La carte interactive Adonis a été mise au point par le groupe alimentaire Ecotone et l’entreprise associative Solagro, spécialisée en agronomie, qui vise à favoriser l’émergence et le développement du secteur de l’agroécologie. Le mercredi 23 juin, la carte a été publiée pour servir de référence à la recherche, aux agriculteurs et à la politique publique afin de faire face aux enjeux environnementaux et de santé publique actuels.
Cette carte a été mise au point à partir de l’Indice de Fréquence de Traitements Phytosanitaire, un indicateur de suivi des produits phytopharmaceutiques (insecticides) à l’échelle de l’exploitation agricole ou d’un groupe d’exploitations.
Il comptabilise le nombre de doses de référence utilisées par hectare au cours d’une campagne culturale et se divise par type de produits : herbicides, fongicides, insecticides et acaricides, ainsi que les autres produits.
La carte Adonis porte son nom en référence à la plante messicole. Ces plantes habitent majoritairement les moissons, et se sont adaptées à coloniser les milieux de l’agriculture, évoluant au fil des siècles avec cet habitat.
L’utilisation généralisée des pesticides a cependant fait disparaître la quasi-totalité des plantes messicoles. Leur perte, comme celle de nombreuses autres plantes, amoindrit la richesse botanique de nos terres, et a provoqué en France la régression d’espèces qui en étaient dépendantes, telle que l’alouette des champs.
La carte est présentée avec l’ambition de faire connaître les données de l’utilisation moyenne des pesticides dans chaque région, et plus précisément chaque commune.
Selon l’évaluation de Solagro, et sans surprise, les zones spécialisées en agriculture, telles que les zones viticoles, d’arboriculture fruitière et les grandes cultures sont les plus polluées.
Les territoires très protégés par rapport à l’usage des pesticides sont eux : « (…) situés principalement dans les zones de montagne, et les marais côtiers, où les systèmes de polyculture élevage de ruminants dominent avec une forte présence de surfaces en herbe qui ne sont généralement pas traitées. »
Le rapport relève en concordance que les milieux les plus pollués subissent une pression notamment du fait d’un assolement (procédé de succession de types de cultures pour conserver la fertilité du sol) peu diversifié, ainsi que des pratiques agricoles plus intensives.
L’entreprise a prévu d’ajouter prochainement les territoires d’Outre-mer sur la carte. L’enjeu est d’autant plus important pour les Antilles françaises, dont les nappes souterraines, les eaux et la faune ont été gravement polluées entre 1972 et 1993, provoquant ainsi une catastrophe environnementale et un scandale sanitaire pour les populations de la Guadeloupe et la Martinique.
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Les données sur les insecticides étant déjà précédemment accessibles au public, le magazine mensuel Geo rapporte dans un article les explications d’Aurélien Chayre, agronome pour Solagro :
« Cette initiative part du constat que pour baisser la quantité de phytosanitaires utilisés, nous avons besoin de données précises. On s’est rendus compte qu’il n’est pas évident d’y accéder. On les met donc à disposition de tous. »
Le plan Ecophyto 2018 du gouvernement planifiait la réduction de l’usage de 50 % des pesticides entre 2008 et 2018. Selon France Nature Environnement, leur usage a augmenté de 25 % pendant cette période. En octobre 2015, face à cet échec, un nouveau plan, Ecophyto II, a fixé l’échéance à 2025.
Selon une enquête de FranceInter, 800 millions d’euros ont été débloqués pour le premier plan, et 400 millions d’euros de fonds publics ont été dépensés par an, entre 2009 et 2021. Des politiques de gestion et de réduction efficaces sont donc encore nécessaires.
La plateforme a pour but d’accompagner les politiques publiques nationales et européennes. Solagro annonce : « L’objectif global est de faire basculer dans le vert les 10 millions d’hectares actuellement dans le rouge »