La chasse est une pratique ancestrale. Apparue il y a environ trois millions d’années, nos ancêtres tuaient pour se nourrir mais aussi se protéger. Bien qu’elle soit violente dans l’acte même de mettre à mort un être vivant, elle était avant tout une activité régie par notre instinct de survie. Dans certaines tribus, des rituels étaient pratiqués en gage de respect pour l’animal abattu. Tuer était fait en conscience. La peau était utilisée pour confectionner des vêtements, les os utilisés pour faire des armes et la chair nourrissait les familles. En devenant sédentaire, l’homme s’est mis à développer l’élevage. Dès le moyen-âge, la chasse est réservée exclusivement à la noblesse et à son droit de propriété sur les terres. Après s’être largement démocratisée après la révolution française, elle devient avant tout une activité récréative qui met à mal la biodiversité. Est-ce que cette forme de non-considération pour les animaux sauvages de la part des chasseurs serait liée à une image anthropocentriste ? Pierre-Rigaux, naturaliste et militant pour la protection des animaux sauvages, répond à nos questions.
La Relève et La Peste : Pouvez-vous nous décrire en quelques mots votre combat et le message que vous portez ?
Pierre Rigaux : En ce qui concerne mon activité, elle se situe entre l’écologie et la protection des animaux. Je trouve que leurs défenseurs sont trop séparés dans leur façon de s’organiser. Je milite pour abolir la chasse en tant qu’activité récréative, que l’on puisse considérer les animaux sauvages comme des individus sentients, tout comme nos animaux de compagnie par exemple. Dans la loi, le Code Pénal réprime l’exercice de sévices violents sur des animaux de compagnie alors que c’est autorisé sur les animaux sauvages.
Mon combat se résumerait à abolir la chasse de loisir ainsi que de rédiger de nouvelles lois nous poussant à adopter une attitude plus respectueuse envers notre environnement et de respect envers les animaux sauvages.
LR&LP : Vous recevez quotidiennement des menaces de la part de chasseurs. Lesquelles et pourquoi ?
P.R : Menaces de mort, atteinte à l’intégrité physique etc… Sur les réseaux sociaux, dans la boîte aux lettres ou tout simplement en direct. Pourquoi ? Parce que je parle de la chasse en public sans être moi-même un chasseur. C’est ce que j’appelle des méthodes mafieuses. Ils ne veulent pas que l’on parle de la chasse, si on n’en est pas un. Ils réalisent surtout qu’il y a un mouvement dans la société où la chasse est de moins en moins appréciée. Ils se sentent un peu menacés et agissent comme ils peuvent. Malheureusement ça joue à leur désavantage.
LR&LP : Quelles sont selon vous les causes des dérives de la chasse ?
P.R : L’animal sauvage n’a par la loi aucune protection en tant qu’individu. Toutes les lois sur les animaux s’intéressent aux espèces. Vous avez des espèces protégées, tout est conçu pour qu’une espèce ne disparaisse pas.
C’est une approche conservationniste et écologique. Ce qui a complètement son intérêt. Je travaille moi-même à la protection des espèces. Mais c’est insuffisant, à partir du moment où on laisse tout faire avec les animaux sauvages, c’est à dire qu’il n’y a pas de limite dans la torture qui leur est infligée. Une partie des gens ayant une tendance psychopathe ou tout du moins qui prend plaisir en violentant des animaux aura juste à prendre un permis de chasse. Ainsi, cette violence est libérée, autorisée voire encouragée.
C’est sans doute une minorité mais en tous les cas rien ne l’en empêche par la loi. Même quand l’espèce est protégée et qu’il y a une dérogation pour pouvoir la tuer, eh bien, la façon de la tuer n’importe pas (sauf quand les méthodes de chasses sont non-sélectives, comme les enjeux autour des chasses traditionnelles, ndlr). Je pense que c’est l’une des premières raisons, un type qui s’amuserait à tabasser un chien irait directement au tribunal alors que le même type qui ferait ça sur un renard, eh bien rien ne se passe.
La deuxième raison aux dérives de la chasse vient du grand manque de formation.
Je m’explique, le permis de chasse s’obtient avec une formation très insuffisante. Elle ne permet pas de devenir compétent en matière de connaissance des espèces animales et d’écologie, ni de devenir compétent en matière de tir. Apprendre à bien viser etc … Ainsi, il y a beaucoup de dommages collatéraux. Ils ne sont ni très bien organisés ni encadrés. Il y a très peu d’agents de l’État qui sont là pour contrôler sur le terrain. Tout cela est propice aux dérives.
Évidemment sur un million de chasseurs, il suffit qu’il y en ait quelques dizaines de milliers qui soient sanguinaires pour que la dérive soit gigantesque et il suffit que sur un million de chasseurs, il y ait quelques centaines de milliers qui ne sachent pas viser pour que cela fasse des millions d’animaux qui vont agoniser dans la nature sans que personne ne le sache jamais étant donné qu’ils ne sont pas décomptés.
LR&LP : Cette rupture entre animaux sauvages et domestiques que vous énoncez est finalement majoritairement de l’ordre de ce qui est acquis en tant que conscience collective. Comme une forme de hiérarchisation animale. Comment changer les mentalités ? Serait-il imaginable et instructif d’inclure dans les programmes scolaires des cours sur la reconnaissance du caractère sensible des animaux sauvages, de leur capacité à ressentir la peur, la douleur etc.
P.R : Oui tout à fait. C’est ce que j’essaye de faire lorsque j’explique qu’un sanglier souffre de la même façon qu’un chien. Éduquer sur le fait que les animaux sauvages ressentent la même chose que les animaux domestiques. Ce que vous énoncez sur les différents traitements des animaux est représenté dans toute l’histoire du droit.
Les lois sur les animaux domestiques concernent les animaux de compagnie et beaucoup moins le bétail, les animaux d’élevage. On protège les animaux domestiques parce que l’on considère que lorsqu’on leur cause du tort, on cause du tort à leurs propriétaires, aux êtres humains qui y sont attachés. C’est comme ça que tout fonctionne dans la protection des animaux.
C’est pour ça que la loi protège les animaux de compagnie et pas les animaux d’élevage et encore moins les animaux sauvages. Pour moi, y pallier serait une question d’éducation ou simplement d’information.
Je crois vraiment que les gens ne réalisent pas que les animaux sauvages souffrent. Parce qu’en plus on se dit lorsqu’ils sont dans la nature ils souffrent déjà quand ils se font tuer par d’autres animaux, ce qui est vrai. Ça reste différent.
Et oui, ce serait intéressant d’intégrer ça aux programmes scolaires sachant que le lobbying de la chasse intervient déjà dans les écoles. Mais on est dans un travail à faire au-delà du clivage chasse / anti-chasse. C’est assez frappant dans les ONG de protection de la nature qui ne sont pas du tout les mêmes personnes que celles des assos de protection des animaux.
Il n’y a pas du tout la même conscience des animaux, de la sentience qui fait que les associations de protection de la nature ont souvent un discours ambigu et changeant sur la chasse. Parfois ils ne sont pas opposés à la chasse car cela ne les dérange pas. De même qu’ils ne sont pas opposés à l’exploitation des animaux. Même au sein milieu écolo, il y a énormément de travail à faire.
LR&LP : Ce matin sur France-Culture, on parlait justement de la chasse et de l’élevage. Le présentateur mettait en avant “l’animal matière”. C’est-à-dire cette rupture qu’ont les gens avec ce qu’ils ont dans leur assiette et la souffrance animale depuis que les abattoirs ont été exportés hors des villes, que la mort est cachée, dissimulée. Ce qui fait que les gens ont du mal à associer l’animal en soi avec ce qu’ils ont dans leur assiette et qu’ainsi les chiffres en termes de consommation de viande n’ont jamais été aussi élevés.
P.R : Les chasseurs et les agriculteurs reprendraient en leur faveur cet argument en disant que ce sont les bobos des villes qui sont choqués car ils n’ont plus aucun contact avec la mort alors qu’eux, ont cette consciente de la mort étant donné qu’ils tuent l’animal. Donc, il ne suffit pas de prendre conscience de la mort pour prendre conscience de la souffrance que l’on inflige. C’est ce qu’il s’est passé ces dernières années, tout le travail des organisations telles que L214 pour montrer tout ce qui se passe dans les abattoirs.
Mais surtout, le grand changement, c’est que maintenant il y a la science qui explique que la souffrance d’un mammifère est la même pour tous ; qu’il soit domestique, de compagnie ou sauvage. Ce qui n’existait pas avant quand les abattoirs étaient encore à la campagne, proches des gens. La mort était présente et on la voyait mais il n’y avait pas les arguments scientifiques sur la preuve de la souffrance animale.
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Donc le fait qu’aujourd’hui des associations comme L214 fassent remonter des images d’abattoirs qui auraient pu être banales il y a un siècle et qui maintenant sont ultra choquantes ; avec en plus l’argument scientifique qui vient contrer le discours des chasseurs, qui d’ailleurs, se retrouvent souvent démunis.
Ils sont démunis car eux-mêmes s’en foutent un peu en général mais ils se rendent bien compte qu’il y a un mouvement de la société qui est complètement rationnel et ils n’ont pas d’arguments en face pour répondre.
Quand ils tirent sur un animal bien souvent ils le blessent. L’animal part à pleine bourre, effrayé. Les chasseurs n’ayant pas d’argument là-dessus mettent en avant des trucs dans la com’ qui n’ont aucun rapport, telle la tradition.
Personnellement, j’essaye de montrer que cette souffrance est inhérente à la chasse de loisir. Inhérente car il est quasiment impossible de tuer net un animal à la chasse.
LR&LP : Quand les chasseurs se défendent en prétendant qu’ils régulent les nuisibles, quels arguments leur retournez-vous ? En quoi sont-ils les destructeurs de la biodiversité ?
P.R : Quand on regarde les chiffres des animaux tués à la chasse, même si on ne dispose hélas pas de chiffres très précis pour l’ensemble des espèces chassées, au moins 90/95 % des animaux tués à la chasse ne causent strictement aucun dégât aux activités ou habitats de l’homme. Il y a un consensus là-dessus. Personne ne dit qu’il faudrait réguler des oiseaux migrateurs.
Que ce soit les scientifiques ou les chasseurs s’ils sont honnêtes, personne ne remet en question la non pertinence de la régulation de la chasse pour 95 % des animaux chassés. Et après, il y a un petit pourcentage d’animaux où il y a plus de discussions.
Si vous demandez à quelqu’un d’autre que moi, il aura peut-être un autre avis sur « faut-il ou non réguler les sangliers, les cerfs, les chevreuils ». Lorsque l’on dit qu’il faut réguler, on dit qu’il faut réguler par la chasse de loisir alors que cela ne va pas du tout de soi. Ce n’est pas parce que l’on dit qu’il y a beaucoup de sangliers dans cette forêt ou de cerfs et que c’est gênant pour la pousse des arbres qu’il faut favoriser la chasse de loisir.
A toutes ces réflexions, la seule solution qui a été apportée à la destruction de la production agricole par les sangliers, c’est la chasse de loisir. On pourrait se demander : Quelle est la nature des dégâts ? Comment les éviter ? Si on en conclut que c’est parce qu’il y a trop d’animaux, ce qui n’est pas forcément le cas, on pourrait penser à des systèmes de cultures mobiles, de cultures temporaires.
Et s’il y a trop d’animaux et que l’on veut les réguler, là c’est encore franchement une question abyssale car c’est nous humains qui nous permettons de dire qu’il y a trop d’animaux sauvages. Alors que si on met les animaux d’élevages et les humains ensemble, les mammifères sauvages ne représentent plus qu’une infime partie de la biomasse des mammifères sur terre. L’immense majorité de cette biomasse de mammifères est constituée par les animaux d’élevage et les humains.
En France, on dit que la population de sangliers est d’environ 2 millions, il y a 20 millions de cochons dans les élevages intensifs. Pourtant ça ne pose de question à personne. Alors que si on réfléchit à l’impact écologique… Donc on dit impact écologique de sanglier d’un côté, par contre on ne parle pas assez de l’impact écologique de l’élevage de cochons.
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Après si on doit dire qu’il y a trop d’animaux sauvages, il y a d’autres méthodes que la régulation. Déjà savoir est-ce qu’il faut les tuer ou non. S’il faut les tuer, cela pourrait être par des professionnels qui mettent en place des techniques pour les tuer. Je ne dis pas que je suis pour mais ça existe donc c’est intéressant à mentionner.
Techniquement, on peut piéger des sangliers, une fois qu’ils sont pris au piège vivants, on les tue. Ça va plus vite et c’est moins dangereux pour les humains et les autres animaux, plutôt que les tuer par des battues. Je ne dis pas que j’y suis favorable mais chaque fois que c’est proposé par des Préfets dans plusieurs endroits en France, les chasseurs ne veulent pas car ils veulent conserver la possibilité de les tuer eux-mêmes.
Et encore-là, on reste sur le fait qu’il faut les tuer, mais on pourrait utiliser d’autres moyens comme la stérilisation. Après, c’est une sorte de méthode ultime car elle nécessite énormément d’études biologiques pour être sûrs de ne pas faire n’importe quoi au sein de l’écosystème et c’est très compliqué parce que l’on ne connaît pas forcément les conséquences.
De plus, les chasseurs mettent souvent l’argument de régulation des animaux alors qu’une grande partie de ces derniers viennent de l’élevage de gibier dédiée majoritairement à la chasse. Quand on les met face à ce constat, ils rétorquent qu’il s’agit de réintroduire des espèces. Encore une fois, c’est un leurre car la majeure partie de ces animaux mourront peu de temps après avoir été relâchés, faute de pouvoir s’adapter à la vie sauvage.
Il faut sortir du raisonnement simpliste : Il y a trop de dégâts, il y a trop de dégâts car il y a trop d’animaux, donc il faut les tuer et s’il faut les tuer, c’est par la chasse de loisir.
LR&LP : La chasse est-elle encore justifiable aujourd’hui ? Pensez-vous que cela corresponde à une pulsion naturelle ou est-ce purement culturel ?
P.R : C’est dur comme question. Parce qu’en fait la chasse a toujours été violente et quand on entend les chasseurs parler, ils ont toujours un discours du beau chasseur d’antan. Les chasseurs qui se veulent progressistes disent que la chasse « c’est devenu n’importe quoi » avec les battues de sangliers, qu’il y a beaucoup d’urbains, et c’est vrai (rires) qui viennent chasser le sanglier au ball-trap.
Par contre, l’image du chasseur d’antan, à la “Marcel Pagnol”, c’était déjà violent, cela n’a rien de nouveau. Je ne savais pas comment c’était il y a 8000 ans mais la chasse à l’épieu à l’époque était d’une violence abominable sauf que c’était indispensable pour survivre. Ensuite, avec l’apparition du fusil au XVIIIème siècle, on pouvait tirer un peu de loin et provoquer des dégâts comme ceux d’aujourd’hui. C’est forcément n’importe quoi. La violence est inhérente à l’activité de chasse.
Pour la deuxième partie, c’est plus abyssal comme réflexion. Il y a 3,4 millions d’années, les hominidés qui étaient là chassaient déjà. Ainsi, même si ce n’est pas un argument, les chasseurs ont raison de dire que l’on chasse depuis toujours. Dans un livre (Condemi & Savetier 2018 « Dernières nouvelles de sapiens » éd Flammarion) sur lequel je me suis appuyé pour rédiger mon ouvrage « Pas de fusil dans la nature », des paléoanthropologues disent qu’à priori la chasse aurait favorisé une certaine morphologie du corps humain tel qu’il est constitué aujourd’hui.
Je ne sais pas si c’est discuté dans le milieu des spécialistes, mais il est dit que l’épaule articulée a été sélectionnée par l’évolution et que c’est lié à la chasse ; au moment où l’on lançait des projectiles pour tuer des animaux. Des paléoanthropologues disent aussi que la chasse en battue a favorisé l’intelligence collective ou de pouvoir communiquer entre nous, se coordonner dans la manière dont on s’échangeait des regards, etc..
Bref, je ne suis pas spécialiste de la discipline, mais des paléoanthropologues disent que la chasse a participé à nous constituer en tant qu’être humain.
De ce fait, là c’est mon hypothèse : puisque pendant des millions d’années on a chassé et que cela a même participé à nous constituer, cela ne me semblerait pas bizarre que l’on ait quelque part en nous au moins le désir de “poursuivre” les animaux sauvages. Parce que l’agriculture date de quelques milliers d’années et la chasse a été présente pendant des millions d’années. Dans le développement de l’espèce humaine, il y a quand même beaucoup de chasse.
Si cette partie existe, il est certain qu’elle coexiste avec une autre partie qui est l’empathie dont on parle beaucoup aujourd’hui mais qui est tout aussi essentielle à l’évolution de l’espèce humaine. On considère qu’elle permet la vie en groupe, la cohésion, le groupe, prendre soin des plus faibles chez l’être humain comme chez les animaux. Qu’on ne s’attaque pas aux plus faibles, aux personnes âgées…
D’après ce que disent les scientifiques donc, l’empathie est une composante génétique de l’être humain. Donc peut-être que ce besoin de poursuivre et d’attraper des animaux l’est aussi. Tout cela coexiste. D’ailleurs, on voit bien que chez les animaux prédateurs comme des loups, ces deux composantes coexistent de façon totalement innée.
Enfin, le milieu social, culturel dans lequel on évolue détermine complètement la propension à développer de façon plus marquée l’une ou l’autre de ces composantes. Par exemple, un garçon ou une fille qui naît dans une famille de chasseurs aura beaucoup plus de chances de développer « l’instinct » de chasseur qu’un garçon ou une fille de la ville. La plupart des chasseurs le sont de père en fils.
Voilà mon point de vue, c’est possible que quelque part en nous, cette tendance existe, et c’est pour ça que je ne pense pas que les chasseurs soient tous des psychopathes. A part la minorité que je décrivais au début qui ont des pulsions sanguinaires.
Dans la réalité, de nombreux chasseurs sont sincères quand ils disent qu’ils partent à la chasse pour être dans la nature avec leur chien et pour regarder l’animal. Alors certes, à la fin, il y a le tir. Ceux qui changent leur fusil par un appareil photo, disent qu’ils font tout pareil, sauf qu’à la fin ils troquent le tir par les photos.
LR&LP : Que pensez-vous de la pétition lancée par “un jour un chasseur” sur le site du Sénat proposant cinq réformes afin que les accidents et abus liés à la chasse ne se reproduisent plus. La trouvez-vous complète ?
P.R : Complète peut-être pas, mais je la trouve intéressante parce qu’elle montre ce que je pointe aussi depuis longtemps. C’est à dire en gros les dérives liées au manque de formation des chasseurs, au manque d’encadrement. Le fait que les gens soient mis en danger.
Dans le canton de Genève, la chasse de loisir a été interdite il y a 40 ans. L’argument qui a fait que les citoyens ont voté en sa faveur est avant tout sécuritaire parce qu’ils avaient envie de pouvoir se balader à la campagne, en forêt sans se retrouver nez à nez avec des chasseurs.
Puis les chasseurs reprennent toujours pour argument que les accidents à la chasse touchent très peu de monde, qu’il y a plus de gens qui meurent d’accidents de la route. Alors que lorsque l’on habite à la campagne, on se rend vraiment compte que les gens évitent les chasses… Lors des battues, tout le monde s’enfuit. Donc même s’il y a « peu » de personnes tuées à la chasse, c’est déjà beaucoup trop. Encore pire, les chasseurs se tuent parfois entre eux….
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Je trouve donc que la pétition est intéressante pour l’argument de la sécurité car ce dernier peut vraiment toucher les habitants des campagnes et les fédérer. Il faut quand même savoir qu’il n’y a pas vraiment de cours pour apprendre à savoir tirer.
A l’évidence, la problématique de la chasse est complexe. Comme nous l’explique Pierre Rigaux, l’être humain chasse depuis des millions d’années, elle serait même partie constituante d’une partie de notre sociabilité et de notre morphologie. Cependant, il y a une part non négociable autour de la souffrance animale ainsi que sur les dérives de la chasse provoquant des accidents trop souvent mortels. De plus, la chasse pratiquée de manière purement récréative n’a pas de légitimité d’un point de vue éthique la majeure partie du temps étant donné que 95 % des animaux tués à la chasse ne cause pas de dégâts aux humains et à leurs activités. Alors qu’aujourd’hui seul un Français sur cinq est favorable à la chasse, et que les arguments anti-chasse gagnent de plus en plus de terrain, le moment ne serait-il pas venu de fédérer les forces citoyennes (anti-chasse, associations de protections des animaux sauvages, collectif contre les dérives de la chasse etc …) afin de faire pression sur notre gouvernement pour réformer en profondeur cette pratique cruelle. Récemment une pétition a été mise sur le site du Sénat par le collectif “Un jour un chasseur” proposant cinq réformes afin que la chasse soit mieux encadrée. Si elle obtient 100 000 signatures en moins de 6 mois, elle pourra faire l’objet d’une modification du texte législatif.