Parti le 1er juin 2025 de Sicile, le voilier « Madleen », affrété par la Coalition de la flottille pour la liberté, espère acheminer une aide humanitaire à Gaza. A l'heure où l’armée israélienne tente de prendre le contrôle total de Gaza, les militants entendent envoyer un message à une communauté internationale "défaillante".
« La dimension politique est forte. Nous portons une voix pour briser ce blocus humanitaire » explique Rima Hassan pour La Relève et La Peste. Depuis le 2 mars 2025, Israël a imposé un blocus total sur Gaza, interdisant l’entrée de nourriture, d’eau, de médicaments et de carburants.
Bien qu’une reprise limitée de l’aide humanitaire ait été autorisée le 19 mai 2025 pour des raisons diplomatiques, les restrictions restent sévères. Human Rights Watch a accusé Israël d’utiliser le blocus comme un « outil d’extermination ».
Ce blocus a précédé le début de l’opération israélienne « Chars de Gédéon », visant officiellement à prendre « le contrôle de tout le territoire de la bande de Gaza » pour « vaincre le Hamas » et « libérer les otages ».
Ligne du haut, de gauche à droite : Thiago Avila, Rima Hassan, Yasemin Acar / Ligne du bas, de gauche à droite : Şuayb Ordu, Reva Viard, Marco Van Rennes, Pascal Morieras, Sergio Toribio, Greta Thunberg – Crédit : Freedom Flotilla
Une situation humanitaire catastrophique
Nommé en hommage à la première et unique pêcheuse de Gaza en 2014, le « Madleen » apporte des denrées alimentaires, « riz, farine », et également de l’aide médicale, « plein de désinfectants, de compresses, de pansements », détaille Reva Viard, écureuil et l’un des douze participants à la mission.
« On a des béquilles qui sont très symboliques puisqu’elles sont interdites depuis un certain nombre d’années par Israël. On a aussi quelques prothèses » continue t-il pour La Relève et La Peste.
Reva en train de s’occuper des voiles de la Madleen
Cette initiative entend mettre en lumière la situation extrême dans laquelle sont plongés les gazaouis. Un rapport de l’IPC (Integrated Food Security Phase Classification), publié en mai 2025, indique que toute la population de Gaza, environ 2,1 millions de personnes, est confrontée à une insécurité alimentaire aiguë. Environ 470 000 personnes (22 %) sont en situation de « catastrophe », le niveau le plus élevé de la classification.
« Nous assistons à la famine systématique de 2 millions de personnes. Le monde ne peut pas rester spectateur silencieux. Chacun d’entre nous a l’obligation morale de faire tout ce qui est en son pouvoir pour lutter pour une Palestine libre » explique Greta Thunberg.
Greta Thunberg sur le Madleen
Comme si cela ne suffisait pas, l’accès à l’aide humanitaire est dangereux. Le 27 mai 2025, 75 personnes ont été tuées et plus de 400 blessées lors de distributions de denrées, selon le ministère de la Santé de Gaza. Le 3 juin, 27 civils ont perdu la vie près d’un centre d’aide. L’ONU a qualifié ces attaques de « crimes de guerre ».
« Israël a un plan d’occupation totale, de peuplement et de colonisation qui nécessite un nettoyage ethnique de la population qui occupe ce territoire. Les seuls leviers politiques dont nous disposons aujourd’hui sont ceux des sanctions » argumente Rima Hassan auprès de La Relève et La Peste.
Après le survol répété du « Madleen » par un drone la nuit dernière, l’équipage a besoin de l’aide du monde entier pour identifier et contacter leur ministère des Affaires étrangères afin d’exiger leur sécurité. Le danger est réel : un mois avant son départ, des drones israéliens ont bombardé le Conscience, un autre navire humanitaire de la Flottille de la Liberté, au large de Malte. Quant à l’armée israélienne, elle vient d’annoncer « se préparer » à l’arrivée de la Freedom Flotilla et « suivra les instructions de Netanyahou ».
Il y a quinze ans, Israël a mené une attaque illégale et meurtrière contre le Mavi Marmara, au cours de laquelle dix bénévoles humanitaires ont été tués alors qu’ils tentaient d’acheminer de l’aide à Gaza.
Brief tendu sur le Madleen alors qu’un drone non identifié survole le bateau durant la nuit – Crédit : Reva Viard
« Aller sur le terrain de la sanction »
Pour l’heure, le convoi n’a pas obtenu « énormément de réactions », les seules sont venues de politiques d’alliés de la cause palestinienne au sens large. « On espère pouvoir obtenir plus de réactions à l’échelle des gouvernements, notamment européens » développe l’eurodéputée pour La Relève et La Peste.
Cette mission humanitaire intervient dans un contexte de montée de la défiance de la communauté internationale envers l’État israëlien. « Les réactions sont de plus en plus importantes, elles se précisent, notamment quelques déclarations visant à aller sur le terrain de la sanction » précise Rima Hassan.
Le 19 mai 2025, les dirigeants Français, Britannique et Canadien ont menacé de prendre des « mesures concrètes » contre Israël si celui-ci ne mettait pas fin à son offensive militaire à Gaza, et ne levait pas les restrictions à l’aide humanitaire.
Le Madleen avant son départ, 1er juin 2025 – Crédit : Tan Safi
Le 20 mai 2025, la cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, a annoncé que l’UE allait réviser l’accord d’association avec Israël en raison de la situation « catastrophique » à Gaza. Cette révision pourrait aboutir à la suspension du statut commercial préférentiel d’Israël avec l’UE.
Ce même jour, le Royaume-Uni a officialisé la suspension des négociations de libre-échange avec Israël et l’imposition de nouvelles sanctions contre les colonies en Cisjordanie.
L’UE envisage des sanctions économiques ciblées, notamment sur le commerce, les services et les réserves de change, pour faire pression sur Israël. Le 4 juin 2025, Pedro Sánchez, le président espagnol, a annulé un contrat de 287,5 millions d’euros d’achat de 1 680 missiles antichars produits par une entreprise israélienne.
Le convoi humanitaire espère accélérer et concrétiser cette vague de déclarations et sanctions en mettant en lumière la situation humanitaire à Gaza.
À bord de la « Madleen » (par ordre alphabétique), se trouvent : Yasemin Acar – Allemagne,Baptiste Andre – France, Thiago Avila – Brésil, Omar Faiad – France, Rima Hassan – France, Pascal Maurieras – France, Yanis Mhamdi – France, Şuayb Ordu – Turquie, Greta Thunberg – Suède, Sergio Toribio – Espagne, Marco Van Rennes – Pays-Bas, Reva Viard – France
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