Et si les arbres anticipaient les bouleversements du ciel ? À 1 500 mètres d’altitude, des scientifiques ont observé une forêt vibrer à l’unisson des heures avant une éclipse solaire.
C’est à 1 500 mètres d’altitude, au cœur d’une forêt alpine, que des chercheurs ont fait une découverte des plus surprenantes. Installés sur des épicéas, des capteurs ont permis d’observer un comportement collectif que l’on pensait réservé aux animaux : une synchronisation électrique entre arbres, en réponse à un événement cosmique.
Parue le 30 avril 2025 dans Royal Society Open Science, cette étude montre que les arbres de la forêt de Costa Bocche ont réagi à une éclipse solaire… avant même qu’elle ne débute. Plus précisément : les plus âgés semblent avoir transmis l’information aux plus jeunes.
Le 25 octobre 2022, alors que le ciel était encore clair, certains arbres de plus de 70 ans ont modifié leur activité bioélectrique. Cette réponse s’est diffusée à travers la forêt comme une onde discrète, remontant les troncs jusqu’aux jeunes arbres – et même jusqu’aux souches.
La forêt comme un organisme collectif
Les chercheurs ont mesuré le “potentiel bioélectrique” des arbres. Soit : de minuscules variations de tension, invisibles à l’œil nu, qui permettent aux cellules végétales de communiquer entre elles. Ce système repose sur la circulation d’ions dans les tissus – un mécanisme comparable, à une autre échelle, à celui de notre système nerveux.
Ce système s’est mis à vibrer à l’unisson : les signaux électriques des arbres se sont alignés, synchronisés, amplifiés, des heures avant l’obscurcissement. C’est la première fois qu’une telle coordination est observée à l’échelle d’un peuplement forestier entier.
Ce que les scientifiques ont découvert dépasse la seule réaction réflexe. Les arbres ont anticipé l’événement. Leurs signaux ont changé jusqu’à 14 heures avant l’éclipse, alors que le soleil brillait encore. Or, à ce moment-là, le phénomène n’était visible que depuis l’autre hémisphère. Impossible d’invoquer la lumière ou la température comme déclencheur.
Alors, quoi ? La piste gravitationnelle est privilégiée. Les alignements spécifiques du soleil, de la Terre et de la lune génèrent des micro-variations du champ gravitationnel – des “marées lunisolaires” imperceptibles pour nous, mais pas pour les arbres.
Plus encore : les arbres plus âgés, ayant déjà “vécu” d’autres éclipses de ce type (Saros 124, tous les 18 ans), semblent réagir plus finement, comme si une forme de mémoire écologique se transmettait.
Fait saisissant : les souches, vestiges d’arbres morts il y a plusieurs années, ont, elles aussi, montré une activité bioélectrique modifiée. Moins intense, mais bien réelle. Comme si, par les racines et le système mycorhizien, la pulsation forestière persistait dans ces corps amputés.
Les arbres s’adaptent pour amortir les chocs
En combinant mesures de terrain, analyse fractale, et même théorie quantique des champs, l’équipe scientifique est arrivée à une conclusion vertigineuse : la forêt agit comme un système corrélé, une forme de conscience collective végétale.
Ce que les arbres se “disent” n’a pas besoin de mots. Ils adaptent leur fonctionnement interne pour amortir le choc d’un événement brutal et rare. En ralentissant, en se synchronisant, ils minimisent les perturbations – comme un banc de poissons soudainement en formation serrée.
Comme d’autres avant elle, cette étude souligne l’importance cruciale des vieux arbres. Non seulement ils stockent du carbone, nourrissent la biodiversité, mais ils sont les gardiens de la mémoire écologique, transmettant des informations vitales aux générations suivantes.
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