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La LGV Lyon-Turin menace l’approvisionnement en eau potable en Maurienne

Villarodin-Bourget n'est pas un cas isolé, à Orelle aussi, le débit d’un forage s'est considérablement réduit après que Telt a creusé une première portion d'une galerie de reconnaissance. 

Depuis 2020, Erica Sandford, hydrogéologue indépendante à Modane, en Savoie, tente d'alerter les autorités sur les menaces que font peser les travaux de la LGV Lyon-Turin sur l'approvisionnement en eau potable des communes de Maurienne, dans les Alpes.

La ligne grande vitesse Lyon-Turin, prévue pour 2033, fait peser des risques sur l’approvisionnement en eau potable dans les villages de Maurienne, en Savoie. Alors que la préoccupation est parfois oubliée, certains habitants et élus se mobilisent pour alerter les autorités.

En 2007 déjà, dans la déclaration d’utilité publique qui autorise le projet Lyon-Turin, il était pourtant évoqué qu’une partie de la montagne allait être drainée, sans que l’alerte n’ait été entendue.

Plusieurs sources déjà affectées

En 2003, l’eau des fontaines du village de Villarodin-Bourget, en Maurienne, cesse de couler. En cause, la déviation de la circulation de l’eau dûe aux creusements d’une des descenderies d’accès aux tunnels du Lyon-Turin.

Afin de réalimenter les fontaines, TELT a créé un réseau de conduites de quatre kilomètres depuis un autre captage, situé plus haut dans la vallée. Un épisode qui a ranimé les interrogations habitantes autour de l’approvisionnement en eau potable.

Villarodin-Bourget n’est pas un cas isolé, à Orelle aussi, le débit d’un forage s’est considérablement réduit après que Telt a creusé une première portion d’une galerie de reconnaissance.

« L’eau jaillissait avec un débit de 96 litres par minute ; et aujourd’hui, le maire estime qu’il n’est que de quelques litres par minute », ajoute Erica Sandford, pour La Relève et la Peste.

Dans la même commune, près du barrage du Pont-des-Chèvres, selon un document interne à EDF révélé par Médiapart, la nappe s’est abaissée de 150 mètres suite au percement de ce même tronçon. Le relevé du piézomètre, qui mesure le niveau d’eau dans la nappe, appartenant à Telt, a brusquement chuté en l’espace de quelques  mois.

« En général, les nappes d’eau souterraine alimentent les cours d’eau, pas l’inverse. Les volumes d’eau en souterrain sont considérablement plus importants que les rivières qu’on voit couler. Si la nappe vient à baisser, on retire alors un apport aux rivières », explique l’hydrogéologue à La Relève et la Peste.

Le creusement de la galerie de reconnaissance à Orelle n’a pas eu que pour effet la baisse de la nappe, mais a également provoqué des tassements de terrain.

« Si les fractures du sol sont pleines d’eau, celui-ci se maintient, mais si l’on vide l’eau de la montagne, le terrain peut s’affaisser. » 

L’agence Copernicus avait par ailleurs observé des tassements de terrain plus importants après le creusement de la galerie.

Zones de protection des captages d’eau © Enquête publique Antea Group

Des mesures transitoires tardives

En octobre 2024, TELT publie un appel d’offres afin de répondre aux éventuelles coupures d’eau potable, si le chantier en était la cause.

« Le Lyon-Turin a l’obligation de rétablir les usages en eau potable et doit prévoir des mesures d’urgence, transitoires et pérennes, précise Erica Sandford. Si une source agricole ou privée vient à tarir, en raison des chantiers, TELT s’est engagé à compenser les pertes. »

Pour assurer l’approvisionnement en eau, Telt envisage le réapprovisionnement des réservoirs par  camions-citernes ou par pick-ups, et la livraison de bouteilles d’eau aux riverains des communes. L’appel d’offres s’est cependant fait attendre puisque le maître d’œuvre en avait l’obligation depuis 2007.

Les captages d’eau, en principe protégés par des arrêtés préfectoraux

Depuis 2015 et jusqu’à l’été 2024, dix captages d’eau potable disposaient d’arrêtés préfectoraux de déclaration d’utilité publique interdisant, entre autres, le creusement de tunnels, qui eux étaient autorisés dès 2007. 

« Or, quand le préfet a signé ces arrêtés de protection de ces captages, personne ne s’était rendu compte qu’ils entraient en contradiction avec le creusement des tunnels », poursuit Erica Sandford.

Quand en 2021 on relève cette incompatibilité, l’État demande alors une modification des arrêtés de protection des captages, sur l’avis d’hydrogéologues indépendants.

Ainsi, à l’été 2024, « en dépit des conséquences déjà observées », l’enquête publique aboutit à l’autorisation du creusement des tunnels dans les périmètres de protection de ces captages d’eau potable. Quitte à pénaliser les habitants…

 

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Camille Tribout

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