Depuis le 1er janvier 2023, l’eau lyonnaise est désormais sous régie publique, après 30 ans de gestion privée. Cette décision fait suite à un processus complexe de deux ans, accompagné de nombreuses négociations sociales, pour parvenir à intégrer tous les métiers liés à la distribution de l’eau, dont les effets seront longs à concrétiser. Elle représente néanmoins un pas énorme pour la protection d’une ressource essentielle, trop souvent appropriée illégalement par une poignée d’acteurs et d’entreprises privées, qui perpétuent également sa pollution.
D’après France3 Régions, auparavant, la multinationale française Veolia percevait un pourcentage sur la facture d’eau des lyonnais. Le passage en régie publique était une promesse de campagne des écologistes afin de reprendre la maîtrise technique et économique d’un bien commun.
Anne Grosperrin, vice-présidente chargée du cycle de l’eau à la métropole de Lyon, prend pour exemple le Grand Paris dans sa gestion de l’eau, qui a créé sa régie publique en 2009. En un an, le changement a permis à la métropole une économie de 35 millions d’euros, qu’ils ont réinvesti dans le service. L’élue souhaite atteindre des seuils similaires :
« Cet argent sera utilisé pour améliorer le réseau ou encore réduire les taux de fuite. »
A Paris, la facture s’est stabilisée, et un plan d’aide agricole a également été mis en place en 2020, afin de subventionner les agriculteurs et les aider à passer à un système biologique, pour permettre une meilleure qualité d’eau issue des nappes phréatiques.
Les services publics jouent un rôle essentiel dans l’atténuation du réchauffement climatique, permettant une eau propre et de bonne qualité, à une échelle de compétence que les entreprises d’embouteillage ne possèdent pas.
Les entreprises d’embouteillage habituent non seulement les clients à l’eau en bouteille, qui perpétue la pollution, mais sont aussi à l’origine de pompages illégaux, tel que Nestlé Waters qui a pompé illégalement plus de 10 milliards de litres d’eau entre 2007 et 2020.
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Les régies publiques permettent d’avoir un prix de l’eau moins cher, qui correspond aux coûts du service, sans marge de frais de rémunération des actionnaires d’entreprise privée.
En interne, le changement provoque des bouleversements : les 280 agents qui travaillaient pour Veolia vont devoir être intégrés à la métropole. Le prix du mètre-cube n’a cependant pas augmenté pour les usagers, et la métropole lyonnaise compte instaurer une tarification sociale et environnementale qui offrirait aux plus démunis leurs premiers premiers mètres cubes gratuits. Mais la nouvelle grille de tarification n’arrivera pas avant 2024, après consultation auprès des usagers.
L’opposition estime pour sa part que le projet a été organisé trop rapidement et qu’à terme il risque de coûter cher aux usagers. Louis Pelaez, du groupe d’opposition centriste “Inventer la métropole de demain” exprime avoir des craintes pour l’avenir :
« Par exemple que ce ne soit pas efficace ou en tout cas pas plus efficace que ce qui se faisait avant. On craint aussi que cela coûte cher en investissement et que finalement il n’y ait pas de modification sur le prix alors que c’était une promesse […] Pour le moment on n’est que dans de la communication »
Le mardi 7 décembre, Anne Grosperrin soulignait dans une conférence de presse l’importance de l’assainissement de l’eau dans le contexte du réchauffement climatique :
« La diversification de nos sources en eau est essentielle. Selon les perspectives, le débit du Rhône pourrait diminuer de 10 à 40 % d’ici 2050. L’apport via la fonte glaciaire des Alpes est prévu pour 2070. Et la nappe phréatique de l’Est Lyonnais est fortement polluée aux herbicides notamment. »
Dans ce cadre, la métropole souhaite fixer un cadre global à la gestion des ressources en eau dans l’agglomération lyonnaise. Selon le site d’information Rue89, pour ce faire, elle compte mener des actions en matière de préservation, de diversification et des sources d’eau, et pourra sanctuariser des zones d’espace naturels, favoriser l’implantation d’exploitation en agriculture biologique, et soutenir une meilleure imperméabilisation des sols pour une bonne infiltration des pluies vers les nappes phréatiques.
La métropole annonce ainsi le lancement d’études pour des captations dans le lac des Eaux-Bleues à Miribel ou dans la Saône.