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Pour protéger la truite fario, la fédération de pêche interdit sa capture sur 53km de rivière en Ardèche

D’un potentiel halieutique considérable, le département accueille chaque année quelque 25 000 pêcheurs, dont 60 %, venant de l’extérieur, y recherchent la qualité de l’eau et la diversité des poissons.

Pour la nouvelle année, la Fédération de pêche de l’Ardèche a pris une résolution inédite : afin d’étudier et de protéger la truite fario, menacée, la capture de cette espèce « repère », emblématique du département, est désormais interdite sur 53 kilomètres de cours d’eau, et ce pour une durée de trois ans.

Dans la cartographie transmise par la Fédération départementale de pêche figurent divers segments des rivières Ardèche, Beaume, Chassezac et Doux, toutes quatre étant des affluents ou des sous-affluents du Rhône.  

Ces segments ont pour dénominateur commun d’être classés dans la seconde catégorie piscicole : il s’agit de cours d’eau de basse altitude, généralement de plaine, dont l’espèce biologique dominante est constituée de poissons blancs (comme les carpes) et de carnassiers (brochet, sandre, perche).

Plus chaud, davantage pollué et sujet au manque d’oxygène, leur écosystème est donc bien différent des cours d’eau dits de première catégorie, où divers facteurs comme l’altitude, la fraîcheur du milieu et l’absence de contamination sont propices à la reproduction et à la croissance des salmonidés, dont la truite fario est un célèbre représentant. 

Crédit : Lionel ARMAND

Une particularité ardéchoise

Entre plaines et montagnes, l’Ardèche compte près de 5 000 kilomètres de cours d’eau, parmi lesquels 3 500 appartiennent à la première catégorie piscicole. D’un potentiel halieutique considérable, le département accueille chaque année quelque 25 000 pêcheurs, dont 60 %, venant de l’extérieur, y recherchent la qualité de l’eau et la diversité des poissons. 

Au sein de ce « paradis des pêcheurs », la très sensible truite fario évolue majoritairement dans les rivières de première catégorie, où elle est considérée comme une espèce « repère », car ses fortes exigences de reproduction en font un excellent indicateur de l’état général d’un cours d’eau.

Mais en Ardèche où les poissons abondent, on la rencontre aussi dans certaines eaux plus chaudes et polluées, en aval des rivières. C’est ainsi que, dans une moindre mesure, la truite fario a réussi à se maintenir dans des portions de seconde catégorie, notamment grâce à des résurgences d’eaux fraîches et claires, essentielles à son cycle biologique.  

La rivière Ardèche – Crédit : Yann Cœuru

Une espèce menacée de toutes parts

Bien que l’espèce ne soit pas compromise en amont, les populations de truites des cours d’eau de seconde catégorie n’ont cessé de chuter ces dernières années. Et dans le petit milieu des amateurs de pêche, cette diminution continue, observée partout, justifiait des mesures radicales.

Outre la pollution de l’eau provoquant des phénomènes d’eutrophisation caractéristiques de nos sociétés modernes, la truite fario est sujette à de nombreuses menaces.

L’été, l’irrigation agricole et les prélèvements d’eau massifs font bien souvent baisser le niveau des rivières, induisant une pression immédiate chez les poissons, qui peinent alors à se reproduire. Dans cette dynamique contraire, le réchauffement climatique ajoute un stress supplémentaire, la chaleur, qui allonge la durée d’incubation des œufs. 

Par ailleurs, les obstacles artificiels (comme les barrages ou les rejets d’eaux chaudes) et la destruction de certains milieux aquatiques, en particulier les frayères et les fonds riches en microhabitats, nuisent à la circulation des truites entre leurs zones de croissance et leurs zones de reproduction.

Enfin, l’appauvrissement génétique de l’espèce rend les géniteurs de souches locales de plus en plus rares, d’autant que ceux-ci sont déjà contraints de surmonter bien des entraves dans le seul but de se reproduire.

Des alevins de truite fario, rendus à la rivière par les écoliers – Crédit : Commune du Val d’Ajol

Trois ans d’étude et d’observation

Dans les cours d’eau de première catégorie, la Fédération de pêche ardéchoise pratique depuis longtemps la gestion patrimoniale, qui consiste à préserver l’habitat naturel des espèces locales, au lieu de procéder à des déversements de poissons de pisciculture.

Grâce à cette politique adoptée de façon relativement précoce par rapport à d’autres départements, l’Ardèche a pu maintenir de fortes populations de truites de souche dans ses cours d’eau.

Mais ces mesures vertueuses, durables n’ont pas empêché le réchauffement climatique et l’agriculture intensive de mettre l’espèce en péril dans les parties inférieures des rivières.

C’est pourquoi la Fédération de pêche a pris la décision, à compter du 1er janvier 2022, d’interdire la capture des truites farios dans 53 kilomètres de cours d’eau. De la sorte, elle espère pouvoir observer le comportement des poissons et déterminer les causes exactes de leur déclin.

Si, au bout de trois ans, les effectifs n’ont pas augmenté, c’est que d’autres facteurs les menacent. Il faudra alors prendre de nouvelles décisions.

Augustin Langlade

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