C’est une victoire historique que viennent d’obtenir Sea Shepherd France, France Nature Environnement et l’association de Défense des Milieux Aquatiques devant le Conseil d’État. La plus Haute Juridiction de France se range derrière l’avis des scientifiques et ordonne au gouvernement de fermer chaque hiver les zones de pêche responsables du massacre de milliers de Dauphins communs et petits cétacés dans le Golfe de Gascogne.
Cela faisait des années que les associations de protection de l’environnement luttaient pour empêcher le pire : la disparition des cétacés des côtes françaises. Cette année, l’hécatombe était particulièrement intense et précoce avec des centaines de dauphins retrouvés échoués et parfois mutilés sur les côtes atlantiques françaises, tués dans les filets des pêcheurs.
En 30 ans, la pêche a ainsi causé la mort de 90 000 dauphins en Atlantique nord-est. Rien que pour ces deux dernières années, ce sont plus de 18 500 dauphins qui ont été massacrés dans le Golfe de Gascogne. La survie de l’espèce est en jeu, à tel point que 1500 scientifiques s’étaient réunis pour demander la fermeture temporaire des zones de pêche les plus meurtrières.
Même la Commission Européenne a exigé de la France qu’elle prenne les mesures nécessaires pour cesser l’hécatombe qui a lieu chaque hiver, rien à faire, le gouvernement français ne bougeait pas. Après des années d’actions sur le terrain et d’alertes médiatiques, les associations de protection de l’environnement avaient décidé d’attaquer l’État en justice pour stopper le massacre des dauphins.
Après que le rapporteur public ait rendu de premières conclusions favorables à la protection des cétacés il y a un mois, la Haute juridiction a tranché en faveur des associations ce 20 mars 2023. Le Gouvernement va devoir fermer les pêcheries les plus destructrice pour réduire drastiquement les captures de Dauphins et petits cétacés.
« 6 ans de longue bataille pour en arriver là ! On est super contents, le gouvernement ne pourra pas se contenter de fermer les pêcheries seulement 15 jours car ce ne serait pas cohérent avec les analyses des scientifiques. Le rapporteur public a été clair sur le fait que la France doit s’aligner sur les meilleures connaissances scientifiques avec des résultats concrets » se réjouit Lamya Essemlali, Présidente de Sea Shepherd France, auprès de La Relève et La Peste
Un délai de 6 mois est accordé à l’État pour s’organiser. Les associations vont donc être vigilantes sur le scénario de fermeture qui sera choisi. Elles vont pousser pour le scénario N qui préconise de fermer 3 mois l’hiver et 1 mois l’été et permettrait de sauver le plus de dauphins. Des compensations financières sont à définir pour les pêcheurs concernés grâce à des subventions européennes.
« On va être hyper vigilants sur la décision d’exécution et le scénario choisi. Le pic d’échouage estival entre mi-juillet et mi-août ne pourra pas être évité mais l’hiver prochain c’est zéro cadeau ! On va les suivre au corps pour obtenir des vraies mesures, on va pouvoir faire une demande en préjudice écologique, la justice nous a donné raison, la faute de l’État est démontrée, là on a gagné la coupe du monde des dauphins » explique Philippe Garcia, Président de l’association de de Défense des Milieux Aquatiques, pour La Relève et La Peste
Lors de son introduction, la rapporteure a précisé que le sujet était extrêmement médiatisé, preuve que l’opinion publique a un toujours un poids majeur dans les décisions juridiques. Ces dernières années, Sea Shepherd France a multiplié les actions fortes en exhibant les cadavres de dauphins dans les places des villes et devant les institutions pour alerter la population et les décideurs sur le sujet.
« Il faut réaliser qu’il y a une surconsommation de poissons qui a doublée en 50 ans, ça nous interroge sur notre rapport à l’Océan. Il va falloir changer nos habitudes alimentaires et manger moins de poissons. C’est formidable qu’on ait réussi à braquer les projecteurs là-dessus car on partait de très très loin. Même certaines personnes qui vivent près de la mer, comme à La Rochelle, ne savaient pas qu’on a des dauphins en France ! Ils sont là et c’est notre devoir de les sauver » précise Lamya Essemlali, Présidente de Sea Shepherd France, auprès de La Relève et La Peste
Il n’y a pas que les dauphins qui sortent gagnants de cette décision. Ces cétacés emblématiques sont essentiels à tout l’écosystème maritime. Durant la fermeture, c’est donc toute la biodiversité marine qui pourra enfin respirer, les poissons grandir et se reproduire, et « les pêcheurs se reposer tout en étant indemnisés durant l’arrêt et proposer des méthodes plus sélectives » précisent les associations.
« Cela fait des années que je bosse comme une mule pour montrer que ce qu’on fait en mer c’est n’importe quoi. Aujourd’hui si on y est arrivés, c’est uniquement parce qu’il y a eu trop de dauphins tués. Ce sont les dauphins par leur sang qui sont venus arracher ce jugement. FNE, Sea Shepherd, nous, tous les médias ont relayé l’histoire et ont basculé l’opinion publique, c’est vraiment un signal fort que peut-être qu’on est capables d’inverser la vapeur pour tout ! » confie avec espoir Philippe Garcia, Président de l’association de de Défense des Milieux Aquatiques, les yeux embués de larmes et la gorge nouée, pour La Relève et La Peste
Pour la première fois depuis des années, le résultat de ce recours fondamental devant le Conseil d’État donne une vraie lueur d’espoir pour les dauphins. Une magnifique conclusion pour une si longue bataille pour la protection de l’Océan.