C’est une belle victoire pour les 500 habitants réunis pour sauver Juzan, la dernière forêt sauvage d’Anglet. Lors d’une mobilisation, le maire Claude Olive a promis de sanctuariser 17ha pour sauver le dernier poumon vert de la ville de la bétonisation.
La dernière forêt sauvage d’Anglet
Lors de cette journée ensoleillée, la fête battait son plein en ce samedi 20 avril pour faire découvrir aux habitants qui ne la connaissaient pas encore la dernière forêt sauvage d’Anglet : la forêt de Juzan.
Depuis un an, un collectif citoyen s’est créé pour la sauver de la destruction. Elle est menacée d’être rasée pour laisser place au projet d’extension de la technopole d’Arkinova, un éco-campus qui, comble de l’ironie, devrait accueillir de futurs ingénieurs soucieux de l’environnement.
« Ce pôle est un prétexte pour installer des entreprises, dénonce Arnaud Gréciet auprès de La Relève et La Peste. Jean-René Etchegaray, le président de la Communauté d’Agglomération du Pays basque, parle de poumon foncier. Ils chassent le foncier car ils savent qu’en 2030 la loi Zéro Artificialisation Nette va compliquer le développement des projets. Nous, on n’est pas contre ce projet mais contre son implantation. Lorsqu’on leur a demandé le nombre de bâtiments qui correspondraient à l’enseignement supérieur, ils ont botté en touche en disant qu’ils veulent que les étudiants soient proches des entreprises… »
Également menacés : les plus vieux maraîchers de la côte basque, les emblématiques Paul-Guy et Mauricette que nous vous présentions en 2023. Pour les habitants, le sujet est particulièrement sensible : en 2020, un incendie a ravagé 75 hectares de la forêt du Pignada, l’autre espace boisé de la ville. C’est pourquoi l’annonce du maire Claude Olive a créé la surprise lors de cette journée de mobilisation organisée par 13 associations environnementales.
Des panneaux ont été mis dans la forêt de Juzan pour avertir les promeneurs – Crédit : Laurie Debove
« Dans le cas du plan d’urbanisme intercommunal que l’on porte avec l’agglomération, il nous a été demandé de rendre plusieurs hectares dans le cadre de la loi climat et résilience. La forêt est classée en Zone AU, c’est-à-dire zone d’activité économique. En changeant le zonage lors du PLUI, je rappelle que je veux le rendre en zone naturelle et agricole. Intouchable ! » a-t-il déclaré
Reste donc à savoir pour les habitants comment la promesse de l’édile va se concrétiser dans le Plan Local d’Urbanisme Intercommunal. Contactés par La Relève et La Peste à plusieurs reprises, ni la Ville d’Anglet, ni la Communauté d’Agglomération du Pays basque n’ont pour l’instant apporté de précisions.
Une activiste fait une démonstration de high line entre deux arbres de la forêt de Juzan – Crédit : Laurie Debove
« Le maire d’Anglet a dit qu’il y a des friches industrielles inutilisées, ce sont celles-ci qui doivent être mobilisées avant de raser la forêt. Même si cela coûte plus cher car celle d’Anglet doit d’abord être dépolluée. Ce qui est difficile est de remettre en cause l’aménagement du territoire et notamment l’urbanisme, on sait qu’il faut monter en hauteur et arrêter de s’étaler. Pour l’université de Montaury, on peut densifier un peu plus en agrandissant les étages.» explique Jacques Descargues, président de l’association de défense de l’environnement 5 cantons la Barre, au micro de FranceBleu
Les écureuils du GNSA ont initié les enfants à grimper dans les arbres – Crédit : Myriam Boyé
« Le maire a parlé de 16ha là où nous on parle de 22ha et 60 espèces protégées. La CAPB nous expliqué qu’ils sont en train de réfléchir au tracé qu’ils veulent faire. Cette forêt a été progressivement grignotée dès les années 50, quand l’aéroport a été construit. Aujourd’hui, il est indispensable de la préserver car elle protège Bernain, Montaury et Aritxague des inondations » explique Mahaut Francini, docteure en sciences de gestion (UPEC) et spécialiste des lanceurs d’alerte à l’origine de la pétition contre le projet d’extension de la ZAC Arkinova, pour La Relève et La Peste
La forêt de Juzan – Crédit : Myriam Boyé
Un corridor écologique
En plus d’absorber tant bien que mal les émissions de gaz à effet de serre de l’aéroport voisin, la forêt de Juzan est aussi un espace de fraîcheur et de verdure inestimable pour les habitants, ainsi que nous l’explique Pantxika (Françoise), une riveraine de longue date.
« Je marche 3 fois par semaine depuis 20 ans dans la forêt de Juzan ! Quand je reçois du monde, je les emmène en balade ici sans prendre de voitures pour leur montrer qu’on n’a pas besoin d’aller loin pour être au vert et prendre un bon bol d’air frais, cela fait une jolie boucle de 7km. Je suis contre le projet d’extension ! La forêt est devenue sauvage, il faut la laisser comme ça » explique-t-elle pour La Relève et La Peste
Le collectif Minuit Douze a dansé pour la forêt de Juzan – Crédit : Myriam Boyé
La mobilisation artistique et festive du 20 avril a confirmé l’amour de celles et ceux qui connaissent la forêt. Elle a aussi été une jolie découverte pour les angloys qui en avaient entendu parler mais ne la connaissaient pas vraiment, comme ce groupe d’amis émerveillés par l’âge des arbres et la fraîcheur qu’ils y trouvent en cette journée de canicule.
« On est très heureux de cette journée. On a réussi à créer des souvenirs entre les gens et la forêt à travers les performances artistiques et les ateliers. Quand on a tracté les gens connaissaient la forêt mais pas forcément son nom : elle a maintenant à la fois un nom, un visage et une présence dans les esprits. Toutes les personnes à qui j’ai parlé m’ont dit qu’ils étaient à fond et allaient nous donner de l’énergie pour poursuivre » se réjouit Lalie Ory, l’une des organisatrices, pour La Relève et La Peste
Car les collectifs pensent déjà à la suite. Pour eux, l’idée n’est pas de sanctuariser une forêt au milieu du béton, mais de créer un véritable corridor écologique. En ligne de mire : tout le contour de l’aéroport de Biarritz où se déploient 160 hectares de forêt, « un véritable balcon vert que l’on veut protéger » précise Mahaut Francini.
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