Alors que la nécessité de diminuer ses déchets, qu’ils soient particuliers ou industriels, est aujourd’hui au cœur de l’urgence environnementale, une entreprise du Maine-et-Loire, Néolithe, a mis au point un processus innovant pour tenter de répondre en partie à cette problématique. Néolithe récupère des déchets ultimes non dangereux afin d’en faire de petits gravats qui serviront à faire du béton pour les entreprises locales. Une idée astucieuse qui met en avant l’économie circulaire et le recyclage tout en créant des emplois ayant du sens.
Se substituer à l’enfouissement et l’incinération
C’est en 2019 que William Cruaud, avec son fils Nicolas Cruaud, encore étudiant à Polytechnique mais aussi Clément Bénass, étudiant d’AgroParisTech, lance son entreprise installée dans la petite commune de Chalonnes-sur-Loire, en Anjou, là où la famille a vécu.
Dans un souci avant tout environnemental, ils mettent au point une technique de recyclage des déchets ultimes en remplacement de l’enfouissement et de l’incinération, en proposant une solution de valorisation de la matière, une solution circulaire, pour en faire du matériau de construction.
Les déchets non dangereux récupérés viennent de sites industriels ou de construction et sont non recyclables. Une fois sur place, ils sont une fois encore triés, puis transformés en petits cailloux, précisément des granulats qui seront ensuite utilisés essentiellement par les entreprises de Bâtiments et travaux publics (BTP) pour faire du béton.
« L’objectif est toujours de privilégier la meilleure manière de traiter le déchet. Nous encourageons d’abord une approche zéro déchet ou de réduction des déchets, puis un bon recyclage avant de proposer notre solution. Dans la logique, à terme, l’idéal serait que l’on ait même plus à proposer nos services, cela signifierait que des technologies permettent un recyclage 100% performant en amont », explique le directeur des affaires publiques chez Néolithe, Quentin Laurens, à La Relève et la Peste.
Séquestrer le carbone contenu dans le déchet
« Le premier bénéfice, c’est qu’il y a un sur-tri de matière où l’on arrive à davantage de matière recyclable. Le deuxième bénéfice, c’est de reproduire par un procédé de valorisation de la matière, un matériau de construction. Le troisième, c’est d’éviter l’extraction de matériaux dans les carrières. Le dernier bénéfice, et peut-être le plus important, c’est notre capacité à séquestrer le carbone qui est contenu dans le déchet », précise Quentin Laurens à La Relève et la Peste.
Cette approche permet en effet à Néolithe de ne pas enfouir les déchets ultimes.
« Lorsque la matière est enfouie, au contraire, elle se dégrade, puis relâche du méthane principalement, des gaz à effet de serre. Le but, c’est d’éviter ça, ou l’incinération. Bien que l’on récupère aujourd’hui la chaleur de l’incinération, le problème réside dans le fait que l’on ne trouve pas que du bois ou du papier dans ces déchets incinérés, il y a encore énormément de plastique. L’empreinte carbone reste donc trop importante », continue-t-il.
Le procédé mis au point par Néolithe permet alors d’emprisonner le carbone bionique contenu initialement dans le déchet.
« Nous sommes aujourd’hui dans un contexte réglementaire qui encourage à trouver des solutions alternatives à l’enfouissement et l’incinération est un peu dans le viseur du marché carbone. Il y a une véritable demande de circularité aussi de la part de la population, qui souhaite des solutions plus vertueuses », abonde Quentin Laurens pour La Relève et la Peste.
Si l’entreprise communique autour d’une « fossilisation accélérée » du déchet, elle reconnaît que le terme est avant tout imagé pour permettre au grand public de bien comprendre le processus.
« Dans les faits, scientifiquement, nous ne minéralisons pas la matière. Nous utilisons en réalité un liant, dont nous gardons le secret industriel, qui nous permet d’associer ces éléments constitutifs du déchet et de fabriquer, par une réaction physico-chimique à froid, un futur matériau de construction qui va gagner ses propriétés mécaniques en séchant et en maturant », détaille le directeur des affaires publiques à La Relève et la Peste.
Le déchet est donc broyé en poudre, associé au liant, et en ressort comme de la pâte à modeler. Celle-ci est ensuite mise sous pression et formée pour correspondre aux standards attendus dans les entreprises du BTP.
Les mêmes propriétés mécaniques
Cette technique confère les mêmes propriétés mécaniques aux gravats que les cailloux classiques, suffisantes pour pouvoir intégrer des bétons, mais elle permet aussi d’obtenir un granulat conforme et non dangereux.
« Le liant est un produit minéral, sourcé de façon locale. Nous vérifions également la non-dangerosité à l’instant T mais aussi sur les années à venir. Pour cela, nous avons notamment recours à des analyses de vieillissement accéléré qui montre que le processus est viable écologiquement », ajoute Quentin Laurens.
Aujourd’hui forte de ses 200 employés, Néolithe espère mailler le territoire français de son savoir-faire en France afin de traiter, toujours localement, le déchet ultime, tout en produisant des ressources utilisées par des entreprises locales. L’objectif : former une boucle d’économie circulaire en déployant des usines avec une capacité de traitement de 100 000 tonnes par an et permettant la création d’emplois locaux directs.
« Il y a aujourd’hui une nouvelle génération d’industriels qui arrive et qui s’efforce à apporter des solutions à des problèmes environnementaux non résolus, nous ne sommes pas les seuls. Il existe des initiatives dans le textile, dans l’énergie… c’est aussi cette nouvelle industrie qui va apporter des emplois de meilleure qualité, avec de bonnes conditions et qui ont du sens », conclut Quentin Laurence pour La Relève et La Peste.
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