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À Strasbourg, la coopérative Byfurk expérimente le revenu de transition écologique

« Il s’agit souvent de gens qui ont décidé de sortir du système, ou de ne pas y rentrer du tout. Des salariés qui, après Covid par exemple, ont quitté leur job par manque de sens. Ce sont des personnes qui assument leur situation mais qui vivent tout de même avec des bouts de ficelle. Nous sommes là pour les aider à redonner du sens à leur vie professionnelle, en accord avec le vivant »

À Strasbourg, le dispositif Byfurk propose d’accompagner des porteurs de projets qui font sens autour du vivant et soutiennent la transition écologique et sociale. L’objectif, enrichir les liens humains et préserver l’environnement, tout en assurant un revenu d’un an aux participants pour soutenir leur activité.

Un revenu de transition écologique et sociale

En ce mois de mars, avec des températures qui s’adoucissent et un soleil de moins en moins timide, le vélo de Steve commence à retrouver des couleurs. Un engin un peu particulier, qui donne envie de s’y attarder.

Avec son moteur électrique, son système triporteur et sa plateforme avant, ce trois roues imposant va permettre aux personnes dont la vie a réduit la mobilité, de pouvoir partager, depuis leur fauteuil, un petit bout de chemin à l’air libre.

Ancien préparateur en pharmacie, et après 15 années à revendre du matériel médical, Steve Birgel constate que le manque d’activité extérieure pèse sur les personnes handicapées.

Alors à 50 ans, il se lance, et teste sa propre activité. Il roule pour ces autres qui n’ont plus la chance de pouvoir pédaler, des jeunes, plus âgés, handicapés, mentaux ou physiques. Des balades en pleine nature ou des moments en famille, le tout grâce à son vélo électrique. Il le rappelle cependant : avec ce système, il n’a rien inventé.

« C’est un vélo qui existe déjà depuis longtemps, mais peu de personnes peuvent en bénéficier. Un triporteur comme celui-là coûte environ 10 000 euros. Alors, que ce soit les maisons de santé, de retraite ou les particuliers, tout le monde n’a pas les moyens de se l’acheter, surtout pour l’utiliser 2 ou 3 fois dans l’année », explique Steve à La Relève et la Peste.

Dans un premier temps, à l’aide d’une couveuse d’entreprise, Steve s’auto-finance, se forme, développe un réseau, et trouve son public, aux demandes variées.

« On peut prévoir une sortie avec les petits-enfants, les cousins, mais aussi des choses plus intimes, comme se rendre au cimetière, pour se recueillir près du mari, de la famille. Les personnes qui viennent avec moi s’émerveillent des choses simples de la vie, mais auxquelles elles n’ont plus ou peu accès. Finalement, avec ces balades, on construit un souvenir heureux », détaille-t-il pour La Relève et la Peste.

Aujourd’hui, Steve pédale de mars à octobre, et espère progressivement se développer. Acquérir un nouveau vélo, un tandem, notamment, mais aussi engager des saisonniers.

Vélo pour personnes à mobilité réduite

La Kutch, l’invention de Steve – Crédit : Steve Birgel

Redonner du sens

Un espoir qu’il peut se permettre d’avoir, en particulier depuis qu’il est entré chez Byfurk. Depuis décembre dernier, la coopérative strasbourgeoise propose en effet à une dizaine de porteurs de projets impérativement écologiques, sociaux et solidaires, de les accompagner dans leur transition vers un monde plus respectueux du vivant, sur le principe d’un incubateur.

Le système repose sur une phase en trois temps. Chaque participant doit, après validation du projet par le comité de Byfurk, lancer un premier financement participatif, qui déclenche ensuite les deux autres tiers du financement, l’un public, l’autre privé.

Par exemple, si l’un des porteurs de projets parvient à recueillir 5000 euros de financement citoyen, il se verra abonder de la même somme par l’Eurométropole de Strasbourg, mais aussi 5000 euros supplémentaires par une entreprise désireuse de le soutenir dans son activité.

« Il s’agit souvent de gens qui ont décidé de sortir du système, ou de ne pas y rentrer du tout. Des salariés qui, après Covid par exemple, ont quitté leur job par manque de sens. Ce sont des personnes qui assument leur situation mais qui vivent tout de même avec des bouts de ficelle. Nous sommes là pour les aider à redonner du sens à leur vie professionnelle, en accord avec le vivant », détaille Philippe Kuhn, l’un des trois fondateurs de Byfurk, à La Relève et la Peste.

À l’image de Steve, donc, mais aussi d’Anaïs et Bertrand, tous deux enseignants, qui ont décidé de se reconvertir, à Strasbourg, dans la culture du safran. Une démarche réalisée au plus près du respect de l’environnement, avec, notamment, un terrain en cours de certification biologique, des relations nouées avec les artisans locaux ou l’utilisation exclusive du vélo.

Un cheminement qui fait sens avec l’état d’esprit insufflé par Byfurk, puisque la coopérative a instauré la mesure d’impact au cœur de son procédé. Réalisée par un prestataire externe, elle permet de mesurer, en amont du lancement du projet et de manière prévisionnelle, les impacts écologiques, sociaux et sociétaux de chacune des activités. Des bilans sont prévus, ensuite, tous les 6, 9 et 12 mois.

Assurer un revenu de transition écologique

Le dispositif aspire par ailleurs à faire valoir le revenu de transition écologique sur le secteur de l’Eurométropole de Strasbourg. Une idée pensée par la philosophe et économiste suisse Sophie Swaton, qui consiste à conditionner un revenu sur une activité faisant sens avec les enjeux de l’époque. Pour permettre au revenu de transition écologique d’être testé localement, cette dernière a créé l’association Zoein, facilitant ainsi « l’appropriation de solutions innovantes par les acteurs de terrains ».

Aujourd’hui, en France, seule une poignée de territoires expérimentent ce dispositif tourné vers le monde de demain, donc Byfurk, dans le Bas-Rhin. Avec le financement tripartite, et un premier chiffre d’affaires, les porteurs de projet s’assurent ainsi un revenu sur l’année, pour leur transition, et de façon écologique.

Crédit : Anaïs Meyer et Bertrand Bonneau

« Nous travaillons tous ensemble pour faire avancer cette cause et faire en sorte que ce revenu de transition écologique aboutisse un jour, dans l’idéal, sur un projet de loi », ajoute Philippe Kuhn.

Enfin, la coopérative a la particularité de reverser une partie du revenu de transition écologique en stück, la monnaie locale alsacienne, pour faire vivre de manière circulaire les différents acteurs s’engageant pour une transition écologique et sociale, toujours respectueuse du vivant.

Sources : « L’association Zoein France », Zoein / « Byrfurk, la planète embauche », Byfurk.coop 

Juliette Boffy

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