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Un couple de mésanges peut manger plus de 500 chenilles processionnaires par jour

Ces oiseaux, ne craignant pas les poils urticants, chassent à tous les stades larvaires et peuvent à eux seuls vider le nid de la processionnaire et consommer jusqu’à 500 chenilles par jour.

Ces villes installent des nichoirs à mésanges pour éradiquer les chenilles processionnaires. Face à leur invasion, la mésange joue un rôle crucial contre leur propagation et pour la protection des végétaux. La présence primordiale de ce prédateur dans les écosystèmes fait partie d’un processus naturel, qui peut être intensifié par le biais d’installations de nichoirs, à l’échelle individuelle et collective.

La chenille processionnaire classée nuisible pour les arbres et l’humain

Cette petite bête vêtue de poils hautement urticants cause bien des tourments aux végétaux et aux êtres vivants. La protéine qu’ils contiennent, appelée thaumétopoéine, peut provoquer des éruptions cutanées, troubles oculaires ou respiratoires auprès des humains, et de graves nécroses pour les animaux.

Pour les reconnaître dans votre jardin, il suffit de jeter un coup d’œil aux arbres. Si vous apercevez des nids en fil de soie, il s’agit sans aucun doute de chenilles processionnaires.

En raison du réchauffement climatique et des hivers plus doux, les chenilles processionnaires du chêne et du pin prolifèrent sur l’ensemble du territoire français. Pour permettre la multiplication des mesures de lutte contre leur propagation, elles ont été classées par un décret gouvernemental datant du 25 avril 2022, « espèces dont la prolifération est nuisible à la santé humaine ».

Christophe Bailly, technicien au centre de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) de Champenoux, près de Nancy insiste également sur le risque supporté par les arbres qui les habitent. Notamment lors de fortes pullulations, les chênes peuvent être défoliés à 90% voire 100%.

Si la menace d’un risque sanitaire plane au-dessus des communes, ces dernières peuvent prendre des arrêtés. Ce fut le cas de la ville de Belley, située dans l’Ain, où les chenilles processionnaires devenaient problématiques pour l’ensemble des habitants du printemps à l’automne.

Sandra Sinno-Tellier, médecin épidémiologiste à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), surveille le développement de ces deux espèces. Entre 2012 et 2019, une augmentation régulière du nombre d’appels aux centres antipoison pour des intoxications liées à la chenille processionnaire du chêne a été constatée.

Une mésange sur un nid de chenilles processionnaires – Crédit : Métropole de Lyon

La mésange, première prédatrice de la chenille processionnaire

Les résultats d’une étude hollandaise à Westerveld ont démontré que le nombre de portées de chenilles processionnaires peut chuter de 80% si vous attirez les bons prédateurs. En s’interrogeant sur le type d’oiseau prédateur de chenilles processionnaires, la mésange arrive sur le podium.

Du haut de sa puissance et sa taille supérieure, les mésanges se positionnent prioritaires sur les sites de distribution de nourriture et obligent les autres espèces présentes à attendre pour se nourrir. Le fait de frapper la chenille dans le but de retirer la peau remplie de poils urticants est également la preuve que la mésange est dotée d’une intelligence remarquable.

Véritable atout dans la lutte alternative contre la chenille processionnaire, ce sont plus précisément la mésange charbonnière et la mésange bleue qui en sont les plus grandes consommatrices.

Ces oiseaux, ne craignant pas les poils urticants, chassent à tous les stades larvaires et peuvent à eux seuls vider le nid de la processionnaire et consommer jusqu’à 500 chenilles par jour, notamment pendant les périodes de nidification ou les phases hivernales, qui leur demandent une alimentation plus conséquente pour survivre. Un timing parfait pour enrayer la prolifération des chenilles processionnaires.

Yannick Andres, chef du service arbres de la Mairie de Nancy explique que les mésanges s’installent à la première ponte, quand elles ont besoin de nourrir les petits et que c’est au milieu du mois de mai qu’elles sont les plus efficaces. Par conséquent, la mise en place de nichoirs à mésanges est une solution idéale pour attirer ces oiseaux dans les zones impactées par les insectes.

Un nichoir à mésanges

Un nichoir à mésanges accroché par une commune sur un pin – Crédit : Ville de Saint-Just

Des nichoirs à mésanges contre la chenille processionnaire

Bien que les chaleurs automnales et hivernales favorisent le développement larvaire précoce, les expositions des chenilles processionnaires du pin sont observées de janvier à juillet, avec un pic en mars, tandis que celles du chêne sévissent entre avril et août. Damien Richter, conseiller municipal délégué au droit et au bien-être animal ainsi qu’à la biodiversité explique que les nichoirs servent à retarder et diminuer le pic chaque année, grâce à ces mésanges qui sont des prédateurs naturels et vont permettre de réguler les chenilles.

Les études menées démontrent que le rôle écologique de la mésange et son adaptation à la prolificité suivant la densité locale d’insectes à prélever permet de réduire de 10 à 40% les populations de chenilles processionnaires, suivant la proximité des nids occupés par les mésanges.             

L’extermination des chenilles processionnaires à travers un bon équilibre entre prédateurs et proies est un processus naturel qui peut être intensifié par des actions toutes simples, même à l’échelle d’une ville. Au même titre que la ville de Nancy qui a réintroduit des mésanges en 2021 grâce à l’installation de nichoirs au parc Saint-marie plutôt qu’avoir recours à un moyen artificiel et des traitements chimiques, la commune de Belley a mis en place ce dispositif entre mars 2017 et mars 2022, sur les principaux résineux et chênes communaux.

Jean-Noël Duée, responsable du service environnement de Belley confirme pour la Relève et La Peste que l’installation des nichoirs est bénéfique pour contrer les chenilles. « C’est la combinaison de plusieurs moyens, dont les éco-pièges, qui permet de les éradiquer efficacement. L’action des mésanges représente entre 20% et 30% dans cette lutte ».

Il continue en expliquant qu’un arrêté municipal s’apprête à voir le jour, pour intensifier l’action collective. « Les particuliers auront pour obligation de se mobiliser pour lutter contre les nids de chenilles processionnaires ». Il termine en affirmant que « l’objectif reste d’installer davantage de nichoirs d’année en année ».

À l’image de Belley et Nancy, d’autres communes européennes ont mis en place le même type de dispositif. La ville de Lommel en Belgique a par exemple distribué 500 nichoirs à ses habitants. Aux Pays-Bas, la mobilisation avait déjà commencé en 2020.

En permettant aux mésanges de s’installer durablement, l’équilibre naturel entre chenilles envahissantes et ses oiseaux malmenés par l’urbanisation reprend ses droits. Il est d’ailleurs sans rappeler que les oiseaux disparaissent à un rythme alarmant et que moins ils seront nombreux, plus la régulation naturelle sera complexe. Les travaux, dirigés par deux scientifiques du CNRS et un doctorant de l’Université de Montpellier, publiés dans PNAS ce 15 mai 2023, démontrent qu’il y a aujourd’hui 800 millions d’oiseaux en moins en Europe qu’il y a 40 ans. Le meilleur moyen de la conserver et de contrôler la biodiversité repose en partie sur la préservation des prédateurs.

L’initiative individuelle est aussi possible et facile à mettre en place. Les jardins, les zones résidentielles, les parcs ou terrains de jeux sont des terrains propices pour la mise en place de nichoirs, idéalement en mars, avant que les mésanges s’installent dans leur nid au début du printemps.

Chloe Droulez

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