Un décret gouvernemental veut étendre la période de chasse du cerf élaphe dès le 1er juin au prétexte d’une surpopulation dangereuse pour la régénération des forêts. Ce décret suscite une levée de bouclier des associations de défense de l'environnement. En ligne, la consultation publique mise en place a déjà reçu des milliers d’avis défavorables au projet.
En France, la chasse au cerf élaphe, considéré comme le plus grand d’Europe, est uniquement autorisée du 1er septembre au dernier jour de février. Il y a un mois, suite à l’examen favorable du Conseil national de la chasse et de la faune sauvage, le gouvernement a lancé une consultation publique concernant un projet de décret qui pourrait permettre aux chasseurs de chasser ce cervidé dès le 1er juin. Cela prolongerait la période de chasse à neuf mois par an, contre six actuellement.
En cause : l’abroutissement des cerfs qui impacterait la régénération des forêts. Le décret est ainsi soutenu par l’Office National des Forêts (ONF) pour qui plus de 50% des surfaces des forêts domaniales, appartenant à l’Etat, sont en situation de déséquilibre forêt-ongulés à cause d’une surpopulation de cerfs, chevreuils, biches, sangliers…
« La situation varie selon les territoires », nuance Ludovic Lanzillo, expert national chasse, pêche et équilibre forêt-ongulés à l’ONF. Les régions Grand Est, Hauts-de-France et Bourgogne-Franche-Comté sont les plus concernées, contrairement aux forêts d’Auvergne, de Lozère, du Limousin ou du Sud-Ouest plus épargnées.
Le cerf occupait plus de 49% des surfaces boisées en 2019 contre 25% en 1985, selon l’Office français de la biodiversité (OFB). L’ONF estime qu’il doit dépenser chaque année 15 millions d’euros en opérations de protection des semis et des jeunes plants, ainsi que pour replanter.
Pour les associations de défense de l’environnement, l’extension de la chasse aux cerfs serait trop brutale pour l’espèce, alors que les biches donnent naissance à leurs faons au mois de juin.
« Chasser les cerfs à partir de juin va conduire à tuer des femelles gestantes ou pire, tuer des biches accompagnées de leurs petits, qui sont incapables de survivre sans leur mère » précise France Nature Environnement.
Cette période est également sensible pour d’autres espèces de mammifères et d’oiseaux, qui seront en pleine saison de reproduction. De surcroît, les promeneurs en forêt sont plus nombreux l’été, ce qui fait courir des risques non-négligeables d’accidents de chasse.
« Si l’objectif est réellement de réguler les populations d’ongulés afin de limiter les dégâts forestiers et agricoles, pourquoi freiner en parallèle l’expansion du loup sur le territoire ? » s’interroge de son côté la LPO.
Lors de la dernière saison cynégétique 2023-2024, 87 802 cerfs élaphes ont été déclarés abattus en France, alors que le quota annuel autorisé était de 121 733, soit un taux de réalisation de 72%. Pour cause, l’abattage des cervidés met parfois en danger les populations, comme dans le Haut-Rhin où les chasseurs refusent d’éradiquer les cerfs, ou dans l’Oise où les grands cerfs ne se comptent plus que sur les doigts d’une main.
Surtout, le gouvernement français continue de soutenir financièrement les coupes rases, suite auxquelles sont menées les fameuses plantations de remplacement mangées par les ongulés. De même, le dérèglement climatique reste le facteur majeur de dépérissement des forêts françaises.
Participer à la consultation publique : ici.