Vendredi 17 novembre, Monsanto a été condamné par le tribunal de Jefferson City à verser plus de 1,5 milliards de dollars à trois Américains qui ont développé un cancer à la suite de l’utilisation du désherbant Roundup. Il s’agit d’une des plus importantes demandes de dommages et intérêts de l’année aux Etats-Unis.
Roundup, le glyphosate et les multiples poursuites contre le géant de la pétrochimie
L’ingrédient principal de la composition du Roundup est le glyphosate. Depuis le 20 mars 2015, il est placé par le Centre international de recherche sur le cancer comme « probablement cancérogène ».
En 2021, des chercheurs de l’INSERM considèrent que le « lien entre glyphosate et certaines pathologies ou problématiques est plus fort que ce que l’on pensait jusqu’ici ». Il est principalement commercialisé sous la marque Roundup.
En 2020, les affaires judiciaires contre le géant de l’agrochimie étaient d’ores-et déjà multiples. Pour mettre fin à ces poursuites, Monsanto annonce alors qu’il versera entre 10,1 et 10,9 milliards de dollars aux quelque 125 000 Américains ayant engagé une procédure contre le glyphosate. L’entreprise clôt ainsi 75 % des poursuites à son encontre.
Monsanto a été poursuivi pour d’autres produits toxiques. En 2022, après 13 ans de combat, l’agriculteur Paul François, intoxiqué à l’herbicide Lasso de Bayer-Monsanto, a pu obtenir gain de cause et recevoir un dédommagement de 11 135 euros.
Suite à cela, Paul François avait créé l’association Phyto-Victim pour aider d’autres agriculteurs intoxiqués à obtenir réparation, grâce au fond d’indemnisation des victimes professionnelles. En 2022, l’association a reçu 600 dossiers de demandes d’indemnisation.
Bayer a donc gagné plusieurs procès liés au Roundup, mais le jury a pu observer un lien récurrent entre le désherbant et le développement d’un lymphome non hodgkinien.
Le juge a ainsi accordé à chacune des victimes, James Draeger, Valerie Gunther et Dan Anderson des dommages-intérêts de 61,1 millions de dollars et 500 millions de dollars. Ces trois personnes ont développé un lymphome non hodgkinien et ont affirmé que le cancer était le résultat d’années d’utilisation du Roundup pour le jardinage.
Le traitement des pesticides en France
En janvier 2022, 5 ONGs ont attaqué en justice l’État français pour ses manquements dans la protection de l’environnement. Selon les associations, l’État français a rejeté la responsabilité de la régulation des pesticides sur l’Union européenne (par une absence de marge de manœuvres laissée aux États membres par celle-ci). Il a minimisé le rôle joué par les pesticides dans l’effondrement de la biodiversité.
En janvier 2023, Bayer-Monsanto, géant des pesticides, dépose une demande d’intervention aux côtés de l’Etat français au Tribunal Administratif de Paris, qui est acceptée.
Le 16 novembre 2023, la Commission européenne a ré-autorisé l’utilisation du glyphosate pour une période de 10 ans, signant une grande victoire pour les lobbies, et réaffirmant une position passive de l’État français, qui s’est abstenu pendant les deux votes des Etats membres.
Les interdictions des pesticides soulèvent toujours des débats intenses. L’un des arguments étant le poids socio-économique du secteur. Pourtant, selon l’Atlas des pesticides, en 2017, les bénéfices réalisés par l’industrie française des pesticides atteignent 200 millions d’euros, tandis que les coûts qui lui sont attribués s’élèvent à 372 millions d’euros. En France, les pesticides coûtent donc deux fois plus chers que ce qu’ils ne rapportent à la société.
Des avancées néanmoins subsistent : le 15 février, l’Anses a annoncé l’interdiction du S-métolachlore, troisième herbicide le plus utilisé en France. Depuis 2005, 2000 tonnes du produit étaient épandues chaque année. Après évaluation, les concentrations des trois métabolites métolachlore-ESA, métolachlore-OXA et métolachlore-NOA dans les eaux souterraines avaient été estimées supérieures à la limite de qualité fixée par la législation européenne en la matière.
A l’inverse, le Parlement européen a rejeté, mercredi 22 novembre, l’objectif de réduire de moitié l’utilisation des pesticides d’ici 2030 par rapport à la moyenne des années 2013 – 2017. Un regrettable retour en arrière alors que la santé environnementale et humaine est de plus en plus menacée par l’omniprésence de ces composants chimiques dans les écosystèmes.