Le glacier Thwaites, ou « glacier de l’apocalypse », situé à l’Ouest de l’Antarctique, est aussi vaste que la Grande-Bretagne, et la plateforme de glace qui le maintient à la roche est en train de fondre. Si ce glacier se détache pour disparaître dans l’océan, il pourrait entraîner une montée des mers de 65 centimètres. Mais ce chiffre pourrait être en-deçà de la réalité.
Le glacier fait en tout 120 km de large pour 600 km de long, et est d’une profondeur de 3 km. Particulièrement surveillé par les spécialistes depuis 25 ans, il est surnommé le « glacier de l’apocalypse » par différents médias car sa vitesse d’écoulement s’accélère depuis les années 2000. Sa dislocation totale pourrait contribuer significativement à l’élévation du niveau de la mer.
Le glacier tend à se détacher par morceaux, par l’avant, depuis trente ou quarante ans. Selon le journal Science, il est responsable d’environ 4 % de la montée des eaux chaque année. D’après l’étude, la fracture totale du glacier Thwaites de son point d’ancrage pourrait élever ce chiffre à 25 %.
Les glaciologues ont sonné l’alerte au mois de décembre, car de nouvelles fissures ont été repérées dans le glacier par observation satellite et radar de sondage de sol. Les fractures diagonales grandissent, et ces dernières couvrent plus de 40 km de surface. Certaines d’entre elles progressent de 2 km chaque année.
Les scientifiques estiment que le glacier pourrait ainsi se détacher dans les années à venir, et possiblement d’ici 5 ans.
Les modélisations scientifiques tendent à prouver que de l’eau chaude s’infiltre sous le bloc de glace, ce qui fait fondre le glacier et le détache progressivement de son point d’ancrage, le substratum rocheux.
Atsuhiro Muto, professeur spécialisé dans les Sciences de la terre et de l’environnement de l’Université Temple, à Philadelphie, explique : « Le réchauffement climatique modifie la circulation de courants d’air au-dessus de l’Antarctique et cela a des effets sur les courants océaniques. Cela fait remonter beaucoup plus de courants chauds à la surface ».
Les différences de températures s’infiltrant au cœur de la glace provoquent également des turbulences qui attirent les eaux chaudes, formant ainsi une boucle de rétroaction, ce qui accélère le processus.
Thwaites est par ailleurs situé à une position stratégique. Il joue le rôle de bouchon de glace, à l’entrée d’une série de vallées situées en dessous du niveau de la mer. Il est ainsi probable que l’eau chaude s’infiltre à l’intérieur de ces terres.
Selon les pronostics des scientifiques, la fonte entière du glacier entraînerait à lui-seul la montée des océans de 63 centimètres. Mais la dislocation pourrait également être le début d’une réaction en chaîne dans l’Antarctique de l’Ouest, qui provoquerait l’effondrement de glaciers voisins. Dans ce scénario-là, la montée des océans pourrait s’élever à 3,3 mètres.
Ce scénario catastrophe menacerait les millions de personnes et espèces animales qui vivent sur les côtes à travers le monde.
Si l’eau montait d’un mètre seulement, certains archipels, comme les Tuvalu, seraient ensevelis par les eaux, mais aussi des villes, telles que Venise, Amsterdam ou la Rochelle. Le phénomène obligerait des dizaines de milliers de personnes à fuir leurs domiciles et à devenir des réfugiés climatiques.
Selon le rapport du GIEC, sans la fonte du glacier Thwaites, si les émissions continuent au rythme actuel, les océans pourraient monter d’un mètre d’ici 2100, et d’une vingtaine de centimètres d’ici 2050.
La montée du niveau des mers est également dangereuse parce qu’elle augmenterait la fréquence des inondations et des vagues de submersion. D’ici dix ans, il sera déjà question d’une « submersion à marée haute de ports et d’infrastructures côtières dans la plupart des régions habitées du globe ».
Plusieurs expéditions sont actuellement menées pour collecter des données sur les glaciers et préciser leurs potentiels d’évolution. David Holland est un océanographe qui se rendra directement près du glacier de Thwaites pour mesurer les températures, la salinité et la turbulence des eaux du Pacifique.
Il explique : « Nous voulons prêter attention aux choses qui sont plausibles, et l’effondrement rapide de ce glacier est une possibilité […] Ce qu’il faut, c’est une prévision des glaciers qui ressemble au genre de précision que les prévisions météorologiques fournissent actuellement. ».
Il précise : « Si (l’eau) est au-dessus du point de congélation, et dans l’eau salée, cela signifie au-dessus de -2 degrés centigrades, ce n’est pas durable. Un glacier ne peut pas survivre à cela. »
La montée des eaux provoque déjà de nombreux déplacements de population. Le consensus pour les experts, glaciologues et directeurs est clair : afin d’éviter une augmentation drastique du niveau des mers à échelle mondiale, il faut immédiatement réduire nos émissions de gaz à effet de serre.
Pour aller plus loin : L’Antarctique a atteint pour la première fois une température record de 20,75°C
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