut agir sur trois niveaux : arrêter la surpêche, protéger leurs habitats, et restaurer les populations de saumons sauvages pour que les orques puissent se nourrir. Les biologistes qui étudient les orques depuis des dizaines d’années sont formels : à court terme, la solution la plus efficace pour les protéger serait de détruire quatre barrages présents sur la « Snake River ».

Ces barrages empêchent la remontée des saumons des océans vers la rivière pour retourner à leurs lieux de pontes, et l’activité des barrages, combinée à la crise climatique, réchauffe la température de l’eau ce qui a des conséquences catastrophiques sur la survie des poissons.

Selon CoExtinction, 8 millions de saumons meurent chaque année à cause de ces barrages. Cela fait depuis 2002 que les autorités savent que les barrages doivent être détruits pour restaurer les populations de saumons. Quand Morgane Trussardi et CoExtinction se sont alliés pour lancer WeAreTheOrca, l’une de leurs premières actions a été de lancer une cagnotte pour aider les scientifiques à financer leurs recherches (25 000€ ont été récoltés en 24h), et porter la pétition des biologistes à la connaissance du grand public pour faire pression sur les autorités locales.

« Il y a besoin d’une mobilisation internationale car il y a encore une trop faible mobilisation au niveau local, les citoyens américains de l’Etat de Washington n’ont pas forcément conscience de l’ampleur des dégâts. Certains locaux sont tellement déconnectés de leur environnement qu’ils ignorent qu’il y a des orques en danger à côté de chez eux. C’est pourquoi j’ai décidé de m’engager pour essayer de faire en sorte que de plus en plus de médias en parlent. Pour l’instant, il n’y a que le Seattle Times qui relaie les informations sur le sujet. Il faut que tout le monde se mobilise pour faire plier le gouverneur. » explique Morgane Trussardi, co-fondratrice de We are The Orca, à La Relève et La Peste

Grâce à la mobilisation internationale, la pétition est passée de 150 000 à plus de 786 000 signatures. Les biologistes s’en servent à chacune de leurs interventions auprès du gouverneur Jay Inslee qui a proposé un budget pour les sauver. Les choses bougent, mais encore trop doucement au goût des protecteurs des orques. La NOAA, l’institut censé protéger les océans, reste trop sensible aux arguments des lobbies et freine pour autoriser la destruction des barrages. Ce mercredi, le gouvernement fédéral a annoncé vouloir mettre en place des « réserves pour protéger les orques »

« C’est un effet d’annonce inutile. Evidemment, ce serait super qu’il y ait moins de bateaux pour les laisser tranquilles, mais sans des saumons pour les nourrir cette annonce n’aura aucun effet positif sur les orques résidentes du Sud. Péter les barrages est la solution la plus efficace à court terme pour laisser le temps à la population de saumons de grandir à nouveau. » réagit Morgane Trussardi pour La Relève et La Peste

Et le temps presse pour sauver les Orques résidentes du Sud. Cet été 2019 a été  particulier : trois orques sont décédées, mortes de faim. Et pour la première fois en trois ans, deux bébés sont nés et ont survécu. Alors qu’il reste actuellement 73 individus, c’est la rapidité des humains à agir, et réparer leurs torts, qui permettra de faire pencher la balance en leur faveur.

Laurie Debove

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