Une étude parue dans la revue scientifique New Phytologist le 20 décembre 2023, démontre que certaines plantes à fleurs tendent à s’affranchir des pollinisateurs. A cause des changements environnementaux, elles évoluent vers l’autofécondation, ce qui pourrait aggraver le déclin des insectes. Un cercle vicieux délétère pour nos cultures agricoles.
Les conséquences de l’autofécondation
Des scientifiques du CNRS et de l’Université de Montpellier ont utilisé une méthode de résurrection, qui consiste à développer une espèce à partir d’un état antérieur, et de la comparer avec ses descendants.
L’équipe de recherche a pour cela utilisé des fleurs de pensée des champs poussant en région parisienne (un lieu actuellement faible en pollinisateurs), et des fleurs de pensée de même localité ressuscitées à partir de graines collectées entre 1990 et 2000.
Selon les analyses génétiques, l’autofécondation a augmenté de 27 % durant les trois dernières décennies. Les fleurs des champs d’aujourd’hui sont 10 % plus petites, produisent 20 % moins de nectar et sont moins visitées par les pollinisateurs que leurs ancêtres.
En parallèle, durant ces décennies, les chercheurs ont noté un déclin des interactions entre ces plantes et les pollinisateurs. Ces évolutions rapides sont donc estimées être liées au déclin des populations de pollinisateurs.
L’étude met en lumière un cercle vicieux : le déclin des pollinisateurs entraîne la réduction de la production de nectar par les fleurs, ce qui pourrait aggraver le déclin des insectes.
Les déclins immenses des pollinisateurs
Selon les évaluations de la Liste rouge pour l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), 16,5 % des pollinisateurs vertébrés sont menacés d’extinction au niveau mondial, tandis que 37 à 40 % des abeilles sont menacées.
90 % des plantes sauvages à fleur dépendent du transfert de pollen par les animaux. Le rendement et la qualité des cultures dépendent de la diversité des pollinisateurs. Or, leur diversité est en déclin.
Les pesticides et insecticides ont des effets létaux sur les abeilles, tandis que l’élevage de masse et le transport à grande échelle de pollinisateurs peuvent encourager la distribution d’agents pathogènes ou de parasites, tels que le varroa, qui décime les ruches.
Un apiculteur avec quarante ans de métier derrière lui s’est retrouvé à des dégâts liés au varroa. Il a repensé à son expérience d’antan, et cherché à reproduire des conditions climatiques similaires. Il a fait hiverner artificiellement ses abeilles dans sa cave. Résultat : toutes ses colonies ont survécu.
Cela prouve que les idées et pratiques fondées sur les savoirs autochtones et locaux, en alliance avec la science, constituent la solution pour faire face au réchauffement climatique et ses conséquences.
Sources : « Ongoing convergent evolution of a selfing syndrome threatens plant-pollinator interactions », New Physiologist, 20/12/23 / « Rapport d’évaluation sur les pollinisateurs, la pollinisation et la production alimentaire », Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques, 2016