Jeudi 19 juin, treize personnes seront jugées pour leur participation à un trafic international d’oiseaux protégés. Parmi les prévenus, des figures notoires de la préservation de la biodiversité, accusées d’avoir organisé un système minutieux de capture illégale et de “blanchiment” d’espèces sauvages.
Des trafiquants grimés en protecteurs de l’environnement
Pendant des années, ils ont sévi sur les écosystèmes du Sud-Ouest et développé un réseau, dont les ramifications s’étendaient jusqu’à la Belgique et aux Pays-Bas. Ce jeudi, les treize prévenus comparaîtront devant le tribunal correctionnel de Cahors pour leur rôle dans un trafic international d’oiseaux protégés. Parmi eux, une personne morale sera jugée : le Parc animalier des Pyrénées d’Argelès-Gazost.
Un réseau d’une ampleur particulièrement importante, impliquant des captures illégales et des “blanchiments” d’animaux sauvages pour alimenter un trafic lucratif.
On estime à plusieurs milliers le nombre d’oiseaux piégés illégalement. Au total, ce ne sont pas moins de 500 espèces qui ont été impactées par ces vols, parmi lesquelles on retrouve des rossignols du Japon, des verdiers ou des chardonnerets, espèce particulièrement prisée des braconniers. Ce chiffre pourrait en réalité être bien plus élevé, il s’agit là d’une fourchette basse des estimations de l’Office Français de la Biodiversité (OFB).
Sur le banc des accusés, certains noms ont de quoi interroger : le fondateur du Parc animalier des Pyrénées, Serge Mounard, réputé pour son engagement public en faveur de la faune, un ornithologue de renom, ancien collaborateur du Muséum d’histoire naturelle, ou encore un éleveur belge à la tête d’une oisellerie. Tous sont poursuivis pour trafic d’espèces protégées, recel, détention, capture, vente et destruction illégale d’animaux sauvages. Au vu du nombre d’infractions commises, les prévenus encourent chacun plus de 100 000 euros d’amende.
Le trafic d’espèces sauvages, un fléau qui prospère
C’est avec une méthode bien rodée que ces personnes ont pu développer leur trafic pendant des années. Les oiseaux étaient capturés dans la nature, souvent dans le Sud-Ouest, puis « blanchis » en leur posant des bagues réglementaires, en leur implantant des puces provenant d’animaux morts, et en falsifiant des documents afin de leur donner une apparence légale.
Pour le Parc animalier des Pyrénées, l’objectif est de faire passer ces spécimens sauvages – achetés illégalement – pour des individus élevés en captivité, afin d’être présentés au public et de générer des profits par ce biais. Une fraude minutieusement organisée, à laquelle participaient des acteurs parfaitement informés de la législation sur la faune protégée.
Le trafic, révélé après trois années d’enquête par la gendarmerie du Lot – initiée par un signalement anonyme –, aurait généré des dizaines de milliers d’euros. Un commerce parallèle lucratif, organisé entre passionnés et professionnels du secteur animalier, au mépris total des principes de protection et de préservation.
« Ce type de dossier nous montre que sans l’OFB, et les années d’enquête qu’ils ont réalisées, ce trafic n’aurait jamais été démantelé », précise Anne Roque, juriste chez France Nature Environnement, à La Relève et La Peste. « C’est le plus gros trafic en matière d’oiseaux protégés qu’on ait jamais eu à traiter. »
Alors que les espèces protégées disparaissent à un rythme alarmant et que les oiseaux comptent parmi les premières victimes des activités humaines et du dérèglement climatique, le braconnage – pratique malheureusement prospère en France – exacerbe une menace déjà critique pour des espèces protégées, parfois même en voie d’extinction.