Ni campagne, ni débat, ni interview ! Si on veut connaître le programme du Président candidat Emmanuel Macron, il faut faire un tour sur Instagram, TikTok, Twitter ou Youtube. Sur cette dernière plateforme, un épisode de la série Emmanuel Macron, le Candidat est publié chaque vendredi depuis trois semaines. Utiliser la communication de l’Élysée et les réseaux sociaux comme support de communication, contrôler les médias, éviter le débat et la critique pour ne pas se mettre en porte à faux. En fin de compte, se dédouaner des principes mêmes de la démocratie, plongée au cœur de la communication sous la Macronie. Un décryptage de Florian Grenon.
Ni campagne, ni débat pour 2022
Nicolas Dupont-Aignan dénonçait jeudi une élection « truquée », sans « débat », ni « campagne ». « On est en train de voler l’élection aux français » avait-il conclu. Et pour cause, Emmanuel Macron refuse catégoriquement de débattre avec les autres candidats avant le premier tour. BFMTV a bien tenté d’en organiser un, mais le président n’a pas souhaité s’y rendre. En apprenant cela, Marine Le Pen a également décommandé sa venue. La chaîne d’info en continu a donc annulé l’émission.
A quoi bon débattre ? Emmanuel Macron et Marine Le Pen sont les favoris dans les sondages, ils se posent en homme et femme providentiels, en incarnation du nouveau clivage mondialistes contre nationalistes, ils ont tout à perdre. Lors d’un débat, les critiques se tourneraient vers eux, les autres candidats tentant de leur subtiliser des électeurs.
D’ailleurs, depuis 1965, la totalité des présidents sortants ont refusé de participer à un débat avant le premier tour.
Lors de sa déclaration de campagne, Emmanuel Macron a soigneusement évité tout dialogue et toute question des journalistes. Le président et ses équipes ont simplement envoyé une lettre aux journaux de la PQR, presse quotidienne et régionale. Il n’y a pas eu de conférence de presse. Interrogé dans le cadre de notre article, l’essayiste et analyste politique Mathieu Slama explique que « c’est une méthode très verticale, très autoritaire. »
Comment faire campagne sans passer par la presse ? Depuis quelques années la politique bascule, elle aussi, dans « la société du spectacle », la « polémique constante », la « polarisation » sur les réseaux sociaux.
Plus besoin de se frotter aux médias, bienvenue dans la politique en mode “série Netflix ». Cette pratique venue tout droit des Etats-Unis n’a pas échappé à Emmanuel Macron. Chaque vendredi depuis trois semaines, le président candidat publie un mini-film sur sa chaîne Youtube.
Cette série est réalisée par des équipes issues de la télévision qui reprennent les codes cinématographiques des séries, très scénarisées. Les mini-films sont mis en ligne à une heure précise, 18h pile, ce qui incite les chaînes d’info en continu à les diffuser en direct. Rien n’est laissé au hasard. Par instant, Emmanuel Macron est filmé de dos, sur un fond musical apportant un certain suspense. Une mise en scène qui n’est pas sans rappeler la série Baron Noir. C’est de la communication « feel good », de « l’entertainment news ».
Selon Mathieu Slama « c’est typiquement ce que proposerait une agence de com à une entreprise, faire des petits feuilletons sur la vie de l’entreprise, sur tel aspect de son business. On est à la frontière entre la com’ et la propagande. C’est dépolitisé tout en étant politique, donc cela brouille le message, il y a une forme de manipulation et de déloyauté dans la communication. »
Lundi 7 mars, lors d’un « débat » organisé à Poissy et présidé par Karl Olive, maire de la ville et ami d’Emmanuel Macron, quelque 250 français étaient invités à poser des questions au président. Un débat qui se voulait « sincère, spontané ». C’est d’ailleurs ce que confirme Karl Olive dès les premiers instants de l’évènement en s’adressant à Emmanuel Macron :
« Vous m’avez dit : totale confiance, pas de thématique imposée, je veux taper dans le sac, je veux pouvoir confronter mes idées avec les Français ».
Seulement, FranceInter a récupéré les fiches utilisées par le maire de Poissy durant le débat. Chacune contenait les informations et les questions préalablement écrites posées par les citoyens choisis pour intervenir. Il n’y a donc pas eu de débat, l’Élysée, Emmanuel Macron et Karl Olive ont délibérément menti.
« Tout est maîtrisé, tout est contrôlé pour éviter la moindre gaffe » insiste Mathieu Slama.
Le « cynisme » sur la récupération de la crise ukrainienne
Depuis le début de l’invasion russe en Ukraine, Emmanuel Macron joue avec les mêmes codes que lors de la crise Covid. Il se place en « homme d’État ». La guerre lui permet de dire qu’il n’y a « plus de place pour le dialogue, le débat », il faut que les français « rangent leurs opinions contraires » et qu’ils le « soutiennent ». « La crise c’est le meilleur moment pour dépolitiser les choses » selon Mathieu Slama.
Cette guerre est une aubaine pour le président puisqu’elle valide les politiques qu’il promeut depuis 2017 : la souveraineté européenne, l’affirmation de l’Europe-puissance et le renforcement de ses capacités de défense. Il a fortement insisté sur ces thématiques durant son allocution sur l’invasion russe en Ukraine le 2 mars dernier.
Ce qui fait dire à Mathieu Slama que « la dépolitisation et la communication de crise qui place le président en homme providentiel, en leader de français, c’est comme ça que le Macronisme gagne. Il détruit tout débat public, c’est très déloyal, parce que cela confisque l’élection d’une part, et d’autre part cela installe l’idée qu’il n’y a pas d’alternative à sa politique ».
Sa communication de crise est d’ailleurs « allée trop loin », jusqu’à la nausée, lorsqu’il s’est déguisé en président de guerre, mimant le sweat militaire et la barbe de trois jours de Zelensky sur des photos postées sur ses réseaux sociaux.
Une bonne communication est « une communication qui ne se voit pas, et là c’est trop visible. On rentre ici dans le cynisme en essayant de profiter d’une crise, aussi grave soit-elle, pour travailler son image de chef de guerre, de chef de la nation totalement impliqué dans la résolution de la crise » explique Mathieu Slama.
Ni débat, ni interview depuis qu’il est président
A l’exception d’une interview très scénarisée face à Laurent Delahousse en décembre 2017, et de deux débats face à Bourdin et Plenel en avril 2018 et face aux caméras de LCI fin 2021, Emmanuel Macron a soigneusement évité de parler à la presse durant son quinquennat.
Le débat avec Bourdin et Plenel sur fond de crise des gilets jaunes avait choqué. La mise en scène était quelque peu excessive. Le président était arrivé au bras de sa femme descendant les marches du Palais Chaillot à Paris. En une heure de débat, seule la question syrienne et celle de l’évasion fiscale furent abordées. Cette dernière problématique concernait évidemment les gilets jaunes, mais elle représentait un sujet unique dans un océan d’injustices et d’inégalités qui constituaient la colère des manifestants.
L’autre exercice prétendument périlleux réalisé par Emmanuel Macron depuis son élection fut l’interview effectuée en vue des élections européennes de 2019. Cinq jours avant, l’Élysée avait convoqué neuf groupes de la Presse Quotidienne Régionale à un entretien.
Les équipes de communication du président avait imposé aux journalistes de co-écrire sur place une version unique de l’interview qui devait être soumise à une relecture immédiate de l’Élysée.
De cette manière, un article uniformisé paraîtrait dans la totalité des journaux de la presse régionale, ce qui s’apparente plus à un coup de propagande avec des médias à la botte du gouvernement qu’à un réel travail journalistique. Seuls La Voix du Nord et Télégramme avaient refusé de participer à cette interview et avaient dénoncé une opération de communication.
Fort de ce succès médiatique, Emmanuel Macron a ré-itéré la manœuvre pour l’annonce officielle de sa candidature à l’élection présidentielle en publiant une lettre adressée aux Français dans la Presse Quotidienne Régionale.
Une stratégie copiée sur la lettre de François Mitterrand en 1988 avec deux différences notables : à l’époque, le socialiste avait annoncé sa candidature à la télévision, quelques jours avant la publication de la lettre, une étape ignorée par Emmanuel Macron. Ensuite, la lettre d’Emmanuel Macron est bien plus succincte, seulement 4 pages, alors que celle de François Mitterrand s’étalait en différentes thématiques sur 56 pages.
Difficile alors pour les médias d’en tirer une analyse quelconque, l’Observatoire des médias Acrimed a ainsi détaillé, lors de la parution de la lettre, comment la PQR mais aussi des journaux nationaux comme l’Opinion ou LeMonde ont relayé les éléments de langage du président candidat sans aucun regard critique, renforçant encore plus « la porosité entre journalisme et communication ».
Utilisation de la communication de l’Élysée à des fins personnelles
« Macron passe son temps à vendre sa politique » explique Mathieu Slama. Aujourd’hui, un.e politique est un.e « candidat.e permanent.e ». Dès son élection, Emmanuel Macron est candidat à sa propre succession.
Il y a une « confusion entre le président et le candidat » car il utilise la communication de l’Élysée pour vanter son bilan et parler de se son programme politique lorsqu’il sera, espère-t-il, réélu président.
Analysons les vœux du président au soir du 31 décembre. Sur 13 minutes de prise de parole, la majorité du temps est accordée à son bilan et à son Plan France 2030. C’est un discours de campagne. De la quatrième à la septième minute, il énumère la totalité des politiques menées par le gouvernement. Il évoque les mesures prises pour l’insertion professionnelle, la précarité, la réindustrialisation, les personnes handicapées, les retraités, le fonctionnement des Ehpad, le pouvoir d’achat, les agriculteurs, l’écologie, les femmes. Bref, il tente de parler à tout le monde, symbole de sa politique du « en même temps ».
Puis, après avoir fait son bilan, il parle de son plan France 2030, tentant de s’imposer dans l’imaginaire des français comme la personne providentielle qui présidera le pays pendant encore 9 ans.
« Au fond, pour le respect de la démocratie, le président de la république devrait se confronter aux opinions contraires, aux français. Le fait d’éviter les médias et de ne s’exprimer que par allocutions présidentielles lui permet de mettre en place du narratif, des récits » explique Mathieu Slama. Durant la crise Covid il se plaçait « en chef de guerre », en « garant de la solidarité nationale », face à tous ceux qui ne « respectent pas les règles ». « Ce narratif construit aurait pu être mis à mal par les médias en cas de confrontation directe dans un moment où la côte de popularité de Macron était au plus bas ».
Plus besoin de passer par la presse, il y a les réseaux sociaux.
Les politiques, et pas seulement LREM, « s’approprient » leurs codes. Ils jouent « à fond » sur la « polarisation » avec les bulles de filtre. La politique actuelle est basée sur le « clash permanent », sur les communautés issues des réseaux sociaux qui se battent entre elles, sur la « polémique », sur la « porosité » entre le monde de la télé et les réseaux sociaux, « tout cela s’entrechoque » selon Mathieu Slama. De plus en plus, les politiques comprennent comment la « société du spectacle fonctionne et ils se l’approprient ».
« L’imaginaire du management est aujourd’hui au pouvoir. Il a remplacé la politique et le débat public » explique Mathieu Slama.
Les équipes d’Emmanuel Macron ont mis le paquet sur les réseaux sociaux depuis le début de son quinquennat. Sur Twitter il est suivi par 7,9 millions de personnes, soit 9,8 fois plus qu’en mai 2017 lors de son élection. Selon une étude de Visibrain publié l’année dernière, il a publié 6 136 tweets entre mai 2017 et mai 2021.
Au total, en 4 ans, notre président a été impliqué dans 141 millions de tweets, contre 82 millions pour Beyoncé. Il a donc fait 1,7 fois plus de bruit que la star planétaire sur ce réseau social.
Deux faits sont particulièrement marquants dans la réussite de la stratégie Twitter des équipes d’Emmanuel Macron. Le 16 mars 2020, lors de son allocution sur la crise Covid, il déclare « nous sommes en guerre », ce qui provoque un énorme pic d’activité de 50 tweets par seconde. Un peu plus tard, le 25 octobre 2020, il fait de nouveau la une de la twittosphère lorsqu’il souligne l’unité de la France avec le hashtag « We are one » face à l’appel au boycott des produits français dans le monde arabe. Résultat, 41 tweets par seconde.
Emmanuel Macron est également suivi par plus de 2,8 millions d’abonnés sur la plateforme TikTok, et 2,9 millions sur Instagram. L’ équipe de communication du président a d’ailleurs étendu sa puissance de frappe de manière impressionnante sur TikTok puisque Emmanuel Macron a gagné 1,3 millions d’abonnés en un an.
La vidéo avec les youtubeurs Mcfly et Carlito était un « tournant intéressant » selon Mathieu Slama parce que l’on est « face à deux personnes qui ne sont pas politisées » dans un « dialogue dépolitisé », très « général », sur le « ton de l’humour, de la désacralisation de la fonction. » Dans cette vidéo « il n’y a plus de politique ». Emmanuel Macron communique « comme une entreprise », il joue avec les influenceurs, il est dans une « approche com’ marketing ». Il est allé beaucoup plus loin que ses prédécesseurs dans l’idée de « cibler les parts de marché », en l’occurrence les jeunes dans la vidéo avec Mcfly et Carlito.
« Il joue sur les affects, les sentiments. Il sort de la politique, de la bataille des idées, des confrontations. Il joue sur le côté cool, accessible, le côté je casse les codes. On ne peut en vouloir à ses équipes de com d’expérimenter des sentiers nouveaux » explique Mathieu Slama.
Avec sa chaîne Twitch, Gabriel Attal est dans le même principe de ciblage. Lors de l’ouverture de celle-ci en février 2021, le ministre avait invité les influenceuses et influenceurs EnjoyPhoenix, Malek Délégué, Fabian CR, Élise Goldfarb et Julia Layani pour un live sur la détresse des jeunes. Après tout pourquoi pas, sauf que le dialogue fut laborieux, peu préparé, inaudible. Ne nous faisons pas d’illusions sur les volontés réelles du gouvernement et de Gabriel Attal.
Même principe pour Marlène Schiappa qui, le 9 décembre 2021, avait invité des influenceuses issues de la télé-réalité à un dîner pour discuter des violences faites aux femmes. Quoi de mieux pour attirer la jeune génération, éprise de bon sentiments et bien souvent dépolitisée. Sans bien en comprendre les enjeux, les youtubeurs deviennent les « idiots utiles » d’un monde politique qui utilise leur notoriété et leur savoir-faire pour casser les codes et se donner une image proche du peuple.
Le contrôle des médias
4 septembre 2017, Emmanuel Macron est en visite à Forbach pour la rentrée scolaire. Les journalistes accrédités sont tenus à l’écart, loin du président. Seuls les photographes de Bestimage, la société de Michèle Marchand qui assure la quasi-totalité des images du couple présidentiel, sont autorisés à suivre le président.
Emmanuel Macron visite une classe de CP. Les responsables de la communication de l’Élysée réalisent des vidéos promotionnelles pour alimenter les comptes de la République Française. Jean Michel Psaila, patron de l’agence photo Abaca, se désolait de cette situation : « les équipes qui s’occupent de ça sortent d’école de communication » et parlaient de Macron comme de « notre client ». Le mot est fort !
Emmanuel Macron déclara alors à Complément d’Enquête : « les journalistes ne m’intéressent pas, ce sont les français qui m’intéressent. » Les médias ne le savent pas encore, mais cet épisode marque le début de leur mise à l’écart.
En novembre 2017, deux mois après le numéro de Complément d’Enquête révélant les pratiques de communication de l’Élysée, notamment à Forbach, le gouvernement réclamait au service public une économie de 50 millions d’euros sur les 3 milliards de subventions annuelles, ce qui représentait 1,7% du budget total de France Télévisions.
Malgré cette baisse pas si significative, France Télévisions faisait délibérément le choix d’une diminution drastique de l’information et de l’investigation au sein du service public. Au total « 66 % des économies à concéder » reposaient « sur les magazines d’informations » expliquait alors Emilie Gavoille pour Télérama. Le plan présenté par les dirigeants de France Télévisions en 2017 prévoyait la suppression des trois quarts des postes de Cash Investigation et Complément d’enquête.
Daniel Schneidermann, fondateur d’Arrêt sur images, s’interrogeait alors : « pourquoi censurer des enquêtes dérangeantes, quand il est si simple de faire en sorte qu’elles ne soient jamais réalisées ? Et comment faire en sorte qu’elles se soient réalisées, sinon en supprimant les postes des journalistes qui pourraient les réaliser ? Au nom, bien entendu, de l’effort budgétaire demandé à tous. »
Face à cette impression et au soulèvement des journalistes de France Télévisions, qui se sont mis en grève, certains postes seront finalement sauvés. Emmanuel Macron avait alors tenu des propos pour le moins surprenants à l’égard de l’audiovisuel public : « je vais vous dire ce que pense très profondément », l’audiovisuel public français « est une honte ». Ajoutant que les chaînes privées font « aussi bien » voire « mieux ».
Une honte ? Lorsque l’on sait que les influents propriétaires de presse souvent enclins à s’approprier les médias privés pour orienter les choix démocratiques des Français avaient apporté leur soutien à Emmanuel Macron en 2017 ?
Résultat de cette pression politique, un certain nombre de documentaires ou enquêtes sont déprogrammés de France Télévisions. L’enquête sur l’affaire Alstom et la procédure contre Burno Le Maire, celle sur l’affaire Consumer Electronics Shox de Las Vegas, le film Les invisibles de Clarisse Feletin, sur les nouveaux esclaves modernes employés par des sociétés sous-traitantes pour nettoyer les trains, les hôtels ou les bureaux sans grand souci du droit du travail, l’enquête de Livolsi sur le harcèlement à France Télécom. La censure, ou l’autocensure par peur du pouvoir politique, est de plus en plus forte.
Ironie de l’histoire, alors que le gouvernement demandait une baisse des budgets de l’audiovisuel public, l’Élysée augmentait de manière significative les dépenses du SIG, service d’information du gouvernement, chargé de faire passer les messages de l’exécutif mais également de cerner l’opinion des Français.
En 2017, ce service avait dépensé 1,4 millions d’euros auprès d’instituts de sondage selon une enquête de L’Obs. Entre début mars et fin mai 2020, pas moins de 33 enquêtes d’opinion ont été commandées par l’Élysée, moyennant une somme proche du million d’euros.
Autre chiffre impressionnant, en 2021, le gouvernement aurait dépensé 28 millions d’euros en communication sur 14 prévus initialement dans son budget. Un chiffre qui s’explique, selon le gouvernement, par la nécessaire communication en période de Covid. Mais qui a réellement profité de ses dépenses ?
Nous étions présents au meeting du Collectif Stop Bolloré vendredi dernier. Ce collectif qui lutte contre la concentration des médias dénonce la volonté de supprimer la redevance à l’audiovisuel public des candidats Macron, Le Pen et Zemmour. Stopper les enquêtes dérangeantes pour l’un, supprimer “la propagande woke” pour les deux autres, augmenter le pouvoir d’achat des français pour les trois.
Les journalistes présents au meeting du collectif s’alarmaient : « avec la fin de la redevance nous allons devoir rendre des comptes chaque fin d’année à l’Élysée pour que le gouvernement nous paie ».
En d’autre termes, l’audiovisuel public, qui garantit une forme d’indépendance et une information d’intérêt général, pourrait être soumis à la censure du pouvoir en place.
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Selon Mathieu Slama, « on est en train d’abandonner tous nos principes un à un. On ne parle pas de petites choses, on parle du rôle du Parlement, de la séparation des pouvoirs, de la constitution, de la différence entre exécutif et législatif, de l’importance du débat public. On est en train de tout lâcher.
Ce qui est d’autant plus inquiétant c’est qu’on relativise l’intérêt de la démocratie en temps de crise. La gestion de la démocratie en temps de crise est une gestion purement autoritaire. On est sorti de l’état de droit. C’était pareil avec le terrorisme. A la fois sur le sécuritaire et le sanitaire on a mis en place, ces dernières années, des mesures folles. Premièrement cela installe l’idée que la démocratie est quelque chose de relatif et deuxièmement qu’il faut des mesures d’exception en temps de crise.
La crise ukrainienne est intéressante, puisque l’on a interdit RT et Sputnik. Il faut être sans aucune légèreté et indulgence envers la Russie. Mais là encore, on a cédé sur nos valeurs de liberté d’accès à l’information et aux opinions. On s’habitue à tout ça et à une gestion de crise permanente. Les macronistes ont une forte responsabilité là dedans car ils dépolitisent tout. Ce sont des manageurs, qui font du management, ils appliquent et les français doivent exécuter. Ceux qui n’acceptent pas d’exécuter sont des extrémistes, les gilets jaunes, les anti pass vaccinals. Un fonctionnement pareil n’est pas viable en démocratie. C’est le paradigme sécuritaire et liberticide qui s’installe ».
Face à ces manœuvres indignes d’une démocratie, de nombreux experts commencent déjà à questionner la légitimité du président candidat à rester sur le trône s’il est vraiment réélu. Même Gérard Larcher, le Président du Sénat, l’accusait « d’enjamber l’élection » dans un entretien accordé au Figaro.
Mais les choses ont changé en France depuis 2017, la population n’est plus la même, et les crises sanitaires et géopolitiques cristallisent des attentes fortes et parfois diamétralement opposées. Le mouvement des gilets jaunes a eu comme effet majeur de politiser une énorme partie de la population qui se tenait jusque-là éloignée du monde politique par dépit. Et la langue de bois politique est de plus en plus décryptée et dénoncée.
Reste à savoir si les français.es feront mentir les instituts de sondage et se rendront massivement dans les urnes, pour découvrir si la communication du président candidat payée par l’argent du contribuable aura le résultat escompté, ou non.