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Les Grands Tétras réintroduits dans les Vosges meurent les uns après les autres

« Ce tapis de neige permet au tétras, en hiver, de repérer de loin ses prédateurs. Or sans neige, ou presque plus, les prédateurs peuvent le surprendre beaucoup plus facilement »

En avril dernier, un arrêté préfectoral avait permis la réintroduction de neuf Grand Tétras venus de Norvège dans le massif des Vosges, au grand damn de nombreuses associations environnementales, dénonçant les conditions inappropriées pour cet oiseau en voie d’extinction sur le territoire. Aujourd’hui, près d’un an après cette décision vivement contestée, le septième Grand Tétras vient de s’éteindre sur les neuf qui avaient été amenés.

Des conditions climatiques inadaptées

« C’est malheureusement la tendance que l’on avait redouté. Et nous ne sommes pas les seuls. 90% des scientifiques disaient la même chose. Les conditions ne sont absolument pas réunies pour accueillir ces oiseaux ici », déplore Dominique Humbert Beretti, président de SOS Massif des Vosges, pour La Relève et La Peste.

La mort successive de sept oiseaux sur les neuf réintroduits l’an passé vient en effet confirmer les inquiétudes évoqués par les défenseurs de l’environnement il y a quelques mois, quand la Préfecture des Vosges avait autorisé le lâcher des Grands Tétras, projet initié par la DREAL et piloté par le Parc naturel des Ballons des Vosges. A l’époque, déjà, de nombreuses réticences avaient été avancées, portant sur les conditions climatiques et touristiques inadaptées à la survie de l’animal.

« Lorsqu’un animal ou une espèce disparaît d’un territoire, avant de la réintroduire, il faut se demander pourquoi elle a disparu, quelles en sont les raisons. Ces raisons, dans ce cas précis, c’est le réchauffement climatique, mais aussi la fréquentation touristique très importante. Il y a eu des efforts réalisés par l’ONF, en matière sylvicole notamment, mais d’une façon beaucoup trop morcelée, pas suffisante pour assurer la pérennisation d’une espèce comme le Grand Tétra », explique Dominique Humbert Beretti.

Ce dernier le rappelle, 50 000 hectares sont nécessaires pour la bonne survie de l’espèce. Aujourd’hui, seuls 7 à 8 000 hectares correspondent aux critères d’un environnement sain pour l’oiseau.

L’argument des prédateurs

« La seule raison de l’action de la direction du Parc, c’est de pouvoir obtenir le renouvellement de leur agrément en 2027 », ajoute le président.

« Le directeur ne cesse de mettre l’accent sur la prédation pour expliquer la mort de ces Grands Tétras. Mais il oublie une chose. Les prédateurs sont une conséquence du réchauffement climatique. Une hypothèse émise est que l’augmentation des micromammifères augmente également leurs prédateurs, les méso-prédateurs. 

Il s’agit des renards, martres, belettes, tous ces petits animaux qui aujourd’hui, à juste titre, ne sont plus considérés comme des nuisibles, mais qui sont des prédateurs opportunistes vis-à-vis du Grand Tétra », continue le président de SOS Massif des Vosges.

Ce dernier explique également que la diminution du tapis de neige, là aussi due au réchauffement climatique, rebat les cartes de la survie de l’oiseau.

« Ce tapis permet au tétras, en hiver, de repérer de loin ses prédateurs. Or sans neige, ou presque plus, les prédateurs peuvent le surprendre beaucoup plus facilement », avance Dominique Humbert Beretti pour La Relève et La Peste.

Aux côtés de SOS Massif des Vosges, Vosges Nature environnement, Oiseaux Nature, Avenir et Patrimoine 88, Paysage Nature et Patrimoine de la Montagne Vosgienne sont les signataires d’un communiqué dénonçant ainsi les « ressources gaspillées » ainsi qu’un « manque de transparence et de consultation ».

« Le parc compte recommencer la même stupidité dans quelques semaines en relâchant sur un même site, 40 individus ! […] Le projet de réintroduction a été mené avec une parodie de consultation des parties prenantes locales et des experts indépendants. Les décisions ont été prises de manière unilatérale, sans tenir compte des avis divergents très majoritaires et des avis scientifiques argumentés disponibles » dénonce Dominique.

Reste à voir combien de ces oiseaux, arrachés à leur lieu d’origine, survivront cette fois-ci.

Juliette Boffy

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