Ni navigateurs, ni océanographes, quatre amis se sont lancés un défi fou : traverser l’Océan en voilier, de Marseille à Sydney. Durant un an, les navigateurs Ardéchois enverront des données aux laboratoires scientifiques pour aider à mieux connaître et protéger les océans. Une ode à la sobriété et à la science participative.
Un voyage alternatif qui prône la sobriété
Alors que notre production de CO2 individuelle devrait se limiter à 2 tonnes par an pour limiter notre empreinte carbone, un voyage en avion Paris-Sydney émet environ 8,9 tonnes de CO2/personne selon un rapport 2019 du GIEC.
Dans un monde où tout va vite et où la norme consiste à voyager en quelques heures à l’autre bout du monde, quatre amis se lancent un défi fou à contre-courant : celui de parcourir 26 000 kilomètres pour rejoindre l’Australie à la seule force du vent. Une alternative pour voyager autrement, où le rapport au temps et à l’espace, plus lent et naturel, est davantage en accord avec les enjeux environnementaux actuels.
C’est en novembre 2024 que ce groupe hissera les voiles depuis Marseille pour se lancer dans un voyage d’un an contre vents et marées. « Notre voyage n’est plus seulement une destination. Le voyage lui-même est le voyage » explique Raphaël, l’un des participants au projet, pour La Relève et la Peste.
« L’idée de se rendre en Australie sans exploser notre bilan carbone fait sens avec nos valeurs et notre objectif de s’y installer sur le long terme. On a donc pensé au voilier, même si aucun de nous n’est marin et n’a jamais navigué ».
Ce qui pourrait être vu comme un frein, devient finalement un challenge supplémentaire et une opportunité de s’entourer de skippers professionnels et d’organismes de formations certifiés pour devenir un équipage expert.
« On s’est rapidement dits qu’on voulait se servir de ce voyage pour s’engager un peu plus dans les causes qui nous tiennent à cœur » continue l’Ardéchois.
Pour faire vivre leur projet, ils ont créé l’association O’Seas. Pour le mettre au service du bien commun, ils se mobilisent en soutenant des causes environnementales et humaines.
Un engagement scientifique pour aider à la préservation de l’environnement
Dans un contexte où il est primordial de mieux connaître et protéger les océans, l’équipage s’est rapproché de deux associations, Astrolab Expéditions et Oceaneye, pour participer à trois programmes scientifiques tout au long de leur périple.
« Le plus gros frein de la science de la biodiversité marine est que les océans sont énormes et qu’il y a peu d’expéditions lancées. Notre but est donc de récolter des données au milieu de l’océan pour faire avancer la science et contribuer à la protection de la vie marine » nous livre Raphaël.
Avec Sens Océan, ils mesureront la température et la salinité de surface pour améliorer l’étude des courants marins et du changement climatique à l’aide de deux capteurs placés dans un boîtier. Ces mesures permettent de mieux comprendre l’évolution des océans, les courants océaniques et leur impact sur le changement climatique. Ils feront également des collectes de micro-plastiques pour les envoyer au laboratoire d’OceanEye, afin de les identifier.
Avec Ketos, ils utiliseront la bioacoustique, la photo-identification et le suivi par satellite pour collecter des données sur les cétacés. Ces données sont non seulement accessibles au public, mais également aux chercheurs, aux gestionnaires de l’environnement marin et aux entreprises de conception afin d’élargir les connaissances sur les baleines.
Une dimension humanitaire en partenariat avec SOS Méditerranée
Prendre la mer ne se fait pas toujours par choix. Depuis 2014, ce sont plus de 22 000 personnes qui ont péri en Méditerranée centrale, selon un rapport 2023 OIM – Mission Migrants Project.
« On se sent hyper privilégiés de pouvoir se lancer dans un projet pareil. S’il nous arrive une galère, on va être sauvés directement. Ce n’est malheureusement pas le cas pour tout le monde, alors qu’on est dans le même espace » poursuit l’Ardéchois.
Des associations se mobilisent contre cette situation dramatique en apportant un secours direct aux personnes en détresse. Face à cette crise humaine qui les questionnait sur leur légitimité à prendre la mer par envie, les quatre ardéchois ont également décidé de s’engager financièrement pour lutter contre cette situation, en reversant 10% des dons qu’ils recevront auprès de l’association SOS Méditerranée.
« On a également voulu contribuer à la sensibilisation dans les écoles dans une quinzaine de classes, en Ardèche et en Isère, en ouvrant des discussions autour de la protection de l’environnement et de la biodiversité marine, la solidarité face à la crise humanitaire en Méditerranée, la sobriété en lien avec le voyage et le temps ».
Une démarche mêlant pratique et pédagogie qui vise à éveiller la conscience des jeunes et éduquer les citoyens de demain. En partageant leur expérience de voyage en voilier, ils espèrent inspirer de nouveaux imaginaires de voyages respectueux de l’environnement.
« Sur le trajet, on aura au moins une ou deux interventions en visio avec ces mêmes classes » continue le futur marin.
D’ici leur départ, ils espèrent trouver des partenaires pour boucler le financement de leur projet à hauteur de 100 000 euros. « Cela permettrait aussi de pérenniser l’association, en passant par exemple le flambeau à d’autres adhérents en France, une fois qu’on sera arrivés en Australie » termine Raphaël.
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