Sur une demande de la Commission Européenne, Netflix et YouTube ont pris des mesures pour réduire la bande passante qu’ils occupent sur Internet afin de ne pas saturer les réseaux. Une mesure qui avait déjà été recommandée en raison des impératifs écologiques actuels, mais n’avait pas été entendue à l’époque.
Diminuer le débit pour libérer de la bande passante
L’un des effets de la période de confinement instaurée dans la plupart des pays européens est l’augmentation directe du nombre d’utilisateurs en simultané sur Internet, notamment pour regarder des vidéos en ligne sur des plateformes telles que Netflix ou YouTube.
Inquiet de cette recrudescence d’activité, le commissaire européen au Marché intérieur leur a demandé jeudi de réduire la bande passante qu’ils occupent sur Internet afin d’éviter une saturation des réseaux et laisser davantage de bande passante à l’éducation en ligne et au télétravail, généré à cause de l’épidémie de Covid-19. Suite à cet appel, Netflix va réduire les débits sur tous ses flux en Europe pendant 30 jours.
« Nous estimons que cela permettra de réduire le trafic de Netflix sur les réseaux européens d’environ 25 % tout en assurant un service de bonne qualité à nos abonnés », écrit un porte-parole de la plate-forme de VOD au média The Verge.
En clair, les signaux HD et 4k seront diminués en journée, présentant une qualité maximale plus faible que d’habitude. De son côté, YouTube va paramétrer chaque vidéo pour qu’elle se lance avec une qualité d’image standard, voire dégradée (480p au lieu de 720p ou 1080p par exemple). Si les utilisateurs pourront changer la qualité, il leur est demandé de ne pas le faire et de privilégier les connexions Internet (Wi-fi, câble…) aux connexions mobiles (3G ou 4G) pour regarder des vidéos en ligne.
La sobriété numérique pour réduire la consommation mondiale d’énergie et les émissions de gaz à effet de serre
Mais le problème principal du boom de l’utilisation des outils numériques n’est pas une question de capacité technologique, mais bien de l’énergie et des ressources demandées pour faire fonctionner ce Léviathan numérique. Dans un rapport sur la sobriété numérique, le cabinet The Shift Project rappelle ainsi que :
Le numérique émet aujourd’hui 4 % des gaz à effet de serre du monde, et sa consommation énergétique s’accroît de 9 % par an
Ainsi, la diminution de la bande passante de Netflix et YouTube était l’une des recommandations du cabinet pour mettre en place une nécessaire sobriété numérique. D’autres acteurs comme Imago, plateforme vidéo d’éducation populaire autour de la transition, sont des fervents défenseurs d’un usage pondéré du numérique pour en limiter l’impact écologique.
Parmi les mesures employées par Imago : pas de publicité ou de lancement automatique des vidéos, et l’utilisation du système peer-to-peer pour l’hébergement de certaines vidéos, sauf quand les réalisateurs de la plateforme préfèrent passer par YouTube.
« Internet est un gouffre énergétique qui pèse sur les ressources de notre planète. Ce choix de limiter la bande passante est une excellente chose. A notre niveau, nous avons mis en place dès notre lancement beaucoup d’initiatives qui, espérons-le, seront copiées un jour. Mais surtout, il faut travailler sur la résolution. La norme devrait être la résolution 720p bien suffisante dans la plupart des usages. Mais pire encore, si sur YouTube vous lancez une vidéo et changez d’onglet pour lancer un autre site en poursuivant l’écoute, la vidéo continue de se jouer avec la même résolution. C’est une hérésie. Sa résolution devrait être diminuée au maximum, voire passée en « audio seul ». Nous y travaillons. » explique ainsi Nicolas, co-fondateur d’Imago, pour La Relève et La Peste
L’utilisation des réseaux sociaux
Mais Netflix et YouTube ne sont pas les seuls consommateurs de la bande passante mondiale, et donc de l’énergie consommée par Internet, avec l’usage des réseaux sociaux. A l’heure du confinement, Internet semble devenu, plus que jamais, une fenêtre sur le monde et permet à chacun.e de rester en contact avec ses proches.
Le nombre d’appels audio et vidéos sur Whatsapp a ainsi doublé dans les pays touchés par les mesures de confinement, dont l’Italie et la France. A tel point que Mark Zuckerberg, le PDG de Facebook, maison mère de WhatsApp, a annoncé qu’il allait « tout mettre en oeuvre » pour éviter une surchage des réseaux.
« La trajectoire d’émissions suivie par notre système numérique est très fortement dépendante de la manière dont nous choisissons d’utiliser ces outils, bien plus que de l’avancement technologique lui-même : malgré les avancées technologiques prodigieuses de ces dernières années, une réduction effective de la consommation énergétique totale de nos technologies ne peut se faire à court et moyen termes qu’au travers d’un système d’usages construit et réfléchi. C’est cette réflexion que propose le concept de sobriété numérique. » explique ainsi The Shift Project dans son rapport
Cette période de confinement devient alors l’occasion de repenser notre usage du numérique : s’informer oui, mais ne pas relayer des informations sous le coup de l’émotion, sans être sûrs de leur source, privilégier les appels téléphoniques pour prendre des nouvelles de ses proches plutôt que les appels vidéo via Internet, télécharger des films (ou mieux lire des livres) plutôt que de les voir en streaming.
Bref, rester en contact et informés sans tomber dans une boulimie numérique. Et prendre ce temps pour repenser les usages de nos sociétés ultra-connectées : quels sont les services numériques indispensables ou vitaux ? que privilégier et pourquoi ?