Vous cherchez un média alternatif ? Un média engagé sur l'écologie et l'environnement ? La Relève et la Peste est un média indépendant, sans actionnaire et sans pub.

Green Dock, un entrepôt logistique XXL de 600m de long, menace une réserve ornithologique en Ile-de-France

« Les entrepôts XXL comme Green Dock représentent un monde dont nous ne voulons plus. Ce monde des grands entrepôts, c'est celui de la course à la consommation et celui qui épuise les travailleurs »

Prévu à l'horizon 2027 sur le port fluvial de Gennevilliers, le projet d'entrepôt logistique porté par Haropa Port et le promoteur australien Goodman suscite une forte opposition de la part d'associations et citoyens déterminés à lutter contre tous les projets « écocidaires et inutiles ».

Green Dock, un entrepôt logistique XXL

A Gennevilliers (Haut-de-Seine), en banlieue parisienne, les manifestants s’amoncellent à vitesse grand V sur les marches du parvis de la mairie en ce samedi 25 mai. Au nombre de 2000, selon les organisateurs, tous ont répondu présents à l’appel d’associations locales, de préservation de l’environnement et des Soulèvements de la terre pour manifester leur opposition à « Green Dock », un projet d’entrepôt logistique XXL prévu à l’horizon 2027 sur le port fluvial de Gennevilliers, en face d’une réserve ornithologique.

Porté par Haropa Port, établissement public en charge des ports de l’axe Seine (Paris, Rouen, Le Havre), et mis en œuvre par le promoteur australien Goodman, ce projet d’entrepôt, dont le coût est estimé à 150 millions d’euros, a pour objectif de servir de « pôle de transit des marchandises à destination de l’Île-de-France », explique Goodman via le site internet dédié au projet.

Pour ce faire, le promoteur australien prévoit de réhabiliter une ancienne friche de 6,5 hectares, afin d’en faire une plateforme dite multi-modale, de 600 mètres de long (soit l’équivalent de deux stades de France) pour 30 mètres de haut et 90 000 m2 d’entrepôt.

Un projet « vert »

Un projet pharaonique, que Goodman assure respectueux de l’environnement d’où, d’ailleurs, le nom – « Green Dock » – du projet. Rassemblant dans un même lieu les fonctions logistiques d’approvisionnement, de stockage, de préparation et de distribution, le projet « participe à la réduction de l’emprise foncière », assure le promoteur australien, qui souligne également le fait que grâce à la réhabilitation d’une friche désaffectée, le projet contribue « à limiter l’artificialisation de sols naturels ».

Un atout majeur, assure-t-il, alors que, dans le cadre de la loi Climat et résilience, la France s’est fixée l’objectif d’atteindre le « zéro artificialisation nette des sols » d’ici 2050.

Sans compter que le projet a été pensé « pour minimiser les émissions de CO2, tant lors de sa construction que de son exploitation », continue Goodman, qui détaille notamment que, « grâce à une centrale photovoltaïque d’une puissance de 2,7 MWc, Green Dock sera autonome énergétiquement ».

Et de rappeler que le transport fluvial, inhérent au projet, constitue une alternative « au tout routier et divis[e] par quatre les émissions de CO2 pour chaque tonne transportée ». Un projet qui préfigurerait donc, selon le promoteur, « l’entrepôt logistique de demain : vertical, (…), autosuffisant, énergétiquement et intégré dans son environnement ».

Green Dock, du greenwashing ?

Des arguments pourtant loin de convaincre les opposants au projet, nombreux à prendre la parole en amont de la manifestation, à l’image de Marine Tondelier, secrétaire nationale d’Europe Écologie – Les Verts, et Eric Coquerel, député de La France Insoumise (LFI).

« Les entrepôts XXL comme Green Dock représentent un monde dont nous ne voulons plus, assène le député insoumis devant un parterre de manifestants flanqués de pancartes « Stop Green Dock ». Ce monde des grands entrepôts, c’est celui de la course à la consommation et celui qui épuise les travailleurs », continue-t-il, avant d’exhorter Patrice Leclerc, maire communiste de Gennevilliers et favorable au projet, à refuser de signer le permis de construire.

Des propos corroborés par deux syndicalistes CGT d’Épinay-sur-Seine et Gennevilliers, venus témoigner de l’importance de renforcer les alliances entre luttes sociales et luttes écologistes.

« Green Dock, c’est le symptôme du capitalisme mondialisé qui épuise les salariés comme la nature », invectivent-ils, tandis que, divisée en trois cortèges – les grands cormorans, les ronces et les lézards des murailles –, la manifestation s’élance en direction de la mairie de l’Île-Saint-Denis, allant ainsi « d’une mairie qui soutient le projet, à une mairie qui s’y oppose ».

Eric Coquerel dénonce les impacts de la future plateforme logistique

La biodiversité menacée

Passées les écharpes tricolores des quelques élus présents, dans les rangs de la manifestation, on retrouve surtout les membres des très nombreux collectifs venus apporter leur soutien à la lutte contre Green Dock, parmi lesquels le collectif Méga Canal Non Merci, engagé contre le projet du canal Seine-Nord Europe, la coalition de La Déroute des routes, qui se bat à travers la France pour des alternatives au tout-routier, le Collectif Vivre sans Bip, qui s’oppose au projet de 2×2 voies dans le Val-d’Oise, ou encore le Collectif pour le Triangle de Gonesse, qui lutte de longue date pour la sauvegarde des terres agricoles dans le Val-d’Oise.

« On se bat contre tous les grands projets inutiles et imposés, explique Bernard Loup, président du Collectif pour le Triangle de Gonesse pour La Relève et La Peste. Ça nous semblait évident de venir apporter notre soutien ».

Un peu plus loin dans le cortège, un masque de cormoran sur le visage, Juliette* se réjouit de cette mobilisation massive contre Green Dock, elle qui s’inquiète particulièrement de l’impact que va avoir le projet sur la préservation de la biodiversité.

« La pointe de l’Île-Saint-Denis, voisine du projet de Green Dock, est classée Zone Natura 2000, entame la militante pour La Relève et La Peste. C’est une zone refuge pour des espèces comme les martin-pêcheurs, les faucons crécerelles ou les bergeronnettes des ruisseaux. Avec les nuisances sonores engendrées par le bâtiment, et l’ombre qu’il risque de projeter sur l’île, les oiseaux vont forcément être impactés », déplore-t-elle.

La prédominance du trafic routier

Des inquiétudes partagées par de nombreux manifestants, qui fustigent également la qualification de « multimodal » de ce projet qu’ils considèrent avant tout comme routier.

« La majorité des marchandises va être acheminée en transport routier, explique Cabri*, membre du comité Paris Nord des Soulèvements de la terre, pour La Relève et La Peste. Le projet va donc amener énormément de trafic, alors qu’ici, c’est le seul endroit où on peut respirer. D’ailleurs, on en parle peu, mais le fret ferroviaire est vraiment le grand absent de ce projet », continue l’habitante de l’Île-Saint-Denis.

Aux abords du parc des Chanteraines, l’un des cortèges tente de dévier de la trajectoire de la manifestation pour traverser le parc et s’introduire dans la zone logistique du port de Gennevilliers, où se trouvent des entreprises comme Carrefour et Mondial Relay.

« C’est par ici pour une balade contre l’empire logistique », entend-on depuis un mégaphone. Rapidement interceptés par les forces de l’ordre, une cinquantaine de manifestants sont interpellés puis placés en garde à vue, tandis qu’une médic, blessée, est transportée à l’hôpital. Depuis l’extérieur du parc, certains manifestent se mettent à scander « la police, doucement, on fait ça pour vos enfants ».

« La lutte peut être victorieuse »

Une altercation qui n’a pas pour autant entamé la détermination des manifestant à rejoindre le parc de l’Île-Saint-Denis, point d’arrivée prévue de la manifestation. Là, la fatigue se fait ressentir. La joie, aussi, alors que des petits groupes se forment pour faire le bilan de la journée.

« Le problème des projets comme Green Dock, c’est leur finalité, qui pousse à toujours plus de consommation, lâche un manifestant. C’est ce système global qu’il faut réussir à combattre. »

Pour l’heure, le projet de Green Dock doit encore être soumis à une enquête publique. « La lutte peut être victorieuse, donc on ne va rien lâcher », sourit Cabri*, tandis que de leur côté, les organisateurs se disent prêts à se « donner les moyens d’empêcher concrètement la construction de l’entrepôt si ce projet n’est pas rapidement abandonné ».

* Les prénoms ont été modifiés.

Cecile Massin

Faire un don
"Le plus souvent, les gens renoncent à leur pouvoir car ils pensent qu'il n'en ont pas"

Votre soutien compte plus que tout

Animal, un nouveau livre puissant qui va vous émerveiller 🐺

Notre livre Animal vous invite à vous émerveiller face à la beauté du peuple animal. Des dernières découvertes scientifiques sur le génie animal jusqu’au rôle primordial de chaque espèce qui peuple notre terre, notre livre vous plonge au cœur du monde animal et vous invite à retrouver votre instinct.

Après une année de travail, nous avons réalisé l’un des plus beaux ouvrages tant sur le fond que sur la forme.

Articles sur le même thème

Revenir au thème

Pour vous informer librement, faites partie de nos 80 000 abonnés.
Deux emails par semaine.

Conçu pour vous éveiller et vous donner les clés pour agir au quotidien.

Les informations recueillies sont confidentielles et conservées en toute sécurité. Désabonnez-vous rapidement.

^