Après près de 3 ans de combat, Chapelle Darblay le dernier site français de fabrication de papier journal et d’emballage 100 % recyclé, est enfin sauvé. Ce 10 mai 2022, la métropole Rouen Normandie vient d’officiellement de l’acquérir pour la revendre aux industriels Fibre Excellence et Véolia, en accord avec les salariés. La papeterie de Grand-Couronne est fermée depuis juillet 2020. C’est un soulagement intense pour celles et ceux qui se battaient pour la survie du site, ainsi que le recyclage en France, à l’heure où l’industrie du papier est en crise à l’international.
Le site Chapelle Darblay dispose d’une capacité de recyclage de 480 000 tonnes par an, soit le résultat du tri de 24 millions d’habitants dans un rayon de 400 km, incluant notamment l’agglomération parisienne.
En 2020, après 90 ans de fabrication du papier journal, l’usine avait été fermée, et 228 salariés avaient été licenciés. En octobre 2021, son propriétaire, le groupe finlandais UPM, s’était décidé sur une vente au groupement Samfi-Paprec, pour un projet de reconversion vers de la production d’hydrogène. Une unité de traitement de papiers et carton à recycler était également prévue, mais avec très peu d’emplois (50), et le recyclage délocalisé en Allemagne.
Mais en 2022, la Métropole de Rouen déclare son droit de préemption. Nicolas Mayer-Rossignol, Président de la Métropole Rouen Normandie, explique dans un communiqué :
« (…) un certain nombre de machines-outils et d’équipements à vocation spécifiquement papetière, dont la présence est indispensable à l’exploitation utile de l’ensemble industriel, ne sont pas compris dans la vente. De sorte qu’en l’état, le projet retenu par le vendeur UPM pour la Chapelle-Darblay s’articule autour d’une cession partielle couvrant essentiellement les murs et d’une vente à la découpe des outils industriels eux-mêmes, dont on comprend qu’ils ont vocation à être repris ou cédés au plus offrant. En d’autres termes, sans intervention de la Métropole, le site aurait bien eu vocation à être démantelé. »
Il déclare également : « Nos objectifs stratégiques sont clairs : développement de l’économie circulaire, investissements pour favoriser des activités de recyclage papier/carton, préservation de l’emploi et des compétences dans ces domaines. »
Le délai de recours de deux mois a été dépassé et ainsi, le mardi 10 mai, la Métropole acquiert officiellement la papeterie Chapelle Darblay pour 9,6 millions d’euros, machines comprises. Elle la revendra directement au groupement du numéro un mondial de l’eau et des déchets, Veolia, associé à Fibre excellence, premier producteur français de pâte à papier. Le consortium va se spécialiser dans la production de cartons et de la ouate de cellulose de papier, pour l’isolation thermique.
L’offre initiale prévoyait 120 millions d’euros d’investissement afin de moderniser les outils de production et produire 400 000 tonnes de carton d’emballage issus de papier et carton recyclés collectés en France. La création de deux cent emplois directs est également incluse dans le projet. L’énergie devait être produite par une chaudière biomasse, alimentée par des déchets organiques.
La CGT, l’un des acteurs du combat pour sauver l’usine, a commenté dans un communiqué :
« Cette victoire est le résultat de la bagarre sans faille des représentants du personnel de Chapelle Darblay mais aussi de tous « les Pap Chap », de toute la CGT, du collectif « Plus Jamais Ça », de tous ceux et celles qui ont soutenu « les Pap Chap » dans leur boite et dans la rue, de tous ceux et celles qui ont œuvré à la reprise, de près comme de loin, et soyons fous… même des personnalités du monde politique qui nous ont suivis et qui ont appuyé cette lutte. »
Chapelle Darblay ne redémarrera pas avant 12, voire 18 mois, mais les salariés, syndicats et écologistes se réjouissent de la nouvelle après une lutte acharnée pendant trois ans. Une belle preuve que l’union fait la force !
Crédit photo couv : CHARLY TRIBALLEAU / AFP