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Pour protéger les loutres, ce couple a sanctuarisé leur zone humide pour 99 ans

« Nous avons des loutres, on les observe très régulièrement mais seulement grâce aux pièges photos. Comme c’est un animal qui a été pourchassé pendant des décennies, il est passé de nocturne à diurne pour fuir l’homme… Moi j’ai envie de vivre dans un monde de paix. Les animaux ont aussi le droit de vivre. Je considère que l’humain fait partie d’un tout et n’est en rien supérieur. Lorsqu’on aura compris qu’on n’est qu’un maillon de la chaîne et qu’on a tous besoin les uns des autres, tout ira mieux »

Pour protéger leur zone humide de 5 hectares et ses habitants, Jacques et Nathalie ont pris un engagement fort : une Obligation Réelle Environnementale. Signée avec la municipalité et l’ASPAS, elle protège leur lieu de toute intervention humaine pour que la nature s’épanouisse librement pendant au moins 99 ans.

Un haut lieu de biodiversité

D’emblée, Jacques Debuire nous raconte comment cette sensibilité si particulière au Vivant lui est venu.

« Parce que j’ai vécu au milieu du Sahara dans ma jeunesse, la vie m’a toujours émerveillée. Dans le désert, elle existe mais elle est rare. J’ai à chaque fois été émerveillé devant un bousier qui pousse une crotte ou une tarentule. Ce côté rare fait que quand on est en contact avec le Vivant, on en mesure l’importance » raconte-t-il pour La Relève et La Peste

Alors quand Jacques et sa compagne Nathalie Berail ont fait l’acquisition du Moulin de Charzay, ils se sont promis de tout faire pour protéger cet environnement exceptionnel. ​ Ce terrain de 5ha le long du cours d’eau de la Berlande, classé en zone Natura 2000, est constitué du cours d’eau lui-même, de ses rives végétalisées, d’une mosaïque de prairies naturelles éparses et d’une forêt alluviale discontinue de part et d’autre du cours d’eau.

La zone humide – Crédit : ASPAS

« De moins en moins nombreuses en France, les zones humides sont pourtant des réservoirs de biodiversité cruciaux pour les végétaux, la faune aquatique ou encore les oiseaux» explique Clémentine Azam, responsable du Pôle Milieux Naturels de l’ASPAS, pour La Relève et La Peste

C’est pourquoi on dénombre un cortège d’espèces animales et végétales ayant une grande valeur patrimoniale chez Nathalie et Jacques : Triton crêté, insectes en voie de disparition comme la lucane cerf-volant ou la rosalie des alpes, des poissons tels le chabot ou la lamproie de ruisseau, mais aussi des mammifères typiques comme le murin, le rhinolophe ou encore la loutre d’Europe…

Un martin pêcheur – Crédit : Jacques Debuire

« Face à ce que les scientifiques nous donnent comme info, avec la disparition de 70% des oiseaux, ce que je crains c’est que l’ordinaire aujourd’hui devienne exceptionnel demain. Je me suis dit qu’il était urgent de réserver au vivant un Havre de Vie Sauvage que j’appelle havre de paix » explique Jacques Debuire pour La Relève et La Peste

Le couple a donc décidé de contacter l’ASPAS et la municipalité pour mettre en place une Obligation Réelle Environnementale (ORE) qui leur permet de s’assurer de la pérennité de la protection de ce lieu, même après leur départ et leur mort, ou s’ils ont besoin de revendre le moulin.

Le Moulin de Charzay

Une ORE pour protéger le Vivant

« Comme tous les écosystèmes aquatiques de plaine, le corridor de la Berlande fait l’objet de plusieurs menaces : artificialisation agricole (cultures céréalières, populiculture) entrainant le rétrécissement de la forêt alluviale, pollutions (effluents domestiques ou agricoles) et prélèvements pour l’irrigation susceptibles d’altérer la qualité physico-chimique et le régime hydraulique et thermique » précise Clémentine Azam pour La Relève et La Peste

Après plusieurs phases d’échanges et de cartographie du terrain, l’ORE a été signée entre les propriétaires, l’ASPAS et la municipalité de Melle. La commune s’engage à inscrire cet espace dans son PLU et ceux futurs, y compris en cas de changement du conseil municipal, pour les 99 prochaines années, avec possible reconduction.

Le Havre de Vie Sauvage mis en place avec l’ASPAS

« Avec ce tout premier Havre de Vie Sauvage, l’ASPAS s’engage à accompagner Jacques et Nathalie dans la gestion du site au fil du temps. Le lieu sera en libre-évolution ce qui veut dire : pas de coupes de bois, pas d’animaux domestiques, pas de feux, etc. Il y a toujours un sentier pour déambuler à l’intérieur mais de façon contemplative, sans activités impactantes pour le milieu. Un des bénévoles référents de la réserve va effectuer des patrouilles régulières pour s’assurer qu’il n’y a pas de braconnage ou de destruction » détaille Clémentine Azam pour La Relève et La Peste

Et aussi, pas de chasse ! C’est parce que le conseil municipal de Melle avait voté l’interdiction de la destruction des espèces dites « nuisibles », qui avait été refusée par la Préfète des Deux-Sèvres, que Jacques a souhaité associer la municipalité à sa démarche. Il a ainsi pu en finir avec les chasseurs venant déterrer les blaireaux et renards de leurs terriers, à seulement 150m de leur domicile.

« Nous avons des loutres, on les observe très régulièrement mais seulement grâce aux pièges photos. Comme c’est un animal qui a été pourchassé pendant des décennies, il est passé de diurne à nocturne pour fuir l’homme… Moi j’ai envie de vivre dans un monde de paix. Les animaux ont aussi le droit de vivre. Je considère que l’humain fait partie d’un tout et n’est en rien supérieur. Lorsqu’on aura compris qu’on n’est qu’un maillon de la chaîne et qu’on a tous besoin les uns des autres, tout ira mieux » espère Jacques auprès de La Relève et La Peste

Nathalie et Jacques sur leur propriété

Comme tout prédateur, la loutre a un rôle crucial pour réguler les écosystèmes, notamment quand les écrevisses de Louisiane envahissent certaines rivières. Jacques et Nathalie partagent régulièrement leur démarche en accueillant des visiteurs dans leur moulin transformé en gîte. Ils leur apprennent à reconnaître l’alouette, le loriot et de nombreux autres oiseaux. Pour eux, l’idée est aussi de donner envie à d’autres de mettre en place une ORE pour protéger plus d’espaces naturels.

S’ils restent humbles, en précisant que leur terrain « n’est qu’un confetti » sur le territoire, les zones humides sont pourtant de véritables atouts pour s’adapter au changement climatique et lutter contre les inondations.

« Les zones humides jouent un rôle de purification de l’eau. Elles filtrent les pollutions biologique ou chimiques. Elles ont aussi un rôle de tampon qui stocke le trop d’eau pour la restituer petit à petit en période de sécheresse. Ce sont également des puits de carbone importants » énonce Clémentine Azam pour La Relève et La Peste

Jacques, lui, en est convaincu : « Avec cette ORE, je prends ma responsabilité vis-à-vis des générations futures de faire les choses pour limiter les dégâts. Cela ne se limite pas à cela, mais c’est une façon concrète d’agir »

Laurie Debove

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