Une mouche de mai, insecte ancestral particulièrement sensible à la qualité de l’eau, a récemment été observée dans la Seine en plein cœur de Paris par le biophysicien Bill François. Cette découverte symbolique, qui survient pile au moment d’ouverture des zones de baignade pour le public, atteste d’une nette amélioration de l’état écologique du fleuve.
Une observation inédite dans la Seine
C’est en juin 2025 que le biophysicien Bill François observe à Paris, entre l’île Saint-Louis et Notre-Dame, une mouche de mai virevoltant au-dessus de la Seine.
« Sa découverte n’est pas le fruit du hasard mais s’inscrit dans un effort de recensement des espèces, notamment via la science participative et les communautés de pêcheurs » commence Bill, auteur de livres sur le monde aquatique et expert de l’écosystème parisien, pour La Relève et La Peste.
C’est la première fois depuis des décennies que cet insecte ancien, considéré comme un bio-indicateur de qualité des eaux, est observé à cet endroit. Son retour est une véritable victoire écologique, à quelques jours de l’ouverture des zones de baignade publiques dans la Seine.
« Leur observation est un signe très positif de l’amélioration de la qualité de l’eau de la Seine ». Bill continue en précisant que « cette amélioration est une exception en France et dans le monde, où la qualité de l’eau des milieux aquatiques se dégrade généralement ».
Paris. Le 17 mai, le scientifique Bill François a observé à la surface de la Seine une mouche de mai, aussi surnommée éphémère. Une première en plein cœur de Paris. ©Bill François
Une mouche vieille comme le monde, indicateur de qualité
L’Ephemera danica est une espèce préhistorique qui appartient à une lignée très ancienne, son fossile remonte à plusieurs centaines de millions d’années.
« Son cousin est même la première créature à avoir volé, bien avant les dinosaures, et a survécu à deux extinctions majeures » livre le biophysicien.
Ultra-sensible à la qualité de l’eau et à la pollution, son cycle de vie repose sur la présence d’une eau claire, bien oxygénée, fraîche et peu polluée.
Passant la majeure partie de sa vie sous l’eau sous forme larvaire, d’où son caractère d’animal aquatique, cet insecte ne vit que quelques heures à la surface sous sa forme volante. Sa présence témoigne donc de l’état écologique favorable du fleuve, qui redevient peu à peu un écosystème accueillant pour le vivant. Polluée depuis plus d’un siècle, l’eau est maintenant assez saine pour lui permettre d’y pondre ses œufs.
Une larve de mouche de mai ©Bill François
« La qualité de l’eau de la Seine s’améliore depuis 40 ans, grâce aux efforts d’assainissement des eaux » précise Bill.
Cette résurgence illustre des décennies d’efforts de dépollution, d’amélioration des systèmes d’assainissement et de régulation des rejets industriels. En effet, depuis 2015, les collectivités concernées déploient 1,4 milliard d’euros dans des projets d’assainissement, notamment à travers le Plan baignade.
Mais Bill François alerte : « Malgré sa résilience historique, la mouche de mai est actuellement en voie de disparition principalement à cause de l’agriculture intensive qui engendre remembrement, pesticides et pollution organique ».
L’agriculture intensive a des conséquences significatives sur la qualité de l’eau et les milieux aquatiques
C’est le vrai problème des milieux aquatiques aujourd’hui, puisque dans certaines régions, elle représente plus de 80% de la pollution. Ce qui entraîne un surplus de matière organique et lessive les sols agricoles vers l’eau. Un sur nourrissage du milieu aquatique, normalement pauvre en nutriments, va provoquer la prolifération de bactéries et d’algues étouffant l’environnement. De plus, le remembrement des terres a augmenté le phénomène d’érosion de manière considérable, contribuant à ce que la matière organique se retrouve dans l’eau.
Dans la Seine, la réapparition de la mouche de mai ne relève pas de l’exception. Elle illustre une tendance du retour de la biodiversité. « Dans les années 70, on ne comptait que 2 ou 3 espèces de poissons dans la Seine, contre une quarantaine aujourd’hui » conclut Bill.
Anguilles, brochets, silures et même des moules d’eau douce refont surface, tout comme certaines algues sensibles à la qualité de l’eau.
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