Votée favorablement en janvier dernier, l’étude d’un parc photovoltaïque proposé par la société EDF Renouvelable France et la SEM Énergie Rhône Vallée, détruirait 20 ha de bois communaux sur la montagne de la Serre, à Sampzon. Prévue sur une Zone Natura 2000, elle mettrait en péril la biodiversité et menacerait des espèces endémiques tel que l’aigle de Bonelli, emblème de l’Ardèche du sud.
Écologistes et chasseurs unis pour la Serre
Pour s’opposer au projet de parc photovoltaïque qui menace de détruire 20ha de la forêt de la Serre, une pétition a été lancée en septembre par Lionel Coste, président de l’association Qualité de vie à Grospierres et a déjà récolté sept cent signatures.
« C’est Rémy Ventalon, le fils du Maire qui m’a averti. Il est président de la chasse de la CCA. C’est intéressant de voir un chasseur contacter un écologiste alors qu’à chaque fois que je lutte contre un projet personne ne répond. Là, c’est un conflit de générations. » raconte Lionel Coste pour La Relève et La Peste
Ce n’est pas la première fois que Lionel Coste élève la voix pour protéger l’environnement. Récemment, il y a eu une ébauche pour une carrière de 30ha entre la commune de Sampzon et celle de Grospierres. Avec plusieurs associations (Qualité de vie à Grospierres, FIBER Nature et bois de Païolive), ils sont montés au créneau et ont récolté plus de 48 000 signatures contre le projet qui a fini par disparaître.
Aujourd’hui, ce sont 20 ha de bois communaux qui sont menacés. La montagne de la Serre est un massif de collines de plus de 14 km de long. Ce corridor écologique se dessine du Parc National des Cévennes jusqu’à la réserve naturelle des Gorges de l’Ardèche.
« Ce serait sur le plateau du Planèze. La LPO ainsi que les chasseurs ont émis leur opposition. On est sur le domaine vital de l’aigle de Bonelli, emblématique du sud de l’Ardèche. Il y a aussi le faucon crécerelle, le pèlerin et le circaète qui ne sont pas loin. Des espèces protégées comme des plantes et des reptiles. C’est une aberration de projeter ça sur 20ha de bois communaux !
C’est le maire de Sampzon qui est en faveur du ce projet. C’est un retraité de l’ONF, il a une vision comme on l’avait dans cette institution à l’époque où l’on considérait que les bois n’avaient d’importance que s’ils étaient exploités. » explique Lionel Coste pour La Relève et La Peste
L’argument avancé par l’élu est que le parc rapporterait 158 000€ à la commune. Pour Lionel, ce non-sens écologique prend sa source dans des problématiques plus complexes. En effet, la commune a, selon lui, toutes les infrastructures nécessaires (écoles, magasins, campings) et se situe près de deux points touristiques stratégiques : Ruoms et Vallons Pont d’Arc.
« De mon point de vue avec les Intercommunalités de communes, on a créé de nouvelles baronnies. Assis à une vingtaine, il faut mettre en avant son poids politique, il y a un côté viril. Quand tu représentes une commune de 140 habitants et que de l’autre côté, il en incarne 2000, tu n’as pas beaucoup de poids. Ce sont des sujets très intéressants sociologiquement et politiquement. Je veux montrer que je suis plus puissant que toi, que j’ai plus d’argent parce que sinon on ne m’écoute pas. » analyse Lionel Coste pour La Relève et La Peste
L’aigle de Bonelli est de taille moyenne et présente de longues pattes avec des pieds massifs et de grandes serres. Crédit : Paco Gómez
Un parc photovoltaïque, symbole des contradictions de notre société
Un des autres problèmes soulevés par Lionel Coste concernant la construction de ce parc photovoltaïque est notre rapport au monde et plus précisément à notre consommation d’énergie.
« Si on me dit : « on détruit 20 hectares mais en Ardèche, on n’a plus besoin d’utiliser du pétrole », je dis « ok on détruit 20 hectares mais globalement ce sera bien ». Ce que l’on voit de plus en plus, c’est que pour se donner bonne conscience on parle d’énergie renouvelable. Ce qui serait sensé si la consommation d’énergie en France ne bougeait pas. Le problème, c’est que plus on augmente la production d’énergie renouvelable, plus on fait grimper la consommation générale tout en continuant à utiliser de l’énergie carbonée. C’est là où ce n’est pas cohérent. » accuse Lionel Coste pour La Relève et La Peste
De fait, construire un parc photovoltaïque sur une zone artificialisée coûte plus cher. Malheureusement, l’Etat donne de moins en moins de subventions aux communes. Cette fuite en avant de notre consommation toujours plus effrénée est dissimulée par un discours soi-disant écologiste qui en fait un danger en soi et inhibe toutes réflexions et débats sur un changement de paradigme de notre manière de consommer.
Montagne de la Serre, Ardèche
« C’est une lutte sur plusieurs plans. D’abord, il ne faut pas détruire la nature. Mais allons plus loin, que veut-on en termes d’énergie ? Peut-être qu’il faut penser en termes de décroissance ? On est un peu schizophrène : on veut continuer à avoir notre confort tout en protégeant la nature. On dit que les sociétés sont plus sensibles à l’écologie mais je n’y crois pas. » dénonce Lionel Coste pour La Relève et La Peste
Comme exemple d’impact qu’aura la construction de ce projet, on peut citer le fait que 20 ha de parc photovoltaïque pourront aveugler les rapaces car leurs yeux sont biologiquement tournés vers le bas afin de pouvoir chasser. Les diverses associations opposées au projet ont déjà lancé une pétition, prévenu plusieurs médias comme FranceBleu, France3 et les journaux locaux (le Dauphiné et la Tribune).
« Plus on attend, plus ils dépensent de l’argent pour faire une étude et moins on a de chance qu’ils reculent. Il faut toujours renverser la situation et détruire les arguments avancés. « Vous êtes contre le développement économique » vs « oui mais les gens viennent ici faire du tourisme pour la nature, donc si vous détruisez ces zones, vous perdez de l’économie. » dénonce Lionel Coste pour La Relève et La Peste
Pour la suite, des rassemblements sont en train de se préparer. Bientôt écologistes, chasseurs et LPO sous les mêmes banderoles ?
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