Près de 2 ans après les premières alertes de Générations Futures, l’Anses confirme la présence généralisée de TFA dans l’eau potable. Le TFA est toxique pour le foie et suspecté d'être toxique pour la reproduction humaine.
L’Anses publie aujourd’hui mercredi 3 décembre les résultats de sa dernière campagne exploratoire de mesures des PFAS dans l’eau potable, une problématique cruciale dont nous vous parlons dans notre livre-journal EAU. Cette campagne a recherché durant 2023-2025 les 20 PFAS de la directive eau potable, ainsi que 15 autres substances PFAS susceptibles d’être présentes dans l’eau.
Sur plus de 600 prélèvements d’eau potable à travers le pays, 92,2 % contiennent des traces d’acide trifluoroacétique (TFA), le plus petit des PFAS. Encore mal étudié, il est en voie d’être classé toxique pour la reproduction dans l’Union européenne (UE), et présente aussi des indices de toxicité pour le foie.
« Dans l’eau brute ou distribuée, le TFA a été retrouvé à plus de 100 ng/L. Si la limite réglementaire pour les métabolites de pesticides pertinents (dont fait partie le TFA) était appliquée, l’eau potable en France serait ainsi “non conforme” à la réglementation dans 92% des situations », décrypte l’ONG Générations Futures.
En moyenne, le TFA a été retrouvé à des teneurs de 780 ng/L (bien plus que les 100 ng/L règlementaires). Le prélèvement d’eau le plus touché est monté jusqu’à 25000 ng/L en aval d’une usine. Le nom n’est pas mentionné par l’Anses, mais les ONGs soupçonnent celle de Solvay à Salindres dans le Gard.
« Je n’ai jamais vu de tels niveaux de concentration de TFA dans l’eau potable, a réagi le chimiste de l’environnement Hans Peter Arp, un des meilleurs spécialistes mondiaux du TFA, auprès de LeMonde. Et ces concentrations vont continuer à augmenter en raison de la hausse attendue de celles des précurseurs du TFA [gaz fluorés, pesticides…] dans les écosystèmes. »
Dans son rapport, l’Anses ne reconnaît qu’une des principales sources d’émission du TFA : les dépositions atmosphériques liées aux émissions de gaz fluorés réfrigérants. Pourtant, des travaux d’autres agences sanitaires en Europe, concluent que l’épandage de pesticides PFAS seraient en grande partie responsables de la contamination des eaux souterraines en zone agricole.
Au Danemark, 23 pesticides PFAS ont été interdits en raison des risques d’émission de TFA. Quant à la Suède, elle a récemment annoncé revoir les autorisations de 38 produits à base de pesticides PFAS.
« Les pouvoirs publics se doivent de réagir fort et vite pour stopper l’accumulation du TFA dans l’eau potable et l’alimentation », a réagi Pauline Cervan, toxicologue chez Générations Futures. « Pour ce faire, nous demandons à l’Anses de reconnaître formellement le rôle des pesticides dans cette contamination massive. »
Si la campagne de l’Anses ne concerne pas les eaux en bouteille, des analyses réalisées en 2024 par le réseau Pesticide Action Network Europe ont révélé que les eaux embouteillées étaient aussi contaminées par le TFA.
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