Âgé de seulement 10 ans, César le Richier Le Moan a décidé de faire de sa passion pour le rap un outil de sensibilisation face au réchauffement climatique. Un jeune « rappeur climatique » qui n'en finit plus d'attirer l'attention sur les réseaux sociaux. Rencontre.
César, la passion du rap
Devant la gare de Lyon, touristes et habitants vont d’un bon pas pour échapper à la pluie en ce début d’hiver. Parmi la foule, la silhouette de César, 10 ans, fait progressivement son apparition. Accompagné de son père, le jeune Nantais a posé ses valises à Paris pour quelques jours, où son programme s’annonce chargé, entre invitations à des avant-premières et rendez-vous avec la presse. Il faut dire que depuis peu, celui qui aime à se présenter comme un « rappeur climatique » a la côte.
« Tout a commencé pendant le confinement quand avec papa, on a découvert la chanson ‘IPCC rap’ du rappeur canadien Baba Brinkman, rembobine le pré-adolescent sous le regard approbateur de son père, Pascal. On a vu qu’il reprenait les conclusions scientifiques du Giec en rappant et on s’est dit qu’il fallait l’adapter en français. »
Une adaptation rebaptisée « Giec rap », visible sur les réseaux sociaux et dans laquelle on découvre César, frimousse blonde et moue enfantine, qui martèle en rythme : « guerres, famines, maladies, inondations, chaos, migrations, annonce le Giec ! On repousse tout à demain, on déconne sérieusement ».
Rap : une dizaine de titres pour sensibiliser à l’urgence climatique
Des propos qui détonnent avec son allure juvénile et son jeune âge. « César est enfant unique et à table, avec sa mère, on parle de sujets d’adultes », confesse son père en guise d’explication. Membre des Shifters, une association qui œuvre à la décarbonation de l’industrie, ce dernier explique avoir eu un « déclic environnemental » lors du confinement.
« Depuis, on parle beaucoup d’environnement avec César. Et comme il a toujours aimé la musique, on s’est mis à écrire des chansons sur le climat… Faire de la musique, ça permet de transformer sa colère, de faire quelque chose de ses émotions. »
Depuis leur premier coup d’essai, le rappeur en herbe et son père ont écrit pas moins d’une dizaine de chansons, parmi lesquelles « Ma journée » basée sur « La quête » d’Orelsan, « Mon petit média » sur demande de l’association Quotaclimat, « Eco-héros », « Slow Life » ou encore « Amer ».
« Celle-là, je l’adore ! » s’enthousiasme César à l’évocation du titre, avant d’entamer les premières paroles, le regard droit, balayant d’un geste franc une mèche blonde qui barre son visage : « C’est le retour du gamin qui te parle de la planète, détends-toi mon but c’est pas de te prendre la tête, rappe-t-il, concentré. Si j’ai choisi le hip-hop comme art d’expression, c’est lié à la gravité de la situation ».
De La France a un incroyable talent au week-end de mobilisation contre l’A69
Des titres qu’il a joué lors de scènes ouvertes, mais aussi sur le plateau de l’émission « La France a un incroyable talent » sur M6 et jusque devant les milliers de militants rassemblés lors du week-end de mobilisation contre l’A69.
« L’A69 c’est un carnage, avance-t-il sans sourciller, donc bien sûr qu’avec papa, on voulait être présents. Les politiciens nous traitent d’écoterroristes, mais ce sont eux les polluterroristes ! Ils donnent des idées qui polluent. »
Et de renchérir en riant : « D’ailleurs, avec papa, quand on est dans le métro, on arrache les affiches publicitaires d’Avène [la marque de dermo-cosmétique appartient au groupe Pierre Fabre, à l’origine du projet d’autoroute, NDLR]. Il faut bien faire quelque chose ! »
De quoi faire oublier, ou presque, que César reste aussi un garçon de son âge, occupé à jouer avec ses copains d’école lors des temps de récréation.
« Même si, rajoute-t-il d’emblée, je discute beaucoup avec eux. Je suis vachement content parce que certains copains commencent à prendre conscience du réchauffement climatique et de l’importance de changer nos comportements. »
« Réussir à changer les imaginaires sans faire culpabiliser les gens »
A l’heure où César gagne en visibilité sur les réseaux sociaux, son père, Pascal, se dit vigilant.
« Avec sa mère, on fait gaffe, assure-t-il. On ne lui montre pas certains commentaires et c’est nous qui gardons la main sur ses différents comptes. » A ceux qui l’accuseraient d’utiliser l’image de son fils pour servir ses propres ambitions, Pascal est catégorique : « On demande toujours son avis à César. Même ce type de critiques, on lui en parle. »
Des critiques auxquelles César ne prête qu’une oreille distraite, déjà occupé à réfléchir à son prochain titre, consacré cette fois à l’exploitation des fonds marins norvégiens.
« Ce que j’aime avec l’art, et en particulier la musique, c’est que ça peut vraiment aider à prendre conscience de l’urgence d’agir », sourit-il en guise de conclusion. « Mais pour ça, pour changer les imaginaires, il faut réussir à le faire de façon ludique, complète son père, sans faire culpabiliser les gens ».