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En 2020, la concentration de CO2 dans l’atmosphère a augmenté malgré une baisse mondiale des émissions

Si la moyenne annuelle s’en rapproche de plus en plus dangereusement, nous avions déjà atteint un record le 12 mai 2019, avec un niveau de 415 parties par millions de CO2 dans l’atmosphère pour la première fois en 3 millions d’années ! La dernière fois, c'était durant l’ère géologique du Pliocène. A cette époque, les températures étaient de 3 à 4 °C plus élevées, des arbres poussaient en Antarctique et le niveau des océans était 15 mètres plus haut.

Comme chaque année, le programme de recherche européen 4C (Interactions climat-carbone au siècle actuel) fait le point sur le « budget Carbone mondial ». En 2020, les concentrations mondiales de CO2 ont continué à augmenter, atteignant 412 ppm, malgré une baisse de 7% des émissions annuelles par rapport à 2019, provoquée par les mesures prises face à la pandémie de COVID-19. Cette augmentation des concentrations de CO2 s’explique par des émissions de gaz à effet de serre qui sont restées relativement élevées, mais aussi d’une plus faible dynamique des sols et forêts comme puits de carbone terrestre. Leur constat est sans appel : le niveau de CO2 atmosphérique, et par conséquent le climat mondial, ne se stabilisera que lorsque les émissions mondiales de CO2 seront proches de zéro.

Une diminution record des émissions mondiales de CO2 en 2020

Le Global Carbon Project est un projet de recherche international dans le cadre du programme Future Earth et du Programme Mondial de Recherche sur le Climat (WCRP) de l’organisation mondiale de la météorologie. Il a pour objectif d’apporter une connaissance complète du cycle global du carbone dans ses dimensions biophysiques et humaines ainsi que leurs interactions.

Depuis 2006, il met à jour chaque année le Bilan Mondial du Carbone pour mieux anticiper les impacts, souvent négatifs, des activités humaines sur le climat et la meilleure façon de rester en-dessous des +2°C de réchauffement moyen.

2020 en est la 15ème édition, pour le moins frappante puisque l’année a été marquée par une baisse mondiale de 7% des émissions de CO2 fossile en raison du confinement instauré en réaction au COVID-19. Une baisse jamais observée auparavant.

Les émissions provenant des transports représentent la plus grande part de la baisse mondiale. Ceux des transports, tels que les trajets en voiture, ont presque chuté de moitié lors des confinements. En décembre 2020, les émissions du transport routier et de l’aviation étaient toujours inférieures à leurs niveaux de 2019, d’environ 10% et 40%, respectivement, en raison des restrictions persistantes.

Cette baisse des émissions a été plus prononcée aux États-Unis (-12 %), dans l’UE-27 (-11 %) et en Inde (-9 %), les conséquences des restrictions de déplacement COVID-19 venant accroître une tendance de diminution déjà en cours, et a été moins prononcée en Chine (-1,7 %), où les mesures de restriction ont été prises au début de l’année et ont été plus limitées dans le temps.

Mais la baisse des émissions directes des pays occidentaux ne doit pas faire oublier que leurs émissions importées sont en hausse. Ainsi, en France, les émissions de gaz à effet de serre ont explosé de plus de 78% entre 1995 et 2018 à cause de l’importation des biens de consommation des particuliers ou des besoins industriels, notamment dans les secteurs de la raffinerie, de l’électronique et du textile.

Au total, les émissions de CO₂ provenant des activités humaines (CO fossile et du changement d’utilisation des terres) représentent environ 40 milliards de tonnes de CO₂ en 2020 (aussi appelées gigatonnes), comparé à 43 milliards de tonnes de CO₂ en 2019.

Les concentrations de CO2 dans l’atmosphère ont continué d’augmenter

Malgré cette baisse des émissions, les concentrations de CO2 dans l’atmosphère, et le contenu en carbone de la végétation, des sols, et dans les océans ont continué d’augmenter. Alors que le niveau de concentration de CO2 dans l’atmosphère s’élevait à 410 parties par million (ppm) en 2019, ce niveau devrait atteindre 412 ppm en moyenne sur l’année 2020.

Ce nom un peu technique désigne le nombre de molécules de dioxyde de carbone considéré par million de molécules d’air, et sa mesure est un élément crucial pour nous donner une idée plus précise des dégâts.

En effet, selon les travaux du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC), nous devons rester sous le seuil de 450 parties par million de concentration de gaz carbonique dans l’atmosphère pour limiter l’élévation de la température moyenne à +2°C.

Si la moyenne annuelle s’en rapproche de plus en plus dangereusement, nous avions déjà atteint un record le 12 mai 2019, avec un niveau de 415 parties par millions de CO2 dans l’atmosphère pour la première fois en 3 millions d’années ! La dernière fois, c’était durant l’ère géologique du Pliocène. A cette époque, les températures étaient de 3 à 4 °C plus élevées, des arbres poussaient en Antarctique et le niveau des océans était 15 mètres plus haut.

Et ce C02 avait mis des millions d’années à s’accumuler, alors que les concentrations de CO2 dans l’atmosphère liées à l’activité humaine ont augmenté de 48% depuis les niveaux pré-industriels, de 16% depuis les années 1990 et de 3% depuis l’Accord de Paris en 2015 !

Le chercheur principal, le professeur Pierre Friedlingstein, de l’Université d’Exeter, a déclaré : « Bien que les émissions mondiales n’aient pas été aussi élevées que l’année dernière, elles s’élevaient toujours à environ 39 milliards de tonnes de CO2 et ont inévitablement entraîné une nouvelle augmentation du CO2 dans l’atmosphère. Le niveau de CO2 atmosphérique et, par conséquent, le climat mondial, ne se stabiliseront que lorsque les émissions mondiales de CO2 seront proches de zéro. »

En effet, Global Carbon Project précise que l’augmentation de la concentration de CO2 atmosphérique provoque un changement climatique et est responsable de la majeure partie du réchauffement observé jusqu’à présent. En 2020, c’est un puits de carbone terrestre « plus faible » qui est responsable de cette augmentation : il a moins absorbé de CO2 que d’habitude.

Le rôle des sols comme puits de carbone

En 2020, les puits de carbone terrestres et océaniques ont absorbé environ 54 % du total des émissions anthropiques en 2020. Le puits naturel de CO2 terrestre (les sols et les forêts) varie de 3 milliards de tonnes de CO2 en moyenne chaque année en raison des feux de forêt et de phénomènes climatiques comme El Nino qui cause des sécheresses, des incendies et une plus faible croissance des végétaux sous les tropiques, pendant son pic et durant la période qui suit.

Aussi, le Global Carbon Project nous apprend que les émissions dues aux changements d’usage des sols en 2020 étaient inférieures aux niveaux de 2019 et similaires à celles de la décennie précédente, soit environ 6 milliards de tonnes de CO2 en perte nette, dont 16 milliards de tonnes de pertes brute CO2 émises par la déforestation.

Ces 16 gigatonnes de CO2 causée par la déforestation ont partiellement été compensés par 11 gigatonnes de CO2 de gains par la repousse de la végétation, principalement par l’abandon de terres agricoles.

Le groupe de chercheurs préconise ainsi de mettre en place des mesures pour mieux gérer les terres pour à la fois mettre un terme à la déforestation et contribuer à augmenter le puits de CO2 issu de la repousse.

Dans un rapport intitulé « Changement climatique et terres émergées », le GIEC rappelle également l’importance de prendre soin des sols pour lutter contre la crise climatique et avoir des modes de vie plus pérennes.

 « Les terres émergées jouent un rôle important dans le système climatique. L’agriculture, la foresterie et d’autres types d’utilisation des terres représentent 23 % de nos émissions de gaz à effet de serre. Parallèlement, les processus terrestres naturels absorbent une quantité de dioxyde de carbone équivalant presque au tiers des émissions dues aux combustibles fossiles et à l’industrie. » a déclaré Jim Skea, coprésident du Groupe de travail III du GIEC.  

 « Les terres déjà exploitées à ce jour pourraient subvenir aux besoins de la planète dans un environnement climatique en pleine évolution et fournir de la biomasse pour les énergies renouvelables, mais il convient de prendre des mesures rapides et de grande envergure dans plusieurs domaines. N’oublions pas non plus la préservation et la restauration des écosystèmes et de la biodiversité. » estime Hans-Otto Pörtner, coprésident du Groupe de travail II du GIEC.

Pour le GIEC, les émissions de CO2 sont censées culminer en 2020 pour ne faire que décroître ensuite afin de limiter le réchauffement à +2°C… Ainsi, des réductions des émissions mondiales de l’ordre de 1 à 2 milliards de tonnes de CO₂ sont nécessaires chaque année entre 2020 et 2030 pour limiter le changement climatique conformément aux seuils prévus par l’accord de Paris.

Et il va falloir être patient avant de sentir l’effet de la réduction des émissions de GES à cause de l’importante force d’inertie du système climatique. Chaque demi-degré compte. Chaque émission de gaz à effet de serre compte. Chaque être vivant compte. C’est ça, l’urgence écologique et climatique.

Laurie Debove

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