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L’extinction des animaux entraîne celle des végétaux

« Les déclins chez les animaux peuvent perturber les réseaux écologiques d'une façon qui menace la résilience d'écosystèmes entiers », appuie Evan Fricke.

Dans la chaîne alimentaire, il est bien connu que les animaux dépendent des végétaux pour survivre. L’inverse est moins intuitif. Et pourtant, une étude publiée dans la revue Science vient rappeler ce fait étonnant avec une découverte inquiétante : les plantes ont perdu 60% de leur capacité à s’adapter au changement climatique à cause de l’extinction des animaux. Sans oiseaux, poissons et mammifères, les végétaux ne peuvent plus disperser leurs graines vers des contrées plus accueillantes.

Le lien entre végétaux et animaux

Que l’on soit animal ou végétal, l’une des façons les plus simples de s’adapter au changement climatique est de migrer vers des terres ayant un climat plus clément. Les végétaux, enracinés par nature, ont donc développé des méthodes ingénieuses pour trouver des moyens de locomotion.

Si certaines utilisent le vent, la moitié des plantes se servent des animaux pour disséminer leurs graines, que ce soit en embarquant dans le plumage des oiseaux ou le tube digestif de certains mammifères.

« Lorsque nous perdons des oiseaux ou des mammifères, nous ne perdons pas seulement ces espèces. Nous perdons aussi leur fonction écologique importante, qui est de disperser les graines », a expliqué à l’AFP Evan Fricke, de l’université Rice.  

Première étude à quantifier le problème au niveau mondial, la méta-analyse publiée le 13 janvier dans Science estime que les plantes ont perdu 60% de leur capacité à s’adapter au changement climatique à cause de l’extinction des animaux.

Pour mener à bien leurs travaux, les chercheurs danois ont compilé les données accumulées par des milliers de précédentes études sur le comportement d’animaux, afin d’établir une carte retraçant la façon les oiseaux et mammifères dispersent les graines à travers le monde.

Ce phénomène est connu sous le nom de zoochorie. Ce transport peut être externe, lorsque les plantes s’accrochent aux toisons des animaux comme c’est le cas chez la bardane qui a de minuscules crochets prévus à cet effet, ou les lampourdes. D’autres végétaux ont préféré choisir la séduction et entourer leurs graines des mets les plus appétissants pour qu’elles soient ingérées par des animaux. Résistantes aux sucs gastriques, les graines passent alors par le tube digestif de leur hôte avant d’être disséminées dans ses déjections.

Une stratégie choisie par les fruitiers comme les groseilliers, cerisiers, fraisiers ou mûriers. Le gui est particulièrement dépendant de cette méthode : il ne peut germer que sur les branches d’un arbre et dispose pour cela de graines équipées de filaments visqueux.

Chez certains végétaux, ce passage par le système digestif est même devenu vital au cours de l’évolution symbiotique des espèces. Certaines graines ne peuvent ainsi germer qu’après avoir été ramollies par le suc digestif des animaux lors du processus de ligno-subérification.

D’autres animaux jouent le rôle de « semeur étourdi » : ils permettent la dissémination des plantes en perdant par mégarde leurs graines, comme l’exemple bien connu de l’écureuil.

Graines de Prosopis germant dans des fèces de chameaux. – Crédit : Divya Mudappa

Le rôle de l’humain

La carte établie par les chercheurs a révélé une disparité surprenante. Ainsi, alors que les régions tempérées d’Amérique du Nord et du Sud, d’Europe et d’Australie n’ont perdu qu’un faible pourcentage d’espèces de mammifères et d’oiseaux. En cause : la disparition de la mégafaune dans ces régions, espèces disséminatrices par excellence.

Ainsi, l’éléphant n’est pas seulement une espèce charismatique, il joue surtout un rôle crucial au sein des écosystèmes. Loxodonta cyclotis, plus communément connu comme étant l’éléphant de forêt d’Afrique, participe ainsi à la dissémination de graines, notamment de grands fruits comme les mangues sauvages. Son cousin de la savane, lui, peut transporter des graines à plus de 65km de l’endroit où il les a mangé.

Dans les excréments de bonobos, des petits chimpanzés frugivores, on a retrouvé les graines de plus de 90 espèces de plantes. Ces graines sont ensuite plantées dans le sol par les scarabées bousiers, ce qui leur permet de grandir à l’abri des prédateurs.

Or, les bonobos, comme les éléphants de forêt d’Afrique, sont en danger, ce qui menace le maintien de la biodiversité des forêts tropicales.

Lire aussi : L’éléphant de forêt d’Afrique est désormais en danger critique d’extinction

De la même façon, l’extinction des mammifères et oiseaux fragilise gravement les écosystèmes tropicaux, notamment à Madagascar et en Asie du Sud-Est. La disparition de certaines espèces animales, comme le Calao à casque rond ou le tapir du Brésil, pourrait diminuer d’encore 15% la faculté des végétaux à s’adapter au changement climatique selon les chercheurs à l’origine de l’étude.

« Les déclins chez les animaux peuvent perturber les réseaux écologiques d’une façon qui menace la résilience d’écosystèmes entiers », appuie Evan Fricke.

Evidemment, la disparition des animaux n’est pas le seul facteur à influencer la capacité de migration des espèces végétales. La fragmentation et la disparition de leurs habitats, causées par les activités humaines, ainsi que leur cycle de reproduction, sont également à prendre en compte.

L’impact de l’humain sur les écosystèmes est d’ailleurs le point commun à toutes ces menaces : le changement climatique comme la sixième extinction de masse sont tous les deux causés par les activités humaines qui menacent d’extinction globale un nombre d’espèces sans précédent, selon le dernier rapport de l’IPBES.  

Sur une estimation de huit millions, un million d’espèces animales et végétales sont désormais menacées d’anéantissement, sans compter les insectes.

Cette nouvelle étude nous rappelle à quel point la bonne santé des écosystèmes dépend de celle des espèces qui l’habitent, qu’elles soient animales ou végétales. Les efforts de protection des animaux deviennent plus que jamais nécessaires pour protéger l’ensemble de ces espèces.

Lire aussi : Un tiers des espèces d’arbres sont menacées d’extinction dans le monde

Laurie Debove

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