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Victoires en série contre le déterrage des blaireaux : une avancée pour leur protection

La série de recours en justice ayant porté leurs fruits, l’ASPAS a lancé une pétition en ligne sur le site du Sénat pour demander l’interdiction définitive de la vénerie sous terre. Afin que les sénateurs puissent décider d’y donner suite, elle doit atteindre les 100 000 signatures d’ici le 30 septembre 2022.

La vénerie sous terre, ou déterrage de blaireaux selon le principe de la chasse à cour, consiste à envoyer des petits chiens acculer des blaireaux dans leurs terriers, puis les déterrer de leurs abris avec des pinces, et finalement de les abattre. Le plus grand des mustélidés se nourrit de rongeurs, d’invertébrés et de nids de guêpes, il est donc un élément essentiel de la régulation des écosystèmes. L’Association pour la Protection pour les Animaux Sauvages (ASPAS) enchaine les victoires depuis le début de l’année pour une meilleure conservation de l’espèce.

Au même titre que le castor, cette espèce-ingénieur à la vie nocturne creuse des galeries qui atteignent parfois 5 mètres de profondeur. Elle vit en clans qui comptent jusqu’à une douzaine d’individus, sur quelques dizaines à plusieurs centaines d’hectares.

En France, dans les années 1970, les terriers des blaireaux étaient souvent gazés pour lutter contre la rage. Partant du principe que la santé des animaux était liée à la santé des humains, une campagne de vaccination des renards, hôte principal du virus à l’époque, a mis fin au problème.

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En 1988, le blaireau est ainsi passé du statut de nuisible à celui de gibier. Sa chaire n’est pourtant pas consommée. C’est une espèce tranquille et très discrète à laquelle on impute des dégâts dans les champs de céréales, ou sur les poules. Mais il préfère davantage les forêts que les champs ouverts.

Aujourd’hui, le blaireau est protégé en Italie, aux Pays-Bas, en Belgique, au Luxembourg, au Danemark, en Grèce, en Espagne, en Hongrie, en Grande Bretagne et au Portugal. La France est l’un des derniers pays en Europe à autoriser la chasse par déterrage. Le gouvernement l’autorise entre le 15 mai et le 15 septembre.

Cependant, la période de dépendance des blaireautins ne s’achève qu’en août, et les petits en pâtissent. De plus, les blaireautières détruites lors des chasses sont creusées dans de vastes étendues de terre et sont parfois utilisées par des chats forestiers, des chauves-souris, des loutres, des amphibiens et des reptiles. Certaines d’entre elles sont des espèces protégées.

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Depuis 2009, le blaireau fait officiellement partie en France des espèces infectées par la tuberculose bovine, qui se propage rapidement, et qui est transmissible à l’homme. Les fédérations de chasse tendent donc à utiliser l’argument sanitaire pour perpétuer leurs pratiques, mais chassent parfois dans des zones où il ne fonctionne pas.

Dans son rapport de 2016, puis dans celui de 2019, L’ANSES met en emphase : « dans les zones indemnes de tuberculose, l’élimination préventive des blaireaux (et des autres espèces sauvages) ne peut en aucun cas être justifiée au motif de la lutte contre la tuberculose ».

En Angleterre, des campagnes de vaccination, renouvelées, sont organisées afin d’éradiquer la maladie chez l’animal, symbole important pour le pays, d’ici à 2038. Un nouveau permis a été mis en place en 2022 pour que les fermiers, propriétaires terriens et groupes de vaccination puissent vacciner le blaireau.

Rosie Woodroff, spécialiste en écologie comportementale de la société zoologique de Londres, a estimé auprès du journal britannique The Guardian : « Les agriculteurs s’inquiètent à juste titre de l’efficacité de la vaccination des blaireaux pour protéger le bétail de la tuberculose. Bien que les preuves disponibles soient prometteuses, les données sont limitées et le gouvernement aurait gagné à plus investir et à garantir ces preuves à une date antérieure. »

L’espèce étant majoritairement nocturne, elle est difficilement observable, et sa population en France n’est aujourd’hui pas quantifiée. Les données sont donc également limitées dans notre pays. Les associations de défense des animaux et élus engagés pour la cause s’inquiètent des dégâts occasionnés par la vénerie sur les populations.

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Fer de lance dans ce combat, depuis le début de 2022, l’ASPAS a réussi sur 9 actions en justice à faire suspendre ou annuler 8 arrêtés préfectoraux qui autorisaient une période complémentaire de vénerie sous terre des blaireaux.

Selon Coline Robert et André Rigal-Casta du cabinet GéoAvocats, qui ont représenté l’ASPAS et l’association AVES (Agir Pour le Vivant et les Espèces Sauvages) au tribunal sur 5 victoires :

« La reconnaissance par les juges de l’incompatibilité de la vénerie sous terre avec la protection légalement accordée aux petits blaireaux est une avancée majeure. Il en va de même de l’absence de dégâts importants en lien avec l’espèce. Ceux-ci ne sont jamais attestés par la moindre preuve et les juges sont de plus en plus enclins à le constater. Ces éléments fragilisent les motivations derrière cette pratique, déjà scientifiquement remise en cause. »

La série de recours en justice ayant porté leurs fruits, l’ASPAS a lancé une pétition en ligne sur le site du Sénat pour demander l’interdiction définitive de la vénerie sous terre. Afin que les sénateurs puissent décider d’y donner suite, elle doit atteindre les 100 000 signatures d’ici le 30 septembre 2022.

12 000 blaireaux sont éliminés chaque année en France. Ce mustélidé participe pourtant de façon intensive à l’équilibre des écosystèmes par l’intermédiaire de son labeur. Il retourne des tonnes de terre tous les jours, et aère ainsi les sols. Il aide également à la dissémination des graines et à la régulation des populations de toutes sortes de petits animaux. La moitié des blaireaux n’atteignent pas l’âge adulte et 30 % des adultes ne dépassent pas l’âge de 4 ou 5 ans, la pullulation de l’espèce est donc également très peu probable.

Maïté Debove

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