Le 21 février 2024, l’État a annoncé par arrêté une simplification du protocole de tirs dans le but de mieux « réguler la population de loups ». Les organisations de protection de la nature lancent l’alerte sur la mise en danger de l’espèce et ses conséquences pour les écosystèmes.
Tirs sur les loups en dépit de la science
Le 18 septembre 2023, 6 organisations de protection contre la nature (FERUS, WWF, LPO, FNE, ASPAS, Humanité & Biodiversité) ont quitté le Groupe National Loup en contestation avec le contenu déséquilibré du nouveau Plan national d’action (PNA) « Loup et activités d’élevage » sur la période de 2024 à 2029.
Les associations regrettaient l’absence totale d’évaluation du PNA précédent, et ainsi d’analyse de l’évolution de la situation en termes de dommages, de développement de la population de loups, de valorisation des expériences de terrain favorisant la coexistence, ou de baisse du nombre d’animaux d’élevage tués par rapport au nombre de loups présents.
Selon une enquête réalisée en 2016 aux Etats-Unis, les méthodes mortelles face au loup sont efficaces dans 29% des cas, tandis que dans 43% des cas, les attaques contre le troupeau augmentent à la suite d’un tir de loup.
Avec l’arrêté officialisant le nouveau PNA, l’État ignore les avis scientifiques et la conclusion d’une consultation publique, en réponse à laquelle 90 % des avis (plus de 13 000) étaient défavorables.
Tirs ouverts sur les loups
L’arrêté accorde des dérogations aux interdictions de destruction du loup. Le gouvernement simplifie les procédures d’abattage, empêche le rétablissement d’une population viable de l’espèce sur son aire naturelle de répartition, établit des zones de non protégeabilité sans étude préalable et facilite les tirs de loups sans la mise en place de moyens de protection.
L’obligation d’éclairer un loup avant de tirer a été supprimée. Le nombre de tireurs augmente, passant de 1 à 3 pour les tirs de défense simple, et le recours aux lunettes à visée thermique est généralisé pour les louvetiers.
Le nouveau plan contient par ailleurs de nombreuses inexactitudes : sur l’état de conservation de l’espèce en France, le bilan des dommages et les difficultés de l’élevage et du pastoralisme.
« Alors que ce PNA devrait garantir la bonne conservation de l’espèce en France tout en assurant le soutien et l’accompagnement du pastoralisme, il n’est fait mention que des impacts négatifs de la présence du loup et pas des bénéfices qu’elle apporte, notamment en ce qui concerne la régulation des populations de grands ongulés nécessaire au bon fonctionnement des écosystèmes forestiers » déplore l’association FERUS
La Commission européenne veut modifier le statut de protection du loup
Le 20 décembre, la Commission européenne a proposé de modifier le statut du loup, d’espèce “strictement protégée” à “espèce protégée”. Cela signifierait que les États membres pourraient autoriser sa chasse, un danger pour la conservation de l’espèce.
Enrique Perez, président de l’Alliance européenne pour la Conservation du loup, rappelle que même si la situation du loup s’est améliorée en Europe, son statut de conservation est défavorable dans 6 des 7 régions biogéographiques.
Certains États membres continuent d’ores et déjà d’abattre un grand nombre de loups en utilisant excessivement les dérogations prévues dans la directive. Les loups sont aussi fréquemment victimes d’accidents de la route et de braconnage.
Les loups ont un rôle essentiel dans la préservation de la bonne santé des écosystèmes, grâce à leur régulation des ongulés, empêchant ainsi le surpâturage et la diffusion de maladies.
Dans Vivre avec les loups, le nouveau film documentaire de Jean-Michel Bertrand, en plus du triptyque essentiel pour se défendre efficacement du prédateur, le réalisateur rappelle que des programmes d’aide bénévole aux éleveurs existent, tels que Pastoraloup. Des personnes de tous les horizons viennent surveiller pendant une à plusieurs semaines, et apprennent ainsi à réellement comprendre l’importance et les difficultés du pastoralisme.
Face à la destruction programmée du nouveau plan national du gouvernement, les associations se mobilisent pour faire entendre leurs voix. Plus de 30 ans après son retour, elles souhaitent encourager une coexistence apaisée pour l’aider à reprendre sa place au sein de la faune française.
Sources : « Un plan national censé protéger le loup mais qui permet d’en tuer plus : c’est inacceptable ! », 23/02/24, Ferus / « Plan Loup 2024-2029 : une volonté gouvernementale ouvertement anti-loups, action nationale de One Voice », 23/02/24, One Voice / « Les loups en Europe: Restons sur les faits! », 28/12/23, Alliance européenne pour la conservation du loup / « Predator control should not be a shot in the dark » September 2016, Frontiers in Ecology and the Environment 14(7):380-388 / Projet de Plan national d’actions 2024-2029 sur le loup et les activités d’élevage, Consultation du 14/11/2023 au 07/12/2023 – 13058 contributions