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Législatives : cette candidate veut impliquer les citoyens dans l’élaboration des lois

« Par ces délibérations, on veut déjà améliorer la qualité du travail parlementaire. On va se nourrir les uns les autres, faire venir des experts pour éclairer les thématiques, pour qu’on en ressorte grandi. L’autre objectif est de redonner du pouvoir aux citoyens, d’être en capacité de peser par le nombre ».

Au sein de la deuxième circonscription de Paris a émergé, dans le cadre des élections législatives, une candidature atypique. Quitterie de Villepin a construit sa campagne à partir d’un programme simple, la démocratie participative. Grâce à une méthode, la délibération, et une boussole, les Objectifs de Développement Durable, le goût de la politique semble renaître.

Une femme engagée

Originaire du 6ème arrondissement de Paris, Quitterie de Villepin commence sa vie de femme engagée en travaillant à la communication de diverses ONG. Responsable de la campagne de François Bayrou en 2007, elle participe à la création du Modem.

Dépitée par leur immobilisme, elle quitte le monde des partis traditionnels six ans plus tard et lance le mouvement #MaVoix en 2015, qui vise à « hacker l’Assemblée Nationale » en faisant élire des citoyens tirés au sort. Elle est ensuite à l’initiative du collectif  Investies en 2020, avec l’ambition de faire émerger une nouvelle génération de femmes politiques.

C’est en octobre 2021, qu’elle s’engage dans une campagne législative en tant que candidate indépendante au sein de la deuxième circonscription de Paris. En plaçant la démocratie participative au cœur de cette expérience, elle interroge, dès la campagne, la nature du mandat de député. Elle nous reçoit dans sa permanence de campagne, au cœur du 5ème arrondissement.

Quitterie de Villepin

Une campagne particulière

« Notre proposition a deux grandes particularités », commence-t-elle. « D’abord, il s’agit d’une campagne indépendante des partis politiques, par choix – on m’a proposé une investiture il y a quelques mois et j’ai dit non. Au cours de mon engagement, j’ai constaté que dans ces partis politiques il y a beaucoup de tensions internes. Après vingt années de réflexion, j’en suis arrivée à la conclusion que le parti politique n’est peut-être pas la forme la plus adaptée aux enjeux de notre époque. Cette campagne est là pour voir ce qui se passe quand on s’émancipe de ces usages, de ces codes, de cette violence interne, et comment ça résonne chez les personnes sur le terrain ».

La deuxième grande particularité réside dans le financement de la campagne.

« C’est assez inédit, on a plafonné les dons des donateurs et des donatrices à un montant 10 fois inférieur par rapport à celui autorisé pour les partis. C’est aussi pour montrer qu’en dehors des partis on peut vraiment, en étant indépendante, avoir une campagne de très bonne tenue. On a une permanence ouverte depuis plusieurs mois, de beaux documents qui ont été envoyés à deux reprises dans l72 000 boîtes aux lettres ».

La question du financement est centrale pour Quitterie de Villepin.

« Les législatives sont la banque des partis politiques », explique-t-elle. « En gros, une voix égale un euro pour les partis. Donc ils ont intérêt à présenter un maximum de candidats pour financer leurs actions, ce qui engendre des tensions mais aussi des alliances de circonstance, pour des questions de survie des partis. Les Français paient par leurs impôts les campagnes politiques. Si cela ne nous convient pas, il faut savoir financer d’autres routes en politique ».

D’où le plafond de 750€ pour les donateurs de la campagne.

« Cela permet aussi de mieux répartir les dons. On est à 168 donateurs et donatrices et on a 35 000€ collectés, ce qui est un énorme budget pour une campagne indépendante. Dans le même temps, on montre que c’est possible de financer une campagne comme celle-ci avec de très beaux moyens ».

Pour la candidate, questionner la manière dont fonctionnent aujourd’hui les campagnes politiques est loin d’être anodin.

« Ne pas regarder le financement de la politique c’est ne pas vouloir voir pourquoi on arrive à de tels dysfonctionnements », soutient-elle. « C’est la première fois dans ma vie de femme engagée que je vois les gens vraiment perdus. Cela fait 6 mois qu’ils me demandent : Madame, pour qui je dois voter à l’élection présidentielle ? Qui est la droite, qui est la gauche ? ».

https://twitter.com/Quitt3rie/status/1527539871648292865

Une méthode, la délibération

C’est en constatant cette perte de repères, cette désaffiliation politique, que l’équipe a voulu proposer de nouvelles modalités. La campagne repose sur une méthode, la délibération.

« Je pense – et je ne suis pas la seule, c’est ce que disent les profs de droit constitutionnel et tout le milieu qui travaille sur comment réparer la démocratie représentative – que la délibération est un moyen-clé. Notre démocratie représentative est arrivée au bout du chemin. Ce n’est pas étonnant, la démocratie est un idéal, un processus vivant. Mais on a considéré depuis bien trop longtemps que c’était un processus abouti ».

L’idée est donc de la revivifier par la délibération, en faisant venir des habitants, des habitantes tout au long du mandat.

« Par ces délibérations, on veut déjà améliorer la qualité du travail parlementaire. On va se nourrir les uns les autres, faire venir des experts pour éclairer les thématiques, pour qu’on en ressorte grandi. L’autre objectif est de redonner du pouvoir aux citoyens, d’être en capacité de peser par le nombre ».

Une boussole, les 17 Objectifs de Développement Durable

La candidate a également choisi une boussole, les 17 Objectifs de Développement Durable.

« C’est une feuille de route à la fois très large – on y traite non seulement de l’environnement mais de la pauvreté, de l’égalité entre les sexes, de l’éducation ou de la santé – et extrêmement précise », remarque Quitterie de Villepin. « On veut en faire une grille de lecture partagée, mais aussi une moulinette dans laquelle on va passer chaque loi ».

L’objectif est double : rappeler aux ministres cet engagement pris en 2015, et faire en sorte que chaque personne qui contribue aux assemblées locales délibératives puisse se saisir de ces objectifs et les comprendre réellement.

« On a constaté avec cette campagne que la délibération comme méthode, et les ODD comme boussole pouvaient fabriquer une dynamique qui résonne chez les gens, qui leur redonne le gout de la politique. On a une chance folle parce qu’on est sur un territoire très resserré et dans la circonscription où se trouve l’Assemblée, le Sénat, les Ministères… Mais il y a tellement d’envie de s’engager partout en France que cette expérience pourrait marcher partout ».

Quitterie de Villepin en pleine campagne

L’envie de s’engager

Cette envie de s’engager est largement ressortie de la consultation menée par l’équipe sur le terrain, à laquelle 1200 personnes ont répondu. Près de 80% d’entre elles ont par exemple confié qu’elles souhaitaient participer à la fabrication de la loi.

« Tous les gens géniaux partent de la politique », déplore Quitterie de Villepin. « Moi je ne peux pas admettre ce renoncement. Et je ne peux pas accepter l’état de l’Assemblée Nationale. Les députés actuels, y compris quand ils sont dans un parti, n’ont pas le temps de travailler. On leur demande de voter dans l’urgence des textes qu’ils n’ont pas le temps de lire, de suivre des consignes de vote en contradiction avec leurs convictions personnelles…Il s’agit de réhabiliter et sauver l’Assemblée Nationale, où les délais sont intenables et où il y a une incapacité à délibérer ».

Entretemps, Satya, 17 ans, nous a rejointes dans la permanence et a commencé à plier des tracts. Il nous explique la raison de son engagement. 

« Je partageais le constat que fait Quitterie : les partis politiques et le jeu politique actuel n’est pas viable. Il n’est pas sain dans le sens où il n’y a pas vraiment de lien entre les députés et les citoyens. Je cherchais aussi un projet dans lequel m’investir, et celui-là correspondait totalement à ce en quoi je croyais. Ce qui m’a marqué depuis le début de la campagne, c’est que les gens sont choqués et super contents qu’on vienne et qu’on leur dise : on n’est pas là pour vous séduire sur un programme mais on vous propose de construire ça ensemble. J’ai eu l’occasion de faire beaucoup de porte-à-porte. C’était génial d’entendre les gens partager leur ressenti et voir que cette proposition résonne vraiment ».

Quitterie de Villepin se souvient alors d’une délibération organisée sur une péniche quelques semaines auparavant.

« Une dame est venue, elle avait 83 ans. Elle nous a dit : je vote depuis mes 21 ans. C’est la première fois qu’on me demande mon avis ».

Marine Wolf

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