Le 6 avril 2022, foodwatch, une ONG de défense des consommateurs, et militante pour une alimentation sans risque, saine et abordable pour tous, a publié un communiqué de presse pour dénoncer les récentes affaires de scandales alimentaires. Selon l’organisation, le système agroalimentaire favorise ce genre d’évènements pourtant évitables.
Trois scandales alimentaires ont éclaté à quelques jours d’intervalle, révélant les défaillances de trois géants de l’agroalimentaire, Nestlé (des pizzas Buitoni), Ferrero (des œufs Kinder) et Lactalis (des fromages), leaders sur le secteur.
Foodwatch salue la réactivité des autorités sur l’enquête liée à Buitoni, mais s’interroge sur le délai concernant les œufs Kinder :
« Le réseau d’alerte européen a informé les États membres le 25 mars. Les autorités britanniques ont informé les citoyens dès le 2 avril. La Belgique d’où est partie la contamination Ferrero a procédé au rappel le 4 avril. Les autorités françaises ont envoyé un communiqué mardi 5 avril. Pourquoi ce retard, alors qu’on parle d’un problème de santé publique grave ? »
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FoodWatch dénonce les quatre maillons d’un schéma qui se répète :
Le retrait-rappel des produits survient trop tard par manque de mesures préventives. Les pizzas Buitoni ont été rappelées le 18 mars 2022, mais étaient commercialisées depuis juin 2021. Le groupe italien Ferrero a rappelé les œufs Kinder début avril 2022, alors que la Grande-Bretagne aurait identifié les lots concernés en décembre 2021.
Les autocontrôles sont tout simplement inefficaces. La Cour des comptes en France exposait déjà en 2013 de graves anomalies : certaines non-conformités révélées par les autocontrôles n’étaient pas toujours portées à connaissance de l’État. La juridiction financière évoquait des mesures contraignantes qui n’ont cependant pas été mises en œuvre.
Les autocontrôles, qui assurent la conformité des produits commercialisés, sont, selon la loi, obligatoires. Les autorités compétentes doivent être informées dans le cas d’une denrée potentiellement préjudiciable à la santé humaine.
Foodwatch soulève des questions : les contrôles ont-ils été réalisés scrupuleusement et ont-ils révélé un risque ? Les informations ont-elles été remontées aux autorités, et ces dernières ont-elles pris des actions en conséquence ? Comment se fait-il que les acteurs semblent aujourd’hui « stupéfaits » de la nouvelle ?
Malgré les preuves à l’appui, les sanctions sont peu dissuasives, et les auteurs ne sont pas dans l’obligation d’assumer leurs responsabilités.
En mai 2021, Mr Mondialisation révélait dans une enquête le scandale des pizzas Buitoni. Les objectifs de rendements de l’usine de Caudry, dans le nord de la France, étaient accompagnés non seulement d’immenses gâchis, mais également de conditions insalubres, telles que des moisissures, des champignons au mur, des croûtes au sol, ou bien encore des verres de farine qui se baladaient sur les tapis.
La source exposait à l’époque que la filiale de Nestlé n’avait fait aucune inspection d’hygiène depuis au moins un an. Foodwatch dénonce un système dans lequel les fabricants ne sont pas souvent condamnés pour des négligences qui sont pourtant avérées.
En décembre 2017, une cinquantaine d’enfants avaient été intoxiqués à la salmonelle à cause de lait contaminé chez Lactalis. Malgré cela, le procès contre Lactalis n’a toujours pas eu lieu et l’enquête piétine.
Les effectifs et actions menées contre les fraudes sont largement en baisse et ne sont pas à la hauteur de l’enjeu. En 2022, la Répression des fraudes compte 442 agents de moins que dix ans auparavant. Entre 2012 et 2019, selon les rapports annuels de la Direction générale de l’alimentation, le nombre d’inspections vétérinaires (abattoirs) et phytosanitaires (pesticides) a diminué de 33 %.
Outre la destruction de la concurrence et donc des petites entreprises familiales et locales, les maltraitances massives d’animaux, les étiquettes mensongères et les manques de transparence, les géants de l’industrie agro-alimentaire sont une nouvelle fois à l’origine de scandales alimentaires.
En avoir conscience pour mieux agir individuellement nous permet de soutenir un système plus juste, mais il est légitime de se demander dans quelle mesure les services publics agissent.
foodwatch conclut : « In fine, c’est la responsabilité des autorités publiques de protéger la santé des consommateurs.trices. »
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Crédit photo couv : Laure Boyer / Hans Lucas via AFP