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Landes : la justice suspend les travaux d’une ligne très haute tension pour protéger les cétacés

Au large des côtes landaises, c’est un bioacousticien missionné comme observateur indépendant sur le navire des travaux qui a lancé l’alerte : le protocole de protection des mammifères marins a cessé d’être appliqué dès le passage de la frontière française, alors qu’il l’était en Espagne.

Coup d’arrêt pour la ligne Très Haute Tension de 400 000 volts qui crée la polémique dans les Landes. Le tribunal judiciaire de Bayonne a suspendu les travaux en raison des risques qu’ils font peser sur la biodiversité marine.

Une ligne THT menaçante pour la biodiversité

C’est une victoire d’étape importante pour les associations environnementales françaises opposées (Défenses des Milieux Aquatiques, Sea Shepherd France et Landes Aquitaine Environnement) aux travaux du projet d’interconnexion électrique entre la France et l’Espagne. Mercredi 14 août, le tribunal judiciaire a décidé de suspendre immédiatement les travaux de bathymétrie pour 4 mois « sous astreinte de 10 000 euros par jour et par fait constaté ».

En cause : un énorme navire scannant les fonds marins à l’aide d’un sonar surpuissant, jugé trop dangereux pour les mammifères marins.

« On a accueilli cette décision avec bonheur ! On est tellement outrés de voir à quel point RTE arrive comme un bulldozer et à quel point tous les droits sont bafoués. Cette fois, on a eu affaire à des magistrats extraordinaires qui ont bien appréhendé le dossier et ses enjeux environnementaux » se réjouit Marie Darzacq, présidente et membre de l’association Landes Aquitaine Environnement, auprès de La Relève et La Peste

Dans les Landes, voilà trois ans que la population locale s’oppose de plus en plus fermement à ce projet de ligne Très Haute Tension, jamais réalisé dans le monde auparavant. Piloté par la REE (Red Eléctrica de España) et le français RTE (Réseau Transport d’Electricité, filiale d’EDF), ce projet d’interconnexion électrique titanesque vise à relier Cubnezais, en Gironde, à Gatixa, au nord de Bilbao via une ligne Très Haute Tension (THT) de 400 000 Volts en courant continu et longue de 400km.

Depuis le début, riverains et associations reprochent à RTE, le porteur français du projet, de mener les travaux sans chercher à en minimiser l’impact sur l’environnement. Au large des côtes landaises, c’est un bioacousticien missionné comme observateur indépendant sur le navire des travaux qui a lancé l’alerte : le protocole de protection des mammifères marins a cessé d’être appliqué dès le passage de la frontière française, alors qu’il l’était en Espagne.

Pourtant, au moins dix-sept espèces de mammifères marins (dauphins, grands cachalots ou orques), classées protégées, évoluent dans la zone concernée par les travaux. La raison : le Gouf, un canyon sous-marin leur offre un habitat idyllique.

« On reproche à RTE de ne pas avoir fait dans sa demande l’exposé du sujet sur la bathymétrie. Ces pré-travaux de l’enfouissement du câble permettent de voir les fonds marins avec des sonars qui vont jusqu’à 220 dB. En Espagne, l’étude d’impact a révélé que ces ondes acoustiques peuvent faire fuir ou pire, causer la mort de cétacés » révèle Louise Dumont Saint Priest, l’une des avocates en charge du dossier, pour La Relève et La Peste

Au-delà des cétacés, d’autres espèces maritimes comme les mollusques ou les poissons migratuers peuvent pâtir des sonars. Les saumons peuvent ainsi être affaiblis et désorientés, risquant alors de perdre leur route migratoire.

C’est pourquoi, dans l’ordonnance de référé pénal environnemental, que La Relève et La Peste a pu consulter, la juge donne un mois à RTE pour envoyer à la justice « une étude d’impact des campagnes d’études préalables à la pose de câbles sous-marins d’interconnexion électrique entre la France et l’Espagne en mer territoriale ».

Surtout, elle exige un « plan d’atténuation des effets du bruit sur les mammifères marins et les milieux aquatiques » ainsi qu’un « rapport mensuel écrit et détaillé garantissant l’effectivité des mesures ordonnées sur la totalité des campagnes d’études programmées ».

Un combat dans les tribunaux

En effet, RTE aurait dû mettre en place les mêmes mesures de protection de la faune marine que son homologue espagnol. Parmi elles : la mise en place d’une zone d’exclusion de 750m autour du périmètre d’émission des sonars, un démarrage progressif des émissions sonores, et la surveillance acoustique et visuelle continue par des observateurs à bord, à l’aide de jumelles et hydrophones.

Si RTE n’a pour l’instant pas fait appel de la décision, le combat judiciaire est loin d’être terminé pour les associations environnementales. Une enquête est en cours sur le parquet au niveau pénal avec 5 chefs d’inculpation dont la « destruction illicite d’une espèce animale non domestique », « l’altération illicite de l’habitat d’une espèce animale » ou encore la « perturbation volontaire illicite de l’habitat d’une espèce animale ».

« Nous, on leur a bien dit que le tracé qu’ils souhaitaient nous imposer est le plus impactant pour l’environnement et qu’on serait là sur tous les fronts. Alors que s’ils avaient fait un tracé sur les terres dégradées de l’A63, comme on le demande, on aurait laissé faire » précise Marie Darzacq, présidente et membre de l’association Landes Aquitaine Environnement, auprès de La Relève et La Peste

Car en mer comme sur terre, les travaux de la ligne THT posent de sérieuses menaces pour la biodiversité animale et végétale. Dès 2022, le Conseil national de protection de la nature (CNPN donnait un avis défavorable au projet en raison d’un « grand nombre d’espèces de batraciens, reptiles, oiseaux, insectes et mammifères représentant un enjeu fort sur plusieurs zones impactées par le projet ». Les agriculteurs concernés par le tracé sont également très inquiets pour leurs animaux et les insectes.

« On va scruter chacun des travaux pour déterminer s’ils le font sans prendre en compte les espèces protégées, il nous semble qu’il y a plein de pans oubliés » conclut Louise Dumont Saint Priest

Laurie Debove

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