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Des forêts primaires sont illégalement coupées au Canada pour produire de l’électricité « renouvelable »

La Colombie-Britannique est l'un des derniers endroits au monde ayant des forêts tempérées primaires de plaine. Chaque année 15 millions d’hectares de forêts tropicales primaires, soit la superficie de l’Angleterre, sont déboisés. Les forêts primaires sont pourtant essentielles à la protection de la biodiversité et sont des puits de carbone irremplaçables.

Selon une investigation de BBC Panorama, Drax, le premier producteur d’énergie électrique en Angleterre, a acheté des permis d’exploitation forestière pour couper deux étendues de forêts, dont une possédant de larges pans de forêt vierge en Colombie Britannique, au Canada. L’entreprise a d’abord nié leur exploitation près de forêts vierges, puis a nié couper des troncs entiers. Il s’agit là d’un exemple représentatif des dangers de l’utilisation de la biomasse à échelle industrielle.

BBC Panorama a analysé les clichés satellites, retracé les permis d’exploitation forestière et utilisé des images filmées par des drones pour prouver ses découvertes. Selon l’article du radiodiffuseur britannique BBC sur le sujet, la politique d’approvisionnement de Drax stipule pourtant que l’entreprise évitera tout dommage ou perturbation à l’encontre de forêts vierges ou de forêts anciennes.

Malgré cela, les derniers clichés satellites montrent que l’entreprise coupe désormais des pans entiers de forêts primaires.

L’entreprise s’est justifiée auprès de la BBC, expliquant que de nombreux arbres sur place sont morts, et que la coupe permettrait d’éviter le risque de départs de feux. Elle a développé qu’elle n’avait cependant pas coupé les forêts elle-même, et que le permis d’exploitation forestière avait été transféré à d’autres entreprises.

Elle a également affirmé que la plupart des bûches des deux sites identifiés par Panorama ne sont pas utilisées directement, et sont envoyées à des scieries pour fabriquer des produits en bois. Drax n’utiliserait que les restes de sciures de bois pour ses usines de fabrication de granulés, et seulement les bûches qui sont petites, déformées ou pourries.

Panorama a vérifié ces informations, et les autorités de Colombie Britannique ont confirmé que l’entreprise détient toujours la licence d’exploitation. Les documents de la base de données nationale sur les forêts au Canada ont également montré que seulement 11 % du bois livré aux deux centrales de Drax pouvait être classé d’une qualité moindre.

Alors que l’entreprise prétend utiliser des résidus d’exploitants forestiers, de nombreux résidus de forêts primaires sont laissés sur place et des arbres centenaires ont été rasés

Panorama BBC a également filmé la trajectoire aller-retour d’un camion rempli de troncs sur 190 kilomètres qui quittait l’usine de bouletage de Drax, collectait des piles de troncs entiers d’une forêt primaire puis retournait à l’usine pour la livraison.

La centrale électrique de Drax dans le Yorkshire est une centrale à charbon convertie, qui produit désormais 12 % de l’électricité renouvelable du Royaume-Uni. Il a déjà reçu 6 milliards de livres sterling de subventions pour faire de « l’énergie verte ».

Michelle Connolly, écologiste, s’est exprimée pour la BBC : « C’est vraiment dommage que les contribuables anglais financent cette destruction avec leur argent. L’exploitation des forêts primaires et leur conversion en granulés à brûler pour en faire de l’électricité, c’est tout à fait insensé. »

La Colombie-Britannique est l’un des derniers endroits au monde ayant des forêts tempérées primaires de plaine. Chaque année 15 millions d’hectares de forêts tropicales primaires, soit la superficie de l’Angleterre, sont déboisés. Les forêts primaires sont pourtant essentielles à la protection de la biodiversité et sont des puits de carbone irremplaçables.

En zone tempérée, les arbres ne poussant que 5 ou 6 mois par an à cause de l’hiver, il faut environ 10 siècles sans aucune intervention de l’homme pour qu’une forêt primaire se régénère.

Des images satellites montrent l’étendue des forêts primaires abattues en Colombie-Britannique

Dans des dimensions industrielles, la production d’énergie biomasse en brûlant du bois à des conséquences particulièrement délétères sur l’environnement.

En France, la filière bois-énergie est en pleine expansion et l’approvisionnement en bois génère un conflit d’usage entre les méga-centrales biomasses qui nécessitent une énorme quantité de bois, souvent faisant appel à des productions étrangères, et les petites entreprises locales.

Depuis 5 ans, la pression s’est par ailleurs accentuée en France sur les scieries françaises, les coupes partant directement dans des exportations, comme la Chine, comme nous l’expliquait Fabrice Foulon, dont la scierie familiale a dû fermer en 2021.

Lire aussi : « Nous avons financé le reboisement des forêts françaises pour se faire piller par l’étranger »

En 2018, dans une lettre ouverte, plus de 700 scientifiques alertaient le Parlement européen sur l’utilisation et le développement de biomasse forestière à une échelle industrielle, qui menace directement la préservation des forêts mondiales et participe à l’accélération du changement climatique.

Si l’utilisation de sous-produits provenant de déchets de bois et de résidus forestiers sont appelés à se décomposer et libérer du dioxyde de carbone au bout de quelques années, abattre spécifiquement des arbres et les brûler pour produire de l’énergie libère du carbone qui serait autrement resté stocké en forêt.

Résultat, chaque kilowattheure produit émet plus de carbone lorsque c’est par combustion de bois que par la combustion fossile.

La solution actuelle pour remplacer le charbon ne se situe pas dans le fait de brûler plus d’arbres pour produire de l’énergie, et particulièrement pas dans l’exportation massive d’arbres dans ce but, mais bien dans le remplacement des combustibles fossiles par des énergies à faibles teneur en carbone, telle que l’énergie solaire et éolienne.

Mais actuellement, 75 % de la forêt française appartient à des propriétaires privés, qui restent libres de vendre leur bois au plus offrant. Une remise en cause profonde par les pouvoirs publics est capitale afin d’endiguer cette crise.

Maïté Debove

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