Un carton rempli de déchets et un message : « Vous avez oublié quelque chose au parc national de Khao Yai ». Ce colis a été envoyé à un groupe de touristes dont la tente a été retrouvée abandonnée et pleine de détritus en plein cœur de ce parc de Thaïlande. Grâce à la fiche de renseignements remplie à son arrivée, le groupe a été retrouvé.
Un renforcement des mesures de protection des parcs
La mesure est inédite : les autorités du parc n’ont pas l’habitude de renvoyer leurs déchets aux visiteurs irrespectueux. Mais cette fois, l’événement a fait réagir le ministre de l’Environnement, Varawut Silpa-archa.
Celui-ci a publié une photo de la tente ainsi qu’un commentaire : « Je vais ramasser tous vos détritus, les empaqueter soigneusement et vous les expédier en souvenir. »
En Thaïlande, la législation est stricte : les pollueurs peuvent écoper d’une amende allant jusqu’à 13 500 euros et cinq ans d’emprisonnement. De plus, l’Office thaïlandais des parcs nationaux avait prévu en 2018 d’interdiction l’utilisation du plastique au sein des parcs. Dans les faits, pointe le Bangkok Post :
« Les restaurants des parcs nationaux continuent de servir leurs produits comme avant, en abusant des emballages plastique. Et les clients n’y trouvent rien à redire.”
La surfréquentation touristique et la pollution qu’elle entraîne sont une véritable plaie pour les parcs. En plus de défigurer le paysage, les déchets tuent les animaux, à l’image de ce jeune cerf retrouvé mort l’année dernière avec 7kg de plastique dans l’estomac.
En plus d’affirmer la sévérité du gouvernement vis-à-vis des pollueurs, le ministre de l’Environnement a annoncé que les parcs naturels fermeraient dorénavant plusieurs mois par an afin de limiter les impacts environnementaux du tourisme. En effet, la pandémie a permis d’observer un changement flagrant.
« Les parcs nationaux et la faune thaïlandaise ont eu le temps de se remettre des effets néfastes du tourisme tels que les déchets au cours des six derniers mois. » a commenté Charinya Kiatlapnachai, directrice de l’autorité du tourisme de Thaïlande.
« Le parc a pu se regéner de lui-même », observe Chananya Kanchanasaka, un vétérinaire du parc cité par le New York Times. « C’est formidable de voir que les animaux sortent ».
Déserté par les humains, le parc a vu les quelques centaines d’éléphants vivant sur place se promener librement durant le confinement. D’autres espèces habituellement peu visibles sont sorties, comme l’ours brun d’Asie ou le gaur, plus gros bovin du monde.
La pollution plastique en Thaïlande
Cependant les parcs naturels sont loin d’être les seuls espaces impactés par les déchets en Thaïlande. Le pays croule littéralement sous le plastique, extrêmement présent dans la vie quotidienne. Alors que le gouvernement vient enfin d’interdire les sacs à usage unique dans les supermarchés, les statistiques affichent une consommation moyenne de 8 sacs par jour et par habitant.
Avec la pandémie, la consommation d’emballages a explosé. Déjà très prisés par une population qui cuisine peu à domicile, les livraisons de repas ont connu un boom avec la fermeture des restaurants.
Selon Wijarn Simachaya, président de l’institut thaïlandais de l’environnement, les déchets plastiques « ont quasiment doublé dans les zones urbaines de janvier à mars. En avril, sur un an, ils ont bondi de 62% rien qu’à Bangkok ».
Les canaux de la ville débordent d’emballages par endroits, menaçant de boucher les égouts de la mégalopole aux 11 millions d’habitants. Ces bouteilles, sachets et autres récipients, mélangés à la végétation et à la nourriture, seront impossibles à recycler. La plupart échoueront dans les rivières et les océans.
Enfin, aux déchets produits par les Thaïlandais eux-mêmes s’ajoutent ceux importés depuis l’Occident. En 2017, après le refus de la Chine de continuer d’accepter les poubelles des autres pays, l’importation de déchets plastiques avait augmenté de 1 370 % en Thaïlande.