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Le lobby de la chasse veut tirer sur sept espèces d’oiseaux migrateurs en grave déclin

« Les réductions de prélèvements exigées par la Commission européenne sont devenues de simples quotas individuels grotesques, fixés sans justification scientifique à 25 canards ou 15 cailles par chasseur et par jour », dénonce la LPO.

Un projet d’arrêté visant à protéger sept espèces d’oiseaux en déclin a été vidé de sa substance sous la pression des lobbies de la chasse. La Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) appelle à se saisir de la consultation publique pour se mobiliser.

Tir ouverts sur des oiseaux en déclin

« La Commission européenne a demandé en novembre 2024, puis rappelé le 30 juin 2025 à la France de prendre des dispositions immédiates, applicables dès la prochaine saison de chasse qui débute en août 2025, pour protéger sept espèces d’oiseaux dont les populations s’effondrent à l’échelle européenne », explique la LPO.

Pour émettre ces préconisations, la Commission européenne s’est appuyée sur l’état de conservation des oiseaux réalisé au titre des directives européennes Oiseaux et Habitats et du travail d’un consortium de chercheurs européens.

« Des suspensions de chasse temporaires sont ainsi recommandées pour le fuligule milouin (- 30 % des effectifs en 16 ans), canard siffleur (-50 % en 12 ans), caille des blés (- 25 % en 10 ans) et grive mauvis (- 1 9 % en 10 ans) ; ainsi qu’une réduction de moitié des prélèvements pour le canard pilet (- 34 % des effectifs en 17 ans), canard souchet (- 19 % en 14 ans) et sarcelle d’hiver (- 21 % en 13 ans) », liste la LPO dans un communiqué.

Le ministère de la Transition écologique, en charge de la chasse, a rédigé un premier projet d’arrêté, respectant en partie ces exigences. Ce texte devait être soumis le 26 juin au Conseil national de la chasse et de la faune sauvage (CNCFS), un groupe consultatif constitué notamment de représentants de chasseurs, de la biodiversité, de scientifiques et d’associations. Cette réunion n’a pas eu lieu, boycottée par les représentants des chasseurs.

La LPO dénonce également des intimidations envers la ministre de la Transition écologique. Une nouvelle version du texte a alors été proposée. « La Fédération nationale des chasseurs (FNC) et ses soutiens politiques ont obtenu une complète réécriture du projet d’arrêté », déplore l’association.

Méconnaissance de la biologie des oiseaux

La version initiale faisait notamment mention « d’une réduction de la période de chasse, en enlevant le mois de janvier, ce qui permettait de pérenniser le stock d’individus qui a passé l’hiver et qui est à même de se reproduire », rapporte Gwenaël Quaintenne du service Connaissance du pôle Protection de la nature de la LPO, pour La Relève et La Peste. Un moratoire de trois ans pour le fuligule milouin était même prévu.

La version revisitée et validée le 16 juillet par le CNCFS est loin d’être satisfaisante. « Les réductions de prélèvements exigées par la Commission européenne sont devenues de simples quotas individuels grotesques, fixés sans justification scientifique à 25 canards ou 15 cailles par chasseur et par jour », dénonce la LPO.

« Avec cet arrêté, la France ne se met pas du tout en conformité avec les exigences européennes », estime Gwenaël Quaintenne, qui dénonce des mesures symboliques, sans efficacité biologique réelle.

« Notre position à la LPO va plus loin que celle de la Commission européenne. Pour nous, il n’est pas pensable de chasser une espèce en mauvais état de conservation », précise-t-elle. « Si une espèce décline, on pose le fusil et on ne la chasse pas. »

Alors que la version définitive de l’arrêté devrait être connue rapidement après la consultation publique, qui se termine le 14 août, la LPO envisage d’attaquer l’arrêté si celui-ci ne respecte pas la directive européenne portant sur les oiseaux, en saisissant le Conseil d’État. « Il s’agit vraiment de faire respecter le droit », souligne Gwenaël Quaintenne.

Selon elle, une meilleure communication de la part de la Commission européenne aurait pu contribuer à mieux faire comprendre ses exigences.

« La préservation de nos populations d’oiseaux sauvages soulève des questions de biologie pas toujours bien comprises. Par exemple, les chasseurs vont voir des espèces progresser dans certaines aires de répartition en hiver, mais en fait elles déclinent au niveau de leur zone de reproduction. Il y a des phénomènes de redistribution assez complexes », explique-t-elle.

Un manque de contrôle de la chasse

Parmi les sept espèces ciblées par ce projet d’arrêté, certaines, comme le canard souchet, vivent dans des zones humides, où la chasse au plomb est interdite au sein des États membres de l’Union européenne depuis février 2023.

« Globalement, les espaces protégés sont souvent encerclés de zones de chasse et les périodes de chasse ne sont pas toujours respectées », déplore Gwenaël Quaintenne. « Les agents de l’Office français de la biodiversité (OFB) sont de moins en moins nombreux pour contrôler la chasse et leur pouvoir a été diminué. »

Alors que la France – pourtant tristement championne en termes de nombre d’espèces en mauvais état de conservation chassées – n’a pas rapporté ces tableaux de chasse depuis 2013-2014, Gwenaël Quaintenne estime que « la France pourrait faire beaucoup plus d’efforts ».

 

Charlene Catalifaud

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