Alors qu’une multitude de pays européens dont la France, l’Allemagne et l’Italie, qui participent à la conférence mondiale « Our Ocean » en juin, continuent d’autoriser l’exploitation des aires marines protégées, 5 ONG demandent à la Commission européenne d’engager une procédure d’infraction à leur encontre.
Le chalutage de fond est encore pratiqué dans 77% des sites Natura 2000 français, 85% des sites allemands et 44% des sites italiens. Pourtant, selon la directive européenne Habitats et d’autres textes européens, les aires marines protégées doivent être exemptées de toutes activités nuisibles. Raison pour laquelle Environmental Justice Foundation (EJF), Blue Marine Foundation, ClientEarth, Défense des Milieux Aquatiques (DMA) et Deutsche Umwelthilfe e.V, dénoncent « des violations généralisées du droit européen ».
« Ces législations ne sont pas facultatives. Ne pas les respecter, c’est anéantir la faune et la flore marine, la santé de nos océans et l’avenir des communautés de pêcheurs à travers l’Europe » commente Marie Colombier, chargée de campagne chez EJF, pour La Relève et La Peste.
La France en première ligne
La plainte porte sur 15 sites particulièrement exposés, où de nombreuses preuves démontrent l’absence de restriction du chalutage de fond, détruisant des écosystèmes marins pourtant protégés.
Dans la Manche, la « Baie de Seine Occidentale », qui est pourtant le premier site Natura 2000 français à avoir été intégré à la liste verte des aires protégées et conservées de l’UICN (Union internationale pour la conservation de la nature), a connu 9 016 heures de chalutage sur des habitats protégés chaque année entre 2020 et 2024.
« 90 % des habitats et espèces marines protégés en France restent en mauvais état de conservation » selon Philippe Garcia, Président de DMA (Défense des Milieux Aquatiques).
L’Allemagne et l’Italie également visées
En Italie, sur le site Tutela del Tursiops truncatus (Toscane), 11 923 heures de chalutage de fond annuelles ont été enregistrées entre 2020 et 2024. La zone abrite pourtant de nombreuses espèces benthiques, des animaux ou végétaux qui vivent fixés au sol et qui font vivre les fonds marins.
Sur la même période, plus de 32 800 heures de chalutage par an, ont été comptées dans la zone protégée « NTP S-H Wattenmeer und angrenzende Küstengebiete » en Allemagne.
« Le chalutage de fond continue de ravager l’écosystème fragile de la mer des Wadden, au mépris flagrant du statut de protection officiel de la zone. Les autorités allemandes ont reconnu l’année dernière que le chalutage de fond était la principale cause de dégradation des habitats de la mer du Nord, mais elles ne prennent aucune mesure », a déclaré Svane Bender, Responsable du département conservation de la nature à la Deutsche Umwelthilfe (Fondation allemande pour la protection de l’environnement).
« Dans la mer Baltique, le chalutage de fond a été l’un des principaux facteurs de l’effondrement des stocks de poissons commerciaux et n’a toujours pas été complètement arrêté. Cela nuit à la restauration de la nature comme des pêcheries locales ».
La Commission européenne doit répondre de cette plainte dans un délai d’un an. Elle pourrait décider d’engager une procédure d’infraction à l’encontre des pays concernés. A un peu plus d’un mois de la conférence mondiale « Our Ocean » qui se tiendra à Nice, les ONG mettent la pression.
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